dimanche 24 décembre 2017

Les trois pains et l’origine de la crèche de Bethléem




Vous savez tous que Jésus est né dans une crèche. Vous savez ce qu’est une crèche : c’est une mangeoire pour les animaux : bœufs, ânes, moutons… Une mangeoire dans une étable, avec de la paille : c’est le premier berceau de Jésus. Jésus a trouvé ce berceau-là parce qu’il n’y avait pas de meilleure place pour lui. Pas de maternité, pas de place à l’hôtel, rien… Mais que d’honneur pour les gens de la ferme qui ont ouvert cette étable !

Mais, connaissez-vous l’origine de cette ferme avec son étable et sa crèche ?…

*

Sous le règne du sage roi Salomon, vivait dans une petite maison au bord de la mer, une pauvre veuve. Son mari était mort depuis longtemps, ses enfants s’étaient dispersés dans le monde, elle vivait seule. Du matin au soir, pour vivre, elle réparait les filets des pêcheurs. Elle ne gagnait pas beaucoup, juste assez pour n’avoir pas faim et mettre de côté un peu de farine pour l’hiver, lorsque la pluie et le vent empêchaient les pêcheurs de prendre la mer.

Une année, l’hiver fut plus long que d’habitude. D’immenses vagues agitaient la mer et les pêcheurs ne pouvaient s’embarquer. Aucun n’ayant donc besoin de faire recoudre ses filets, la réserve de farine de la pauvre femme diminuait de jour en jour. Lorsqu’il ne lui resta même plus assez pour se faire une galette, elle alla chez l’homme le plus riche du village.

– Que veux-tu ? demanda-t-il.
– J’ai faim, répondit la femme. Donne-moi s’il te plaît un peu de farine, pour que je survive à ce rude hiver.
– J’aimerais t’aider, fit le riche, mais je viens de vendre tous mes sacs. J’ai gardé juste ce dont j’ai besoin pour moi et pour ma famille. Mais si la farine qui reste sur le plancher du grenier peut te contenter, prends-la sans te gêner…

La femme le remercia, balaya soigneusement le grenier et, tout heureuse, rapporta chez elle un petit sac de farine. Elle alluma tout de suite le feu dans le four, elle pétrit la pâte, qu’elle mit au four, et en ressortit bientôt trois belles miches de pain bien dorées. Le jour s’achevait et, comme la femme n’avait pas mangé depuis le matin, elle avait grand faim.

Elle prit un pain, et allait le bénir et s’en couper une bonne tranche, lorsqu’un inconnu frappa à sa porte. Il était habillé de vieux vêtements troués et parlait avec peine, semblant épuisé.
– Brave femme, dit-il, donne-moi quelque chose à manger. Je suis un marchand, mais des brigands m’ont attaqué sur la route et m’ont pris toute ma fortune ; ce n’est que de justesse que j’ai pu sauver ma vie. Je n’ai pas mangé depuis longtemps, je suis à bout de forces.
À peine l’étranger eut-il fini de parler que la femme lui offrit son premier pain :
– Prends cette miche, lui dit-elle, et que Dieu soit avec toi.
L’homme la remercia et sortit. « Il avait plus besoin de pain que moi », pensa la femme. « D’ailleurs, il m’en reste encore deux. »

Elle alla chercher la seconde miche, mais à ce moment, quelqu’un frappa à la porte de nouveau. En ouvrant, la femme aperçut sur le seuil un autre voyageur encore plus pitoyable.
– Brave femme, dit l’étranger avec difficulté, ma maison vient de brûler entièrement. En une nuit, je suis devenu pauvre. J’ai échappé aux flammes, mais je meurs de faim. Comme tu le vois, je peux à peine marcher. Je t’en prie, ne me laisse pas partir sans nourriture.
Cette fois encore, la femme n’hésita pas. Elle donna à l’étranger le second pain, en lui souhaitant bonne chance, et retourna à la table pour se mettre elle-même à manger. « Ce pauvre aussi était plus affamé que moi », pensa-t-elle. « Heureusement que j’ai cuit trois miches. »

Sans plus attendre, elle prit le dernier pain, mais n’eut pas le temps de le bénir, qu’un vent violent se levait derrière les fenêtres. Il fit le tour de la maison, renversa brusquement la porte et, avant que la femme ait pu réagir, lui arracha le pain des mains, et l’emporta vers le large dans un tourbillon.

La malheureuse fondit en larmes : – Pourquoi, vilain vent, es-tu si cruel ? fit-elle pleine d’amertume. J’ai donné deux pains aux pauvres, et quand je veux manger moi-même, tu me prends le dernier morceau. Que veux-tu que la mer fasse de mon pain ?

