vendredi 16 mars 2018

Quel retour d’exil ?




« C’est ici la voix de celui qui crie dans le désert : Préparez le chemin du Seigneur, Aplanissez ses sentiers. » (Mt 3, 3 / Es 40)

« Il vous baptisera dans l'Esprit Saint et le feu » (Mt 3, 11)… « recueillant le blé dans son grenier ; mais la bale, il la brûlera » (Mt 3, 12). Tout comme « l'herbe sèche, la fleur se fane quand le souffle du Seigneur vient sur elles... Oui, le peuple, c'est de l'herbe : l'herbe sèche, la fleur se fane, mais la parole de notre Dieu subsistera toujours ! » (Es 40)

Mt 3, 13-14 : « Alors Jésus vint de la Galilée au Jourdain vers Jean, pour être baptisé par lui. Mais Jean s’y opposait, en disant : C’est moi qui ai besoin d’être baptisé par toi, et tu viens à moi ! »

Car quel besoin de repentir, de baptême de repentir, pour un homme sans péché ?

Mt 3,15 : « Jésus lui répondit: Laisse faire maintenant, car il est convenable que nous accomplissions ainsi tout ce qui est juste. Et Jean ne lui résista plus. »

C'est là un geste de solidarité avec le peuple exilé. Partage de l'exil du peuple, afin de l'en ramener. Il est un baptême dont Jésus doit être baptisé (Luc 12, 50), qui s'annonce en ce jour : son engloutissement dans les eaux sombres de la mort où il rejoindra — on ne peut plus totalement — le peuple qu'il rachète… Il le rejoint jusqu'à la douleur de l’exil, jusqu’à sa mort, jusqu'aux sinuosités de ses égarements, par quoi il le garantit que rien ne peut le séparer de l'amour de Dieu (cf. Es 54, 10 ; Romains 8, 38-39), pas même ses propres tortuosités. Il l’a rejoint, devant Jean, « baptisant en vue du repentir/retour/techouva », jusqu'à ses repentirs et jusqu'à ses prières. Le Christ a fait siennes les prières d'hommes chargés de faiblesses, de désirs de vengeance et d'auto-justifications. Il a fait siens les Psaumes, ces Psaumes qui nous ressemblent. Rejoignant les exilés dans les faiblesses qui sont les leurs, il élève par sa mort, dans les eaux de cet autre baptême, qui « lui viennent jusqu'à la gorge » (Ps 69 ; cf. Ps 22), ces prières de notre humanité jusqu'à la gloire de la filiation éternelle.

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Au-delà des rappels de la Loi en vue du repentir que portait Jean, il y a donc la consolation du peuple exilé loin de Dieu, consolation que le Baptiste annonce selon Ésaïe 40, et la miséricorde de Dieu, dont l'éminent signe public est ce baptême du Christ.

Lorsque avec l'Esprit venu comme une colombe, la voix déclare ainsi Jésus Fils de Dieu, c'est, en vertu de la solidarité qu'il montre lui en se faisant baptiser, l’adoption du peuple comme fils et filles à leur tour qui est aussi prononcée (Ez 36, 26-28). Le baptême, qui est en premier lieu un geste d'humilité, un geste de repentir, de retour/techouva, devient aussi le signe d'une régénération (Ez, ibid., « Je mettrai en eux mon Esprit »).

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On connaît le reste de la prédication de Jean, qui baptise Jésus, les fameuses exhortations avec lesquelles il accompagne la Bonne Nouvelle : comblez les abîmes, abaissez les montagnes, redressez ce qui est tordu. Il sera emprisonné pour cela, par le roi Hérode, qui n'aime pas qu'on lui rappelle trop publiquement qu'il est un pécheur public.

Cet appel de Jean à la justice, Jésus vient l'assumer par son baptême, l'assumer pour l'accomplir par solidarité. Car la solidarité n'est pas un vain mot. Il s'agit d'être concret. Jésus l'est. Ce que le Baptiste appelle tous à faire, il le fait. L'Esprit l'investit pour cela.

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Le temps annoncé par les prophètes, dont le prophète Jean le Baptiste, s’est approché ; le temps de combler les fossés creusés par la richesse et la corruption. Un temps toujours actuel bien sûr, tant que dure le temps — « vous aurez toujours les pauvres avec vous », rappellera Jésus. Face à l'énormité du déséquilibre, on est pris d'un sentiment de malaise, et d'impuissance. Et dès lors, à terme, de culpabilité. Ce qui est inutile, comme toute impuissance ou culpabilité, mais le Christ libère de la culpabilité en