vendredi 28 mai 2010

Anges et espaces stellaires



(Pour les éléments "factuels" "ufologiques" et l'hypothèse exobiologique, cf. Wikipédia et les liens.)

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Des ovnis aux anges en passant par le paradoxe de Fermi...

Le 24 juin 1947, Kenneth Arnold, un pilote privé américain, rapporta avoir vu neuf objets volants inhabituels près du Mont Rainier dans l'Etat de Washington alors qu'il effectuait un vol de reconnaissance à bord de son appareil à la recherche d'un avion militaire manquant. Il décrivit les objets comme «brillants», et leur vol comme «irrégulier» avec une «extraordinaire vitesse». C'est cette histoire, largement diffusée par l'Associated Press, qui est à l'origine du lancement de la controverse sur les « soucoupes volantes » (en anglais flying saucers) devenues par la suite des ovnis (objets volants non identifiés).

C'est au cours d'un entretien avec la presse qu'un détail aurait été introduit qui aurait conduit à l'invention de l'expression « flying saucer ». Arnold, décrivant son observation aux journalistes, leur dit notamment que les objets volaient de façon irrégulière, « comme une soucoupe qui ricocherait sur l'eau ». C'est à la suite de la parution des articles le lendemain dans la presse et des commentaires faits à la radio que les expressions « soucoupe volante » et « disque volant » seront inventées par les journalistes, bien que cette description se référât au déplacement des objets plutôt qu'à leur forme. Dans la semaine qui suivit, des centaines d'observations similaires seront rapportées par des témoins qui reprendront ces termes pour les désigner. Arnold se plaignit à de nombreuses reprises d'avoir été cité de façon inexacte, maintenant que les objets avaient la forme d'un demi cercle à l'avant et étaient triangulaires à l'arrière. Il précisera aussi par la suite que l'un d'eux ressemblait à un « boomerang » ou un « croissant »...

Deuxième moment important, « l'affaire Roswell » (Roswell Incident), qui désigne le crash d'un objet non identifié aux États-Unis près de Roswell (Nouveau-Mexique) en juillet 1947. Cet événement est considéré par certains ufologues et une partie des conspirationnistes comme la plus extraordinaire rencontre rapprochée avec des extraterrestres au XXe siècle et par d'autres comme un mythe moderne.

Deux courants de pensées s'affrontent concernant la nature réelle de cet incident : les sceptiques et le gouvernement des États-Unis d'un côté et les partisans de l'hypothèse extraterrestre de l'autre. Le gouvernement explique l'incident par le crash d'un ballon-sonde top-secret Mogul tandis que les partisans de la thèse extra-terrestre soutiennent que l'épave retrouvée est celle d'un ovni extra-terrestre, récupérée et dissimulée par les militaires. Les partisans de l'hypothèse extraterrestre (H.E.T.) expliquent en effet certaines manifestations d'ovni par des visites extraterrestres (la communauté scientifique parle de Phénomène aérospatial non identifié ou « PAN »).

L'incident de Roswell a depuis évolué en phénomène de culture populaire hyper-médiatisé, devenant l'une des manifestations supposées extra-terrestres les plus célèbres...

En 1993, un producteur londonien, Ray Santilli, prétend posséder le film d'une autopsie d'un extraterrestre qui aurait survécu au crash. Le 26 mars 1995, une dépêche de l'AFP évoque un film qui aurait été « tourné il y a près de 50 ans » et montrant l'autopsie d'un extraterrestre après l'accident d'une soucoupe volante. L'affaire de Roswell revient à la une des médias.

Bien plus tard, le 7 avril 2007, la Warner Bros sortira un reportage décrivant « l'histoire d'une fausse autopsie ». Les effets spéciaux auraient été réalisés par le même spécialiste, John Humphreys qui, selon le reportage, avait créé douze ans plus tôt des créatures en latex remplies d'organes de mouton. Mais les convictions des convaincus resteront inébranlables.

Entre temps, le samedi 26 juin 1995, le film entier a été diffusé en France par TF1, dans une émission animée par Jacques Pradel. Le docteur Patrick Braun, chirurgien international à Paris, déclarait que selon lui l'autopsie est bien réalisée sur un corps véritable qui n'est pas non plus le corps d'un être humain malformé. Le docteur Braun et un expert judiciaire en odontologie légale et anthropologie médico-légale, le docteur Josiane Pujol, considèrent qu'aucune pathologie connue de la médecine ne peut expliquer la structure organique du corps autopsié dans le film.

Les incidents et rencontres se sont depuis longtemps multipliés, désormais classifiés en différents types de rencontres.

On va voir qu'on a là un aboutissement d'un processus remontant à la disparition... « officielle » des anges.

Cf. C.-G. Jung, Un mythe moderne. Des "Signes du ciel" (Folio essais) :
En entreprenant l'étude psychologique des soucoupes volantes, C. G. Jung refuse de se prononcer sur le problème de la matérialité physique des faits et il étudie pour l'essentiel les soucoupes volantes, que l'on prétend avoir « vues », comme si on les avait « rêvées ». Il ne s'attache que secondairement au problème de leur réalité externe. Même si elles revêtaient une réalité physique, support du phénomène psychologique, C. G. Jung montre que, dans le sens le plus large, ce dernier est le fruit de la fonction imaginaire inconsciente. Le lecteur découvrira comment le phénomène et l'imagerie des soucoupes volantes expriment, de façon totalement inattendue, l'inadéquation de l'homme moderne à lui-même et au monde, la détresse qui en résulte, une mise en forme balbutiante - grâce à un langage puisé dans l'actualité - de ce qui l'agite, et aussi une tentative de conciliation de ses forces contraires. C. G. Jung inscrit - au-delà de son enquête - la somme de son savoir, de sa réflexion, de son intuition sur le monde et son avenir. Il y dégage pour nous, à l'occasion d'un phénomène contemporain insolite, en une manière d'étude de psychologie appliquée, les leçons de sa science et aussi de sa vie. Le Mythe moderne de C. G. Jung montre un point de jonction entre deux infinis, l'infini du monde extérieur et l'infini qui sommeille en tout homme.