La femme ne ferma pas l’œil de la nuit. Elle essayait de se rappeler si elle n’avait pas fait de tort à quelqu’un, mais sa conscience ne lui reprochait rien et, quoiqu’elle réfléchît, elle ne trouvait pas la raison de ce châtiment. Lorsqu’à l’aube le soleil se leva, elle décida d’aller porter plainte contre le vent auprès du roi Salomon. « Salomon est l’homme le plus sage au monde, se dit-elle, nul autre ne peut juger cette querelle avec le vent. »

Salomon écouta la femme attentivement, réfléchit, puis, se laissant la journée pour prononcer son jugement, lui dit :
– Si tu veux demander justice au vent, il te faut patienter jusqu’au soir, où je l’appellerai. Il doit être présent au tribunal et je ne peux le déranger en ce moment, quand il enfle les voiles des navires marchands. Reste ici en attendant son retour, je vous jugerai ensuite.

Trois commerçants virent alors s’agenouiller devant le trône royal:
– Roi d’Israël, dirent-ils, permets-nous de te demander un geste de miséricorde. Accepte de nous sept mille pièces d’or et donne-les à un pauvre.
– Qu’est-ce qui vous amène à une telle action ? demanda Salomon.
– L’amour de Dieu pour nous et notre reconnaissance pour Ses bienfaits, répondit le marchand le plus âgé. Un instant, mon roi. Je vais t’expliquer.

Il se tourna vers un coffre plein d’or et dit :
– Les sept mille pièces d’or que voici représentent exactement le dixième de la valeur de notre cargaison. Alors que nous approchions de la côte de ton royaume, une tempête se déchaîna. Les vagues jetaient notre bateau de tout côté comme un petit morceau de bois, et nous perdîmes notre cap. Puis une fissure se fit sur le flanc du navire. Bien qu’elle ne fût pas grande, celui-ci prenait l’eau de plus en plus, et c’est sans résultat que nous cherchâmes, au milieu de ce cataclysme, quelque chose pour boucher le trou. Dans notre désespoir, nous priâmes Dieu en faisant le serment de donner aux pauvres un dixième de la valeur de notre chargement, si nous sortions vivants du danger. Et bientôt l’orage s’apaisa. Les vagues se calmèrent et nous abordâmes en toute sécurité. Lorsque nous fîmes le calcul du dixième de la valeur de notre cargaison, nous trouvâmes exactement sept mille pièces d’or. Voilà cette somme : partage-la entre les pauvres, comme tu le jugeras bon.

– Je ferai volontiers ce que vous demandez, répondit Salomon ; mais une chose n’est pas claire. Vous avez dit qu’une fissure était apparue sur le flanc de votre bateau. Or un navire qui fait eau coule à pic, même sur la mer la plus calme, alors que vous, vous n’avez pas sombré. Quelle explication donnez-vous à cela ?

À ces mots, le marchand fouilla dans son manteau et en ressortit un pain déformé, tout gonflé d’eau.
– Cet objet fut soudain apporté par un tourbillon de vent qui, d’un coup violent, le colla sur le flanc du bateau, bouchant la fissure : c’est cela qui nous a sauvés, expliqua-t-il.
Salomon sourit :
– Il me semble que ce pain qui vous a tant aidés vient de retrouver son propriétaire, fit-il. Et, se tournant vers la femme, il ajouta :
– Reconnais-tu cette miche de pain ?
Étonnée, elle répondit :
– Mais oui, c’est justement la miche que le vent m’a arrachée.
– Dans ce cas, les sept mille pièces d’or t’appartiennent, reprit Salomon. Dieu n’a pas oublié sa servante et il a ordonné au vent de ne plus te laisser dans la misère. Tu voulais accuser le vent, parce qu’il t’avait fait du tort, mais ce qui te semblait être un malheur est à présent une joie. Désormais, tu ne manqueras plus de rien.
La nouvelle de cette histoire se répandit dans tout le royaume, et chacun loua la justice de Dieu et la sagesse de Salomon, roi d’Israël. (D’après Contes juifs, éditions Gründ)

*

Mais… savez-vous ce que fit cette femme de ses sept mille pièces d’or ? Elle ne resta pas dans sa cabane au bord de la mer. Enrichie du fait de la sagesse de Salomon, elle se souvint que le père de Salomon, le roi David, de qui viendrait le Messie, venait du village de Bethléem, ce qui veut dire « la maison du pain ». Elle décida donc d’y acheter une ferme, où elle puisse élever des animaux, cultiver du blé pour faire du pain, en faire une auberge où accueillir tous ceux qui en manqueraient… Cette ferme subsista avec son étable, jusqu’au jour où Joseph et Marie y trouvèrent abri, au chaud, de sorte que c’est là que naquit Jésus, arrière arrière arrière… petit fils de Salomon.


