lundi 16 novembre 2015

Archétypes et mythologies




Introduction – L'actualité nous situe à nouveau au cœur de la mythologie en sa perspective archétypale, ici en regard de la question de l'élément moteur du sacrifice – qui nous permet de percevoir la dimension proprement blasphématoire de la violence – de facto sacrificielle ! – exercée notamment au nom du Dieu d'Abraham / cf. Gn 22 ! Quelques éléments préalables pour poser la réflexion :


1. Illusion

Māyā est un terme sanskrit qui a plusieurs sens dans les religions indiennes. Māyā est le pouvoir de Dieu de créer, perpétuant l'illusion de la dualité dans l'univers [visible] ; elle est aussi la nature illusoire du monde. Pour les mystiques indiens, cette manifestation est réelle, mais c'est une réalité insaisissable. Ce serait une erreur, mais une erreur naturelle, de la considérer comme une vérité ou une réalité fondamentale. Chaque personne, chaque objet physique, du point de vue de l'éternité, n'est qu'une goutte d'eau d'un océan sans limites. Le but de l'éveil spirituel est de le comprendre, plus précisément de faire l'expérience de la fausse dichotomie, du mirage de la maya afin de la transcender, de passer son voile et de réaliser que l'Âtman c'est-à-dire le soi et l'univers, le Brahman ne font qu'un. (Extrait de Wiki)


2. Désir

Psyché est la fille d'un roi. Elle est d'une beauté si parfaite qu'elle excite la jalousie de Vénus, à laquelle on la compare. Elle a deux sœurs aînées, d'une grande beauté également, mais sur lesquelles Psyché l'emporte de loin ; toutefois, contrairement à ses sœurs, elle ne trouve pas d'époux, car les foules se contentent de venir la contempler comme une œuvre d'art et la vénérer comme une déesse. Vénus, jalouse de cette rivale et offensée par un tel sacrilège, ordonne à Cupidon de la rendre amoureuse du mortel le plus méprisable qui soit. Cependant, alors que le dieu s'apprête à remplir sa mission, il tombe lui-même amoureux de Psyché en se blessant avec l'une de ses propres flèches. [...]

Plus tard dans la nuit, son mystérieux époux (Cupidon) la rejoint, lui demandant de ne jamais chercher à connaître son identité, cachée par l'obscurité de la chambre. Toutes les nuits, il lui rend visite puis la quitte avant l'aurore. La jeune femme apprécie de plus en plus les étreintes et les mots doux qu'ils échangent alors. Rien ne manque au bonheur de Psyché, si ce n'est de connaître le visage et le nom de son amant nocturne, et de revoir sa famille. Ses deux sœurs, amenées au palais par Zéphyr, sont folles de jalousie face à tant de richesse et de bonheur. Elles cherchent à persuader Psyché que son époux n'est rien d'autre qu'un horrible monstre qui finira par la dévorer. Terrifiée à cette idée, elle profite du sommeil de son amant pour allumer une lampe à huile afin de percer le mystère. Elle découvre alors le jeune homme le plus radieux qu'elle ait jamais vu. Mais une goutte d'huile brûlante tombe sur l'épaule du dieu endormi, qui se réveille aussitôt et s'enfuit, furieux d'avoir été trahi.

[… Plus tard aura lieu] le mariage de Cupidon et Psyché. [...] Psyché donne à Cupidon une fille, nommée Volupté (Plaisir). L'amour (Cupidon) et l'âme (Psyché) sont ainsi réunis pour l'éternité. (Extrait de Wiki)


3. Mimétisme

On connaît la lecture que René Girard (cf. Le bouc émissaire, Des choses cachées depuis la fondation du monde, etc.) a faite du phénomène universel du sacrifice, et la particularité de sa reprise dans la tradition biblique : Le désir est mimétique, né d’une imitation les uns des autres dans la convoitise de ce qui est jugé désirable – ce qui en fait la source des conflits : tous désirent la même chose et cela finit invariablement en conflit. (Parlant de sacrifice, on abordera aussi la question du potlatch nord-américain. Et celle de la transposition du sacrifice – cf. Genèse 22 et le « sacrifice » d'Abraham.)

Entre temps, l’objet de la querelle initiale a été oublié, tandis que les rivalités se sont propagées. Le conflit s’est généralisé en « guerre de tous contre tous » — que Girard appelle « crise mimétique ». Comment cette crise peut-elle se résoudre, comment la paix peut-elle revenir ? Ici, les hommes ont trouvé « l'idée » d'un « bouc émissaire » (le terme fait référence à l'animal expulsé au désert chargé symboliquement des péchés du peuple selon la Bible — Lévitique 16).

C’est ainsi, précisément, qu'au au moment paroxystique de la crise de tous contre tous se produit éventuellement un « mécanisme salvateur » : le conflit généralisé se transforme en un tous contre un (ou une minorité), qui n'a d'ailleurs même pas de rapport avec le problème de départ ! Si le report sur un « bouc émissaire » ne se déclenche pas, c'est la destruction du groupe. Pourquoi « mécanisme » ? C'est que sa mise en marche ne dépend de personne mais découle du phénomène lui-même.

Plus les rivalités pour le même objet s'exaspèrent, plus les rivaux tendent à oublier ce qui en fut l'origine, plus ils sont fascinés les uns par les autres. À ce stade de fascination haineuse la sélection d’antagonistes va se faire de plus en plus instable, changeante, et il se pourra alors qu'un individu (ou une minorité) polarise alors l'appétit de violence. Que cette polarisation s'amorce, et par un effet boule de neige elle s'emballe : la communauté tout entière (unanime !) se trouve alors rassemblée contre un individu unique (ou une minorité).

Ainsi la violence à son paroxysme aura alors tendance à se focaliser sur une victime et l’unanimité à se faire contre elle. L’élimination de la victime éteint le désir de violence qui pouvait animer chacun juste avant que celle-ci ne meure. Le groupe — « nous » (cf. Esaïe 53 v. 2-6) — retrouve alors son calme via « le châtiment qui nous donne la paix » (Es 53, v. 5). Cela « nous » concerne (cf. le nombre de « nous » dans les versets 2 à 6). La victime apparaît alors comme fondement de la crise et comme auteur de la paix retrouvée — par une sorte de « plus jamais ça ».

La caractéristique de la lecture du phénomène dans la Bible est de révéler que la victime est innocente, ce qu’ignorent tous les mythes de l’humanité. C’est une différence essentielle entre Caïn et Abel et Romulus et Remus : Abel n’est pas mis en cause. On est au cœur du texte d’Ésaïe 53 : le persécuté est innocent. Où la foi des disciples du Crucifié retrouve la figure du Christ, qui n’a sans doute pas manqué de méditer lui-même la profonde leçon d’Ésaïe 53 : la violence est vaincue quand la victime ne joue pas le jeu.


RP
Traditions religieuses et spiritualités

Église protestante unie de France / Poitiers
Catéchisme pour adultes 2014-2015
Chaque 3e mardi du mois à 14 h 30
& chaque jeudi qui suit le 3e mardi à 20 h 30
2) 17 & 19 novembre – Archétypes et mythologies d'orient (Asie, Inde) et d'occident (Méditerranée), du sud (Afrique sud-saharienne et Égypte) et du nord (Europe et Amérique). Etc. (PDF)


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