Quant à l'hypothèse de vie extraterrestre matérielle, pour en rester pour l'instant à cette approche, et à l'hypothèse de civilisations extraterrestres, elle trouve un appui très fort dans la statistique. Cf. « l'équation de Drake »...

L'équation proposée par Frank Drake en 1961 est une célèbre proposition mathématique concernant les sciences telles que l'exobiologie, la futurobiologie, l'astrosociologie, ainsi que le projet SETI (search for extraterrestrial intelligence). Formulée ainsi :

N = R x fp x ne x fl x fi x fc x L

N est le nombre de civilisations extraterrestres dans notre galaxie avec lesquelles nous pourrions entrer en contact,
R : le nombre d'étoiles naissantes chaque année dans la Voie Lactée ;
FP : fraction de ces étoiles qui possèdent un système planétaire ;
NE : nombre moyen de planètes similaires à la Terre (aptes à abriter une forme de vie) ;
FL : nombre de planètes habitables sur lesquelles une forme de vie a pu évoluer ;
FI : taux des planètes où une évolution biologique produit effectivement une forme de vie intelligente ;
FC : taux de ces formes de vie intelligentes capables de communiquer à travers l'Univers ;
L : durée de vie moyenne d'une civilisation capable de communiquer à travers l'Univers (exprimée en années).

Cette équation tente d'estimer le nombre potentiel de civilisations extraterrestres dans notre galaxie avec qui nous pourrions entrer en contact. Le principal objet l'équation est de donner le nombre probable de ces civilisations.

Bref, dans cette perspective, est posée la probabilité de l'existence de civilisations extraterrestres.

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La même hypothèse statistique semble poser ipso facto la probabilité que quelques-unes au moins de ces civilisations ont dû accéder jusqu'à nous.

Où on en vient au paradoxe de Enrico Fermi :

En 1950, Enrico Fermi propose l'hypothèse d'une civilisation extraterrestre dotée de moyens techniques raisonnables, à la portée de la civilisation humaine de l'époque (Fermi étant le père de l'énergie nucléaire civile) : voyage intersidéral à une vitesse nettement inférieure à la vitesse de la lumière et colonisation d'une nouvelle planète pour la transformer en nouvelle base de départ, chaque cycle prenant quelques centaines ou milliers d'années et permettant d'avancer, par bonds successifs, plus loin dans l'espace de quelques dizaines d'années-lumière.

Sachant que la Voie lactée fait environ 50 000 années-lumière de rayon, une vitesse globale du front de colonisation de 1% de la vitesse de la lumière suffit à la coloniser entièrement en quelques millions d'années, ce qui est très peu par rapport à l'âge de la galaxie et au temps qu'il a fallu à la vie terrestre pour évoluer jusqu'à la civilisation humaine actuelle. Si les extraterrestres existent (L'équation de Drake tente de quantifier leur nombre en faisant intervenir de nombreuses variables par ailleurs toutes inconnues sauf une), la logique serait donc que ce phénomène s'est déjà produit, et même éventuellement plusieurs fois. Le paradoxe, c'est que nous n'en observons aucune trace.

Enrico Fermi demande : « si les extraterrestres existent, mais où sont-ils donc ? ». Pourquoi n'avons-nous vu aucune trace d'une vie intelligente extraterrestre, par exemple des sondes, des vaisseaux ou des transmissions radios ?

Les réponses proposées à ce paradoxe sont nombreuses.

1ère réponse : les civilisations (ou les entités) extra-terrestres n'existent pas.

La probabilité qu'une forme de vie avancée puisse se développer ailleurs dans l'univers serait beaucoup plus faible qu'estimée initialement. Ce pourrait être parce que les facteurs permettant de développer la vie sont très nombreux (partant de la présence des éléments chimiques structurant la vie et d'une source d'énergie allant jusqu'à la présence d'une planète géante telle que Jupiter aspirant les astéroïdes qui, autrement, détruiraient trop rapidement la vie en train de se former, ou celle de la Lune empêchant l'orbite de la Terre d'être instable...). Ce pourrait être aussi parce que, même ces facteurs réunis, les probabilités que les éléments chimiques se combinent pour former de la matière vivante sont si faibles que cet événement ne s'est produit qu'une fois dans toute l'histoire de l'univers, c'est, entre autres, pour tenter de trancher cette question que l'on recherche activement des traces de vie sur Mars et que l'on envisage d'en faire autant sur Europe (satellite de Jupiter), seul autre corps du système solaire, en dehors de la Terre, à posséder de l'eau liquide (avec très probablement aussi Encelade, un satellite de Saturne).

Le principe anthropique semble conforter cet argument : pourquoi observerions-nous un univers de cette taille si la vie avait pu apparaître dans un univers plus petit et donc (sans doute) moins improbable ? Objection possible : notre présence n'arrête pas pour autant l'actuelle expansion de l'Univers. Que pourrait penser une possible civilisation (ne connaissant pas notre existence) dans 4 milliards d'années dans un univers encore plus grand ? Les hommes n'étant plus vivants tomberaient sûrement dans l'anonymat, ce qui pose bien sûr un problème pour les religions anthropocentristes. Réponse possible : l'univers serait plus étendu, mais pas plus grand au sens où il ne contiendrait pas plus de matière après son expansion qu'avant, et donc pas plus de probabilité de donner la vie (voire moins en raison de la réduction du nombre d'étoiles par épuisement de l'hydrogène et de l'extinction des plus anciennes).