RP, Veillée de Noël, Poitiers 24/12/17


lundi 18 décembre 2017

Esclavage et promesse de liberté




L'Exode d’Israël s'ancre et débouche sur une conception inédite des relations avec le divin : le divin est irreprésentable (cf. Ex 3), sans garant humain de sa présence (il la garantit lui-même ! « Je serai ») comme l'est alors le monarque  ; le monarque n’est donc pas non plus source de la loi, ni les dieux représentés.

Voilà donc dès lors une loi, exprimée dans la Torah, qui n'a pas d'auteur qui en serait le garant connu, qui serait donc potentiellement ou actuellement supérieur à la loi. Moïse n'est pas donné comme un nouveau Pharaon ou un nouvel Hammourabi. La loi dont il témoigne ne procède pas de lui ni de dieux représentables : il est lui-même soumis à la loi ! Cela restera vrai même après l'institution de la monarchie, avec la dynastie davidique qui se caractérise par l'exigence de soumission du roi à la loi.

C'est à cette tradition que, bien plus tard, se référeront les révolutionnaires puritains anglais posant la supériorité de la loi par rapport à tous : personnes privées, rois, et même Églises ; la loi reçue dans une convention (Covenant) de tous, en analogie avec la loi biblique. C'est, mutatis mutandis, ce modèle que reprendront les révolutions américaine et française. Pour la révolution américaine, voir aussi l’anticipation décrite par Jean Baubérot (« Les protestants ont-ils inventé la laïcité ? », L’Obs, oct. 2017) dès les années 1630 au Rhode Island fondé par le pasteur baptiste Roger Williams.

En commun, un « plus jamais ça » – plus jamais l’esclavage dont libère « celui qui est et sera » –, que l'on retrouve en arrière-plan dans la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 (« Être suprême »), ou plus tard dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948. Plus jamais l'esclavage, plus jamais l’arbitraire absolutiste, plus jamais les idéologies comme le racisme… Les rédacteurs des textes modernes sont conscients de cet enracinement (des droits « tenus pour acquis » – Déclaration d’Indépendance américaine, 1776) : la liberté est donnée après la captivité ou l'oppression quelle qu'elle soit. Elle met fin à une situation devenue insupportable, l’esclavage, l'oppression, l'arbitraire. La loi qui accompagne l’acquisition de la liberté a pour fonction d’éviter au peuple de retomber dans l’esclavage ou toute autre situation catastrophique. La liberté est garantie par le fait que la loi est donnée comme n’ayant pas d’auteur qui puisse en réclamer la paternité, pas de pouvoir qui en serait la source, comme celui qui s’est avéré esclavagiste.

Le peuple français de l'Ancien Régime connaissait une situation d’oppression et d’arbitraire sous une royauté absolue. En 1789, la situation devient insupportable. Un sursaut y met fin. Pour garantir la liberté reçue, une loi est proclamée, un fondement, la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Proclamée « sous les auspices de l’Être suprême », elle est présentée sur l’image de tables semblables à celles qui représentent le Décalogue. Ce n’est pas par hasard : don de liberté, suivi d’une loi pour que l’acquis ne se perde pas. Là encore « sous les auspices de l’Être suprême », contre tout arbitraire comme celui auquel on vient d’échapper, celui d’une monarchie absolue.

Au XXe siècle, l’Europe, et, à travers elle, le monde, ont failli s’autodétruire. On a tenté d’exterminer des populations – principalement les juifs, et d'autres. Le chaos semble avoir atteint un point de non-retour. Mais comme dans un sursaut, le monde reçoit à nouveau la liberté. Une loi est proclamée, une nouvelle Déclaration de droits humains, universelle – c’est à dire valable pour tous les êtres humains. Même modèle que dans les deux cas précédents : chaos – libération – loi. Avec des éléments nouveaux soulignés face à de nouvelles menaces.