Et si l'on peut admettre des vies extraterrestres, la vie n'évolue pas nécessairement vers l'intelligence. Ici la leçon est prise de notre première expérience de conquérants d'outre-terres, l'expérience coloniale et son catastrophique ethnocentrisme des conquérants, qui, étendu la la dimension de l'univers, devient anthropocentrisme.

L'anthropocentrisme humain tend à considérer le processus évolutif comme un processus linéaire amenant inexorablement vers sa niche écologique : une forme de vie intelligente (et d'autres ajouteront « qui peut vivre en harmonie sans vouloir s'entre-tuer »). L'intelligence fait partie des nombreux mécanismes d'adaptation permettant à des espèces de survivre, mais n'est pas pour autant le seul. Les cafards, les rats, les fourmis, les bactéries peuvent survivre dans de bien pires conditions. L'intelligence nous a bien réussi sur notre planète, qui possédait ses conditions spécifiques, mais chaque planète pouvant héberger la vie peut fort bien avoir des espèces dominantes ayant suivi d'autres voies ; d'ailleurs, même sur Terre, les dinosaures ont dominé pendant pratiquement 200 millions d'années sans évoluer vers une espèce capable de développer une civilisation technique.

Et puis, l'avènement d'une intelligence technicienne est-elle le débouché inéluctable de l'intelligence ? La série de coïncidences politico-religieuses qui, de la fin du Moyen-Âge à la Renaissance et aux Lumières, utilisant des observations comme celles de Galilée, ont conduit au développement des synthèses philosophiques nouvelles qui ont permis par la suite les développements techniques actuels, est tout sauf inéluctable !

Sans compter la question de savoir si l'intelligence technicienne est le summum de l'intelligence !

Avec cela, il ne faut pas oublier que la vie intelligente, et notamment technicienne, semble vouée à l'autodestruction avant d'essaimer.

Il y a au moins trois raisons qui peuvent soutenir cette hypothèse.

La première est que l'intelligence animale et humaine telle qu'on l'observe est directement liée à l'agressivité (cf. René Girard), et qu'elle en rend les effets de plus en plus graves. À l'extrême, elle peut s'auto-exterminer, et avec elle une bonne partie des formes vivantes de la planète. C'est le scénario brutal.

La seconde est que la vie animale est régulée et motivée par des systèmes émotionnels (douleur, angoisse, plaisir, etc.), que l'intelligence permet de modifier, court-circuiter. Si on donne à un rat la possibilité d'auto-stimuler ses centres nerveux associés au plaisir, il le fait, et il en meurt. Les drogués donnent un autre exemple similaire, et la façon dont les émotions naturellement associées à la reproduction (plaisir sexuel, émotions familiales) sont maintenant court-circuitées et obtenues sans reproduction (avec chute de la natalité sous le seuil de maintien de la population, dès que les techniques adéquates sont disponibles) est également très éclairante. Inversement, l'intelligence peut donner une angoisse existentielle face à une réalité vertigineuse, conduisant au suicide individuel. La perspective de voir une espèce intelligente disparaître « de bonheur » ou « d'angoisse » n'a rien d'inimaginable. C'est le scénario de la disparition en douceur.

La troisième est que sur le chemin des avancées technologiques menant à l'essaimage, il s'en trouve au moins une qui soit incontournable mais mène immanquablement à la perte. Par exemple une dont toute expérimentation a un résultat cataclysmique (vitrification de la planète), ou une très utilisée mais aux effets délétères découverts trop tard (endommagement irréversible de l'environnement ou de l'espèce). Dans ce cas nous serions voués nous aussi à provoquer notre perte.

Dans tous les cas, la vie intelligente peut disparaître avant de se diffuser ou de laisser des traces visibles. Sans aller jusqu'à l'extinction, elle peut aussi se retrouver suffisamment rare pour que chaque individu ait déjà assez à faire pour découvrir seulement la planète, et pour que les ressources importantes nécessaires à un voyage ou un signal spatial ne soient plus disponibles.

Admettons à présent que l'on parvienne à dépasser ces hypothèses pessimistes... Et que des civilisations extra-terrestres existent.

Admettons dans un second temps que soient dépassées les difficultés et obstacles à une rencontre, comme la durée requise (et les embranchements philosophiques) pour que puisse se développer une civilisation technicienne ; ou comme les limitations dues à la physique : pensons par exemple au fait qu'il se peut que l'expansion de l'univers jointe à des questions de lenteur de la lumière et de bilan énergétique interdise de façon durable des voyages suivis à l'extérieur d'un système solaire. La récente découverte (1998) d'une accélération de l'expansion de l'univers donne un poids nouveau à cette hypothèse.

Admettons aussi que soient dépassées les difficultés voulant que les civilisations extraterrestres soient différentes de nous à un point où nous n'aurions pas la possibilité de communiquer. Parmi les raisons possibles à une telle impossibilité, on peut citer :

– des différences considérables d'échelle, y compris par exemple d'échelle de temps ;
– des différences dans la façon de penser, à un point rendant toute communication non seulement inintéressante pour les deux parties mais également structurellement impossible (par exemple, il nous serait extrêmement difficile de communiquer avec une intelligence collective telle qu'une fourmilière) ;
– une différence fondamentale d'essence, etc.

Ces difficultés dépassées, on en vient alors aisément à la fonction angélique des extraterrestres. L'hypothèse est en coïncidence avec les bouleversements cosmologiques mettant en question la fonction des anges (dieux, Intelligences célestes, etc.) qu'on avait liée à la cosmologie. Moment caractéristique : le moment lunette de Galilée / 1609-1610. Moments moins marquants mais similaires : l'atomisme de Démocrite et des épicuriens ou l'univers de Giordano Bruno... Bref les anges ébranlés voient leur existence hypothéquée en faveur de l'hypothèse extra-terrestre.

On sait que de nombreux cultes des extraterrestres se sont développés, proposant une relecture des textes sacrés. Où la rejonction de l'angélologie s'inverse ! - : « Ce ne sont pas les extraterrestres qui remplacent les anges, mais les anges étaient des extraterrestres que notre avancée technologique relative nous permet désormais de reconnaître comme tels ! »

On retrouve alors toutes les catégories d'anges de l'ancienne angélologie, depuis ceux des anges – ceux que l'angélologie d'un Denys l'Aréopagite, par ex., situe au somment de la hiérarchie angélique – qui ne s'occupent pas de nous, jusqu'à ceux qui nous guident, nous surveillent et nous protègent, et nous protègent même de nous-mêmes.

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Cette nouvelle perspective angélologique se pose en des termes regroupant, et souvent opposant, les différents degrés de la hiérarchie angélique. Depuis l'idée que les extraterrestres ne nous ont jamais visités pour différentes raisons, jusqu'à la certitude, qui est celle de David Vincent, « qu'ils sont déjà parmi nous », soit comme êtres bienveillants soit comme êtres malveillants. Ces hypothèses souvent perçues comme contradictoires en ufologie, ou en « exobiologie », ne le sont nullement en angéloglogie. Il suffit de lire les différentes hypothèses exobiologiques comme correspondant, non pas à diverses hypothèses angélologiques, mais à divers degrés de la hiérarchie angélique.

On peut ainsi parcourir les différentes hypothèses comme autant de degrés descendants des différents ordres angéliques,

1er ordre angélique. Les Séraphins, les Chérubins, les Trônes : ordre d'anges essentiellement tournés vers Dieu – qui, donc ne s'occupent pas particulièrement de nous, Choses formulées, en perspective ufologique/exobiologique, dans les termes suivants :

Les civilisations extra-terrestres existent, ont développé la technologie pour nous visiter, mais ne l'ont pas fait. Ici, on est est dans la proximité du pôle supérieur de la hiérarchie angélique – avec comme formule : «la preuve qu'il y a des êtres intelligents ailleurs que sur Terre est qu'ils n'ont jamais essayé de nous contacter.» (Bill Watterson dans Calvin et Hobbes)

On peut considérer que, soit par hasard, soit pour des raisons éthiques, aucune des civilisations qui seraient apparues n'aurait souhaité s'étendre partout dans la galaxie, laissant à de nouvelles formes de vie le temps de se développer.

Ils peuvent également estimer que la probabilité d'une autre vie intelligente sur une autre planète est faible et ne nécessite pas une recherche sur le long terme.

Enfin, l'application du paradoxe de l'abondance, si leur société se trouvait avoir résolu la question du besoin et si leur psychisme avait une similitude avec le nôtre, peut avoir créé chez eux une importante passivité en éliminant toute recherche intellectuelle. Les éventuels extraterrestres pourraient donc fort bien adopter une attitude de cocooning faisant qu'ils se passent très bien de nous et des complications d'un voyage pour venir nous voir.

Le débat sur notre propre Terre concernant l'exploration spatiale (coûts importants, retombées hypothétiques…) reflète déjà cette préoccupation.

Le 2e ordre angélique fait intermédiaire entre le premier, voué en son sommet à la contemplation de Dieu, et le troisième, chargé de surveiller, guider, assister les hommes. Chez Denys, l'ordre intermédiaire est celui qui regroupe les Dominations, les Autorités, les Puissances – intermédiaire, donc.

Le 3e ordre angélique concerne les anges qui s'occupent de nous : les Principautés, les Archanges, les Anges. Ici on recoupe l'hypothèse des extraterrestres nous visitant :

Les civilisations extra-terrestres existent et nous ont visités, mais ne signalent pas leur présence :

D'éventuels extraterrestres, même s’ils sont passés sur la planète, ne lui ont peut-être pas trouvé d'intérêt, et ont continué leur chemin (ou se sont abstenus de toute visite, compte tenu des informations collectées par leurs capteurs). Une civilisation capable de se déplacer entre systèmes solaires de la galaxie ne doit pas avoir de difficultés à s'approvisionner dans des endroits plus riches ou plus pratiques pour elle, ou tout simplement pour synthétiser la matière utile (au lieu de la transporter d'une planète à une autre, au prix d'efforts et surtout d'un délai exorbitant). Tout ce que nous aurions une chance de voir serait de temps à autres quelques routards galactiques égarés.

Même s'ils se sont aperçus de notre présence les extraterrestres n'ont peut-être pas plus de choses à nous dire que nous n'en avons à dire aux chimpanzés ou aux fourmis. Pire : ils pourraient nous juger impossibles à éduquer et ne pas souhaiter perdre leur temps avec nous.

On peut imaginer enfin que les extraterrestres, s'ils sont passés, l'ont fait il y a trop longtemps pour nous, avant notre apparition (Hypothèse du rendez-vous manqué).

Des extraterrestres existeraient bien et s'intéresseraient à notre espèce :
Ils pourraient le faire de la même façon que nous nous intéressons aux animaux dans des réserves naturelles, par curiosité scientifique et en cherchant à interagir le moins possible avec eux. Les animaux d'un parc naturel ne savent jamais qu'ils sont dans un parc naturel. Et nous ne consacrons pas de ressources à essayer d'enseigner les équations différentielles à des bonobos sauvages, nous préférons les laisser vivre de façon traditionnelle.

L'hypothèse du zoo pourrait aussi n'être qu'une première étape dans le cadre d'une hypothèse plus globale d'un apartheid cosmique. Au lieu de laisser les primates vivre de façon traditionnelle, l’homme lui-même pourrait aussi choisir demain de les guider ainsi dans une évolution contrôlée destinée à faire naître une nouvelle espèce intelligente semblable à l’espèce humaine, dans des réserves terrestres, ou mieux encore, extraterrestres. S'il était seul dans l’univers, la vie intelligente serait ainsi mieux préservée, et l’homme ferait déjà par là œuvre utile. Les moyens dont il dispose actuellement lui permettraient cette entreprise. Sans parler des retombées technologiques considérables de la terraformation d’une planète, les connaissances pouvant être acquises en cette occasion dans le seul domaine des sciences de la vie (conscience, connaissance du cerveau, etc.) pourraient prochainement inciter l’homme à se lancer dans un tel projet cosmique.