RP
Les choses de la fin

Église protestante unie de France / Poitiers
Catéchisme pour adultes 2017-2018
Chaque 3e mardi du mois à 14 h 30
& chaque jeudi qui suit le 3e mardi à 20 h 30
3) 19 & 21 décembre — Esclavage et promesse de liberté (PDF ici)


dimanche 10 décembre 2017

Sortir d’Égypte




Alors que la Genèse se termine avec un récit d’exil à l’autre terme du récit de la création, le livre de l’Exode se présente comme récit de libération de cet exil, récit d’un exode dont le maître d’œuvre est Dieu, appelant pour cela Moïse – au ch. 3. Fin du monde de la captivité, de l’exiguïté (Mitsraïm). Promesse de liberté… Apparaît un Dieu qui rejoint le peuple, qui est avec le peuple au cœur de sa détresse, qui promet qu’il sera avec lui au cœur de l’épreuve – pour le conduire à la vie nouvelle, cachée en Lui. Cette présence inconditionnelle est révélée avec son Nom…

Ainsi dans le commentaire de Rachi :
« La montagne de ha-Eloqim. Le texte [Exode 3, 1] anticipe sur l’avenir (Deutéronome 22).
Dans une flamme (belavath) de feu. Dans le cœur (lév) du feu, comme dans : « au cœur du ciel » (Deutéronome 4, 11) ; « au cœur du chêne » (2 Samuel 18, 14).
Du milieu du buisson. Et non d’un autre arbre plus imposant, comme le suggère (Psaume 91, 15) : « Je suis avec lui dans la détresse [c’est-à-dire dans l’humiliation] » (Midrach tan‘houma 14).
Car j’ai su ses douleurs. Comme dans : « Eloqim sut » (supra 2, 25). C’est-à-dire : Car j’ai appliqué mon cœur à comprendre et à connaître ses souffrances. Je ne me suis pas caché les yeux, je ne me suis pas bouché les oreilles pour ne pas entendre leur cri.
Et maintenant, va, et je t’enverrai vers Pharaon. Et si tu m’objectes : « A quoi cela servira-t-il ? »… Et fais sortir mon peuple – Les paroles que tu prononceras produiront leur effet, et tu les feras sortir de là.
Qui suis-je. Quelle importance possédé-je, pour parler aux rois ?
Et que que je fasse sortir les fils d’Israël. Et même si je possédais de l’importance, en quoi Israël a-t-il mérité que Tu accomplisses pour lui un miracle et que je les fasse sortir de l’Égypte ?
Il dit : Parce que je serai avec toi. Il commence par répondre à la première question, puis à la seconde : « Pour ce que tu as dit : “ Qui suis-je, pour que j’aille chez Pharaon ?”, ce n’est pas de toi qu’il s’agit, mais de moi : “Parce que je serai avec toi”, et “ceci”, à savoir l’apparition à laquelle tu as assisté au buisson, “te sera le signe que c’est moi qui t’ai envoyé” que tu mèneras à bien la mission que je te confie. De même que tu as vu le buisson exécuter sans se consumer la mission que je lui ai confiée, de même rempliras-tu ma mission sans dommage pour toi. Quant à ta seconde question : “En quoi Israël a-t-il mérité de pouvoir sortir d’Égypte ?”, cette sortie a pour moi une grande importance, car ils recevront la Tora sur cette montagne trois mois après leur sortie d’Égypte ». Autre explication de : « parce que je serai avec toi, et ceci…” : « Ce fait même » que tu réussiras ta mission “sera pour toi le signe” annonciateur [de l’accomplissement] d’une autre promesse. Car je te promets que, lorsque tu les auras fait sortir d’Égypte, “vous adorerez Eloqim sur cette montagne-ci” et y recevrez la Tora. Voilà le mérite que possède Israël. » Nous trouvons un autre exemple du même style dans : « Et ceci “sera pour toi le signe” que vous mangerez cette année le regain… » (Ésaïe 37, 30), à savoir que la chute de Sénnachérib sera pour toi le signe [de l’accomplissement] d’une autre promesse : votre terre, actuellement stérile et improductive, j’en bénirai le regain.
Je serai qui serai. Moi qui suis avec eux dans la détresse présente, je serai avec eux dans leur asservissement par d’autres empires. Mochè a dit à Hachem : « Maître de l’univers ! Pourquoi faut-il que je leur parle d’une autre souffrance ? Ils ont bien assez de celle-ci ! » Hachem a répondu : « Tu as raison ! “Ainsi parleras-tu aux enfants d’Israël… « Je serai » [sans : « qui serai », allusion à leurs souffrances futures] m’a envoyé auprès de vous ” » (Berakhoth 9b).
Cela est mon Nom pour toujours (le‘olam). Le mot le‘olam [= pour toujours] est écrit sans la lettre waw, pour qu’on puisse le lire : le‘além [« tel est mon Nom destiné à être “caché” »], à ne pas prononcer comme il est écrit (Pessa‘him 50a ; Chemoth raba). »