Des ET beaucoup plus avancés pourraient avoir fait ce choix de nous guider du primate vers l'homme, intervenant par exemple avec des masques humains, par le biais des religions ("apparitions, miracles"), et par des moyens scientifiques et technologiques de télésurveillance et de contrôle que nous commençons à maîtriser. Cette assistance discrète en apartheid cosmique nous aurait permis de nous éveiller à la conscience sans nous transformer en « robots » par une présence trop dominante. Eux-mêmes issus d'une telle évolution, ils auraient formé une civilisation avant l'homme et seraient entre temps devenus des êtres artificiels. « Parents ou tuteurs cosmiques » de l’homme, ils attendraient naturellement de lui qu'il devienne à son tour "parent ou tuteur cosmique" en hominisant lui aussi d'autres primates. Nous leur apporterions par là la preuve d'une conscience réelle acquise et de la réussite de leur propre expérience d’hominisation de notre espèce. S’ils devaient se dévoiler, ils ne le feraient jamais avant une claire démonstration de l’homme à vouloir perpétuer la vie et l'intelligence. Cette hypothèse est apparentée à celle de la fiction La Sentinelle / 2001, l'odyssée de l'espace.

Cette hypothèse relève plus du réalisme fantastique à la mode dans les années 1960 que d'une véritable supposition scientifique : des extraterrestres existeraient, et auraient entrepris de nous aider discrètement à trouver notre propre voie ainsi qu'à nous corriger de nos éventuels dysfonctionnements. Nous sommes là à la limite des points de vue scientifique et religieux. L'idée a néanmoins été exploitée par la science-fiction via divers médias populaires (romans, films, BD,…). Hergé lui fait un clin d'œil par exemple sous les traits de Jacques Bergier dans Vol 714 pour Sydney.

Les ovnis seraient donc une manifestation de ces visites...

Et l'hypothèse extraterrestre est en effet aujourd'hui l'explication du phénomène ovni privilégiée par la majorité des ufologues, contrairement à la communauté scientifique qui privilégie à l'inverse le modèle sociopsychologique du phénomène ovni. Pour les ufologues, le paradoxe repose sur le rejet du phénomène ovni comme manifestation des extraterrestres. Le rejet peut provenir d'une discordance entre la prédiction de ce que serait la manifestation d'une civilisation extraterrestre et le comportement des ovnis qui ne manifestent pas une volonté de prise de contact. Il faudrait donc, selon ces ufologues, commencer par s'interroger sur la validité de nos attentes sur la forme que devrait prendre la manifestation d'une civilisation extraterrestre visitant la terre.

Si nous ne comprenons pas comment les voyages interstellaires sont possibles, la source d'énergie très puissante dont semble disposer les ovnis ainsi que nombre d'autres capacités affichées par ces engins, ne serait-il pas normal que cette incompréhension s'étende à la logique de leurs manifestations ? Ainsi, toujours selon les ufologues, le raisonnement qui présente la discordance entre le comportement des ovnis et ce qu'on attendrait d'une manifestation extraterrestre ne peut être un argument pour rejeter le phénomène ovni comme possible manifestation des extraterrestres. On peut néanmoins se demander si cette tout-puissance ne rapproche pas plutôt la croyance dans l'hypothèse extraterrestre d'un phénomène religieux. Le mouvement sceptique contemporain dit par exemple ironiquement à ce propos (Michael Shermer) : toute civilisation extraterrestre ayant une avance technologique infiniment supérieure à la nôtre ne peut pas être distinguée de Dieu.

… On le voit, on n'est pas loin de l'ange comme manifestation de l'ultime...




jeudi 20 mai 2010

Le Qohéleth — Et Dieu dans tout ça ?




Ecclésiaste 1:13 : J’ai appliqué mon cœur à rechercher et à sonder par la sagesse tout ce qui se fait sous les cieux : c’est là une occupation pénible, à laquelle Dieu soumet les fils de l’homme.


(c) Ponts Formation Edition

On a parlé (la dernière fois) de la sagesse comme d'un entre-deux. Approche plutôt classique, donc, correspondant assez bien à ce qui est appelé parfois « juste milieu ».

La vérité est ailleurs... en Dieu. Reste à approcher la façon dont on entend cela... (Ci-dessous, les versets du Qohéleth où apparaît le mot "Dieu" - "Elohim" : le tétragramme n'apparaît pas.)

Dieu est-il une sorte de théière céleste ?

« Si je suggérais qu'entre la Terre et Mars se trouve une théière de porcelaine en orbite elliptique autour du Soleil, personne ne serait capable de prouver le contraire pour peu que j'aie pris la précaution de préciser que la théière est trop petite pour être détectée par nos plus puissants télescopes. Mais si j'affirmais que, comme ma proposition ne peut être réfutée, il n'est pas tolérable pour la raison humaine d'en douter, on me considérerait aussitôt comme un illuminé. Cependant, si l'existence de cette théière était décrite dans d'anciens livres, enseignée comme une vérité sacrée tous les dimanches et inculquée aux enfants à l'école, alors toute hésitation à croire en son existence deviendrait un signe d'excentricité et vaudrait au sceptique les soins d'un psychiatre à une époque éclairée ou de l'Inquisition en des temps plus anciens. » (Bertrand Russell, Is There a God? — cité par Richard Dawkins, Pour en finir avec Dieu, éd, Robert Laffont, 2008, p. 60-61.)

Dieu comme super-créature ! Problème : les choses ne se posent pas en ces termes.

Sauf à donner raison à Woody Allen, disant : «Non seulement Dieu n’existe pas mais en plus il est impossible de trouver un plombier le dimanche.»

La mise en question de Dieu comme super-théière céleste ou comme plombier du dimanche est déjà le fait de l'Ecclésiaste.


On a déjà vu que pour l'Ecclésiaste, la référence à Dieu n'a pas de rapport avec un prolongement post-mortem de l'existence. Ni n'est propre à fonder une religion foisonnante ou ostentatoire, que ce soit en termes de sacrifices ou d'explications (ne pas se hâter d'exprimer une parole devant Dieu, écouter plutôt qu'offrir le sacrifice des insensés, etc. Cf. ch. 5).

Voilà qui donne une orientation sur ce qui se dévoile à la lecture du texte : « Dieu » désigne le fondement de ce qui nous advient comme ne dépendant, ultimement, pas de nous.

Une connaissance propre à fonder le bonheur, puisque c'est de cela qu'il s'agit...


Ecclésiaste 2 :

2:24 Il n’y a de bonheur pour l’homme qu’à manger et à boire, et à faire jouir son âme du bien-être, au milieu de son travail ; mais j’ai vu que cela aussi vient de la main de Dieu.

2:26 Car il donne à l’homme qui lui est agréable la sagesse, la science et la joie ; mais il donne au pécheur le soin de recueillir et d’amasser, afin de donner à celui qui est agréable à Dieu. C’est encore là une vanité et la poursuite du vent.


« Dieu » désigne alors le fait que ce qui nous advient ne trouve pas sa source ultime en nous, non seulement quant à la matérialité, « le manger et le boire », mais aussi quant à la faculté et à la disposition d'en jouir...

C'est là un « don de Dieu »... Où Dieu apparaît aussi comme Père (cf. Matthieu 5-7 et les oiseaux du ciel, les bons et les méchants : « votre Père céleste les nourrit »).


Ecclésiaste 3 :

3:10 J’ai vu à quelle occupation Dieu soumet les fils de l’homme.
3:11 Il fait toute chose bonne en son temps ; même il a mis dans leur cœur la pensée de l’éternité, bien que l’homme ne puisse pas saisir l’œuvre que Dieu fait, du commencement jusqu’à la fin.

3:13 si un homme mange et boit et jouit du bien-être au milieu de tout son travail, c’est là un don de Dieu.
3:14 J’ai reconnu que tout ce que Dieu fait durera toujours, qu’il n’y a rien à y ajouter et rien à en retrancher, et que Dieu agit ainsi afin qu’on le craigne.
3:15 Ce qui est a déjà été, et ce qui sera a déjà été, et Dieu ramène ce qui est passé.

3:17 J’ai dit en mon cœur : Dieu jugera le juste et le méchant ; car il y a là un temps pour toute chose et pour toute œuvre.
3:18 J’ai dit en mon cœur, au sujet des fils de l’homme, que Dieu les éprouverait, et qu’eux-mêmes verraient qu’ils ne sont que des bêtes.


Le fait que tout soit don de Dieu invite à « la crainte », qui est en son versant négatif, l'admission de la possibilité que ce qui est don ne soit pas, ou n'ait pas été octroyé — et en son versant positif, la reconnaissance, tout simplement, la reconnaissance de ce que matérialité comme condition du bonheur, jusqu'à la disposition pour le recevoir, ne viennent, ultimement, pas de nous.

Et là, cela compris, le bonheur est déjà là, comme reconnaissance et fruit de la reconnaissance !

Il s'agit de l'étonnement reconnaissant, jusqu'à l'émerveillement de l'événement unique de la venue de l'être sous le soleil, de la venue d'une pensée sous le soleil, fût-elle un éclair dans une nuit infinie — et sachant en outre qu'elle est aussi tissée de douleur. Le moment unique de la percée de l'être sous la soleil, moment de vanité, n'en est pas moins l'occasion de tout bonheur, source de toute reconnaissance à Dieu qui l'a fait advenir comme don.

Reconnaissance !

C'est là le culte de Dieu tel qu'il est requis !


Ecclésiaste 5 :

5:1 (4–17) Prends garde à ton pied, lorsque tu entres dans la maison de Dieu ; approche-toi pour écouter, plutôt que pour offrir le sacrifice des insensés, car ils ne savent pas qu’ils font mal.
5:2 (5–1) Ne te presse pas d’ouvrir la bouche, et que ton cœur ne se hâte pas d’exprimer une parole devant Dieu ; car Dieu est au ciel, et toi sur la terre : que tes paroles soient donc peu nombreuses.

5:4 (5–3) Lorsque tu as fait un vœu à Dieu, ne tarde pas à l’accomplir, car il n’aime pas les insensés : accomplis le vœu que tu as fait.

5:6 (5–5) Ne permets pas à ta bouche de faire pécher ta chair, et ne dis pas en présence de l’envoyé que c’est une inadvertance. Pourquoi Dieu s’irriterait-il de tes paroles, et détruirait-il l’ouvrage de tes mains ?
5:7 (5–6) Car, s’il y a des vanités dans la multitude des songes, il y en a aussi dans beaucoup de paroles ; c’est pourquoi, crains Dieu.

5:18 (5–17) Voici ce que j’ai vu : c’est pour l’homme une chose bonne et belle de manger et de boire, et de jouir du bien-être au milieu de tout le travail qu’il fait sous le soleil, pendant le nombre des jours de vie que Dieu lui a donnés ; car c’est là sa part.
5:19 (5–18) Mais, si Dieu a donné à un homme des richesses et des biens, s’il l’a rendu maître d’en manger, d’en prendre sa part, et de se réjouir au milieu de son travail, c’est là un don de Dieu.
5:20 (5–19) Car il ne se souviendra pas beaucoup des jours de sa vie, parce que Dieu répand la joie dans son cœur.