*

Cf. Maimonide, Guide des Égarés I, 63 : « […] "Et s’ils me disent: Quel est son nom, que leur dirai-je ?" (Exode 3, 13). Jusqu'où cette question, anticipée par Moïse, était-elle appropriée, et jusqu'où était-il justifié de chercher à se préparer à la réponse ? Moïse avait raison de dire : "Mais voici, ils ne me croiront pas, car ils diront: Le Seigneur ne t'est pas apparu" (ibid., 1) ; car n'importe quel homme réclamant l'autorité d'un prophète doit s'attendre à rencontrer une telle objection tant qu'il n'a pas donné une preuve de sa mission. Encore une fois, si la question, à première vue, se rapportait seulement au nom, comme une simple expression des lèvres, le dilemme suivant se présenterait : soit les Israélites connaissaient le nom, soit ils ne l'avaient jamais entendu : si le nom leur était connu, ils n'y percevraient aucun argument en faveur de la mission de Moïse, sa connaissance et leur connaissance du nom divin étant les mêmes. Si, d'autre part, ils ne l'avaient jamais entendu mentionné, et si la connaissance de celle-ci devait prouver la mission de Moïse, quelle preuve auraient-ils que c'était vraiment le nom de Dieu ? De plus, après que Dieu eut fait connaître ce nom à Moïse et lui eut dit : "Va rassembler les anciens d'Israël... et ils écouteront ta voix" (ibid., 16-18) […]. La question "Quel est Son nom" signifie "Qui est cet Être qui, d'après ta croyance, t'a envoyé ?" La phrase, "Quel est son nom" […] veut dire, quelle idée doit être exprimée par le nom ? […] - Le nom Shadday signifie "celui qui suffit" ; c'est-à-dire qu'il n'a besoin d'aucun autre être pour effectuer l'existence de ce qu'il a créé, ou sa conservation: Son existence est suffisante pour cela. D'une manière similaire, le nom Hasin implique "force" […]. Il en va de même pour le «roc», qui est un homonyme […]. Il est donc clair que tous ces noms de Dieu sont des appellatifs, ou sont appliqués à Dieu par voie d'homonymie […], la seule exception étant le Tétragrammaton, le Shem ha-meforash (le nomen proprium de Dieu), qui n'est pas un appellatif ; il ne dénote aucun attribut de Dieu et n'implique rien sauf Son existence. L'existence absolue inclut l'idée de l'éternité, c'est-à-dire la nécessité de l'existence. »

*

Rachi :
« Ils écouteront ta voix. Dès lors que tu leur tiendras ce langage : « Je me suis souvenu de vous » [du verset 16, comportant la répétition (« souvenir, je me suis souvenu »)]. Car ils savent que c’est par ce signe, qui remonte à l’époque de Jacob et de Joseph, qu’ils seront délivrés (Chemoth raba). Jacob leur avait fait dire : « Eloqim vous visitera et vous fera monter de ce pays » (Genèse 50, 24), et Joseph leur avait dit : « Eloqim manifester se manifestera, et vous ferez monter mes ossements d’ici ! » (Gn 50, 25).
Le roi d’Égypte ne vous donnera pas la permission d’aller. Si je ne lui montre pas « une main forte », c’est-à-dire : aussi longtemps que je ne lui aurai pas fait connaître ma main puissante, il ne vous permettra pas de partir.
Il ne vous donnera pas. Comme le rend le Targoum Onqelos : « il ne laissera pas », comme dans : « c’est pourquoi je ne t’ai pas laissé approcher d’elle » (Genèse 20, 6) ; « mais Eloqim n’a pas permis qu’il me fît du tort » (Genèse 31, 7). Le verbe « donner », dans ces exemples, signifie : « procurer la possibilité ». Selon d’autres commentateurs, l’expression : « et pas d’une main forte » signifie : « ce n’est pas parce que Sa main est puissante ». Car dès que « j’aurai étendu ma main et frappé l’Égypte… après cela on vous renverra ». Le Targoum Onqelos le rend aussi par : « et non pas parce que Sa force est puissante ». Cette explication m’a été donnée par rabi Ya‘aqov fils de rabi Mena‘hem. »

S’annonce la fin de l’épreuve, la fin de la détresse, par la présence de celui qui est et qui sera (avec toi).


RP
Textes de fin du monde

Église protestante unie de France / Poitiers
Étude biblique 2017-2018
Chaque 2e mardi du mois à 14 h 30
& chaque jeudi qui suit le 2e mardi à 20 h 30
3) 12 & 14 décembre - Sortir d’Égypte – Genèse 50, 15-21 / Exode 3 (PDF ici)