Voilà qui rejoint, et précède Nietzsche :

«… Si notre âme a, comme une corde, une seule fois tressailli et résonné de bonheur […,] l'éternité tout entière était, dans cet instant unique de notre acquiescement, saluée, rachetée, justifiée et affirmée.» (Nietzsche, La Volonté de puissance, § 1032.)


Avec chez l'Ecclésiaste, cette conscience permanente de la condition qui permet en tout temps la perception de ce rachat : la conscience du don de Dieu


Ecclésiaste 6:2 : Il y a tel homme à qui Dieu a donné des richesses, des biens, et de la gloire, et qui ne manque pour son âme de rien de ce qu’il désire, mais que Dieu ne laisse pas maître d’en jouir, car c’est un étranger qui en jouira. C’est là une vanité et un mal grave.

« Correctif » de cette vanité, qui reste vanité quoiqu'il en soit : la conscience du don de Dieu, à savoir « la crainte de Dieu ».


Ecclésiaste 7 :

7:13 Regarde l’œuvre de Dieu : qui pourra redresser ce qu’il a courbé ?
7:14 Au jour du bonheur, sois heureux, et au jour du malheur, réfléchis : Dieu a fait l’un comme l’autre, afin que l’homme ne découvre en rien ce qui sera après lui.

7:18 Il est bon que tu retiennes ceci, et que tu ne négliges point cela ; car celui qui craint Dieu échappe à toutes ces choses.
7:26 Et j’ai trouvé plus amère que la mort la femme dont le cœur est un piège et un filet, et dont les mains sont des liens ; celui qui est agréable à Dieu lui échappe, mais le pécheur est pris par elle.


Cf. Cioran : «On rencontre la Subtilité :
chez les théologiens […] ;
chez les oisifs […] ;
chez les persécutés […] ;
chez les femmes. Condamnées à la pudeur, elles doivent camoufler leurs désirs, et mentir : le mensonge est une forme de talent, alors que le respect de la "vérité" va de pair avec la grossièreté et la lourdeur.[…]» (Syllogismes de l'amertume, p.760, in Œuvres, coll. Quarto, éd. Gallimard, 1995)

Ecclésiaste 7:29 : « voici ce que j’ai trouvé, c’est que Dieu a fait les hommes droits ; mais ils ont cherché beaucoup de détours. »


Ecclésiaste 8 & 9 :

8:2 Je te dis : Observe les ordres du roi, et cela à cause du serment fait à Dieu.

8:12 Cependant, quoique le pécheur fasse cent fois le mal et qu’il y persévère longtemps, je sais aussi que le bonheur est pour ceux qui craignent Dieu, parce qu’ils ont de la crainte devant lui.
8:13 Mais le bonheur n’est pas pour le méchant, et il ne prolongera point ses jours, pas plus que l’ombre, parce qu’il n’a pas de la crainte devant Dieu.

8:15 J’ai donc loué la joie, parce qu’il n’y a de bonheur pour l’homme sous le soleil qu’à manger et à boire et à se réjouir ; c’est là ce qui doit l’accompagner au milieu de son travail, pendant les jours de vie que Dieu lui donne sous le soleil.

8:17 j’ai vu toute l’œuvre de Dieu, j’ai vu que l’homme ne peut pas trouver ce qui se fait sous le soleil ; il a beau se fatiguer à chercher, il ne trouve pas ; et même si le sage veut connaître, il ne peut pas trouver.


9:1 Oui, j’ai appliqué mon cœur à tout cela, j’ai fait de tout cela l’objet de mon examen, et j’ai vu que les justes et les sages, et leurs travaux, sont dans la main de Dieu, et l’amour aussi bien que la haine ; les hommes ne savent rien : tout est devant eux.

9:7 Va, mange avec joie ton pain, et bois gaiement ton vin ; car dès longtemps Dieu prend plaisir à ce que tu fais.

9:9 Jouis de la vie avec la femme que tu aimes, pendant tous les jours de ta vie de vanité, que Dieu t’a donnés sous le soleil, pendant tous les jours de ta vanité ; car c’est ta part dans la vie, au milieu de ton travail que tu fais sous le soleil.



Ecclésiaste 11 :

11:5 Comme tu ne sais pas quel est le chemin du vent, ni comment se forment les os dans le ventre de la femme enceinte, tu ne connais pas non plus l’œuvre de Dieu qui fait tout.

11:9 (12–1) Jeune homme, réjouis-toi dans ta jeunesse, livre ton cœur à la joie pendant les jours de ta jeunesse, marche dans les voies de ton cœur et selon les regards de tes yeux ; et sache que pour tout cela Dieu t’appellera en jugement.


« Sache que pour tout cela Dieu t’appellera en jugement » : pas de « mais » (« mais sache » ?!) en hébreu ! Le jugement n'est pas tant le prix de la joie que la mesure de la joie que l'on a reçue ! C'est aujourd'hui qu'il s'agit de cueillir la joie avant que ne tombe le jour où la matérialité, les conditions ou les dispositions ne sont plus là pour l'accueillir !... « Au jour où tremblent les gardiens de la maison, où se courbent les hommes vigoureux, où s'arrêtent celles qui meulent, trop peu nombreuses, où perdent leur éclat celles qui regardent par la fenêtre »... (ch, 12, v. 3 sq.)...

"C'est une sale histoire de vieillir et je vous conseille de l'éviter si vous pouvez ! Vieillir ne présente aucun avantage. On ne devient pas plus sage, mais on a mal au dos, on ne voit plus très bien, on a besoin d’un appareil auditif pour entendre. Je vous déconseille de vieillir." (Woody Allen, Cannes, mai 2010.)


Ecclésiaste 12 :

12:7 (12–9) avant que la poussière retourne à la terre, comme elle y était, et que l’esprit retourne à Dieu qui l’a donné.

12:13 (12–15) Écoutons la fin du discours: Crains Dieu et observe ses commandements. C’est là ce que doit faire tout homme.
12:14 (12–16) Car Dieu amènera toute œuvre en jugement, au sujet de tout ce qui est caché, soit bien, soit mal.






samedi 8 mai 2010

Questions de solidarité



Confrontés à la misère que nos villes ne parviennent plus à cacher, on comprend vite, pour peu qu’on la prenne au sérieux — pour ne pas parler de ses victimes les plus touchées — que ce n’est pas juste de quelques euros, ni de nourriture, vêtements, abri, ou visite qu’il est question.

Le développement d’un des propos fondateurs des organismes chrétiens de solidarité, le fameux propos de Jésus en Matthieu 25, 35-36, le laisse bien apparaître : « j’ai eu faim et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger et vous m’avez recueilli ; nu, et vous m’avez vêtu ; malade, et vous m’avez visité ; en prison, et vous êtes venus à moi. »

On passe d’un besoin élémentaire : un sandwich (« j’ai eu faim »), à des zones plus inquiétantes encore — la maladie ou la prison : « vous êtes venus à moi » — visite dont le moment de la séparation laissera un goût inévitable de reviens-y ! Bref, on ne pourra pas en rester à des gestes de solidarité sans lendemain, on n’en sortira pas indemne.

On sait bien qu’à ce point perce cette réflexion : « même si certes, je dois en prendre ma part, je ne peux toutefois pas porter toute la misère du monde ». Et alors ces paroles de Jésus semblent devenir tout sauf libératrices.

Mes euros, mon sandwich et mes heures de visites n’ont rien résolu au fond — et quand on sait que ce qui est en jeu dans le « c’est à moi que vous l’avez fait » est l’établissement de chacun en sa dignité infinie… Quand on sait que c’est de cette dignité-là qu’il est question, non seulement mon sandwich et mes heures de visite n’ont évidemment rien résolu (ce qui ne les rend pas facultatifs) mais ils ont, plutôt, creusé une vaste question !

Car le terme des choses, pour autrui et pour moi, n’est pas dans mes soins et ma sollicitude, sous peine d’en faire un fardeau — cf. la deuxième partie du texte de Matthieu : « ce que vous n’avez pas fait, c’est à moi que vous ne l’avez pas fait » ! Ces paroles portent aussi (avec ce qu’elles exigent) la marque de l’impossibilité de leur réel accomplissement. C’est ici qu’il faut d’abord parvenir, sous peine de s’échouer à la bonne conscience de qui penserait avoir assez fait ; ou au contraire de ployer sous le fardeau.

Si on a constaté ces impasses, le propos de Jésus a accompli un de ses offices : nous conduire au sens de la gratuité (en termes théologiques, la grâce).

Mais quand on en est là, on n’a pas résolu la question sociale sur laquelle débouche aussi ce dont il est question dans ce texte. Car avec son exigence de dignité, ce texte a creusé un abîme, et posé l’espérance d’un autre monde ! Il a alors posé des exigences qui requerront une Cité nouvelle et déjà, en signe pour les premiers disciples recueillant ces paroles de Jésus, dans les espaces de l’Empire romain. Une espérance qui est une des racines lointaines de notre bien imparfaite société.

Parce que l’exigence de dignité rend évidemment insuffisants dons et visites, vont naître ce que seront nos hôpitaux, notre sécurité sociale, mais aussi nos écoles laïques, gratuites et obligatoires, etc.

On sait que de l’organisation de la mise en œuvre de l’attention au prochain sont nées des institutions, jusqu’à l’école pour tous et la sécurité sociale, qui aujourd’hui semblent commencer parfois à ne plus fournir, bien que désormais inscrites dans les Déclarations des Droits de l’homme…

Quand ces acquis sociaux commencent à ne plus fournir, quand l’État est tenté de se désengager de ce que les Droits de l’homme ont mis sous sa responsabilité, c’est que les choses sont allées trop loin dans le délitement.

Et « trop loin », c’est par exemple les « Restaurants du Cœur » ! « Trop loin » c’est toutes les structures locales de solidarité face aux « nouveaux pauvres » ! Autant d’associations issues, on le sait, de l’émergence des « nouveaux pauvres ». Face auxquels les structures d’État ne fournissaient déjà plus ! Les choses sont déjà allées à un point sans doute inimaginable quelques décennies en arrière, on l’oublie trop.

Signe — que les « Restaurants du Cœur » et autres ONG de plus en plus sollicitées —, signe d’un manque croissant de la société, d’un déficit social, d’un déficit d’État ! C’est-à-dire : mauvais signe !

Pour revenir à Matthieu 25, qu’est ce que la dignité cachée en Christ sous le visage de chacun, et des plus pauvres, au jour où la défaillance de nos sociétés à promouvoir les conditions de cette dignité est voilée par les organismes associatifs de solidarité — qui portent en eux rien moins que le constat d’une défaillance générale, bien plus considérable.

Le texte de Matthieu nous dit alors qu’il ne saurait être question de nous installer dans nos organisations de la solidarité face à la pauvreté ! Si, certes, « vous aurez toujours les pauvres avec vous », ce dont il s’agit, c’est quand même d’une dignité perdue. C’est cela qu’il s’agit de ne pas perdre de vue, pour ne pas en venir à trouver normale la catastrophe sanitaire vers laquelle on glisse insensiblement.

Voilà qui revient à pointer un problème qui est celui de la Cité / polis — question politique, donc, d’organisation sociale, de répartition des biens — cela dit au risque d’avoir l’air d’enfoncer des portes ouvertes. Mais quand les associations ne fournissent plus à tenter de pallier un déficit social qui ne fait que croître, et dont elles ne sont pas censées avoir la charge !, elles sont devenues, par le fait même un signal d’alerte, un feu clignotant ; un signe prophétique pointant un manque. Serions-nous alors à une sorte de croisée des chemins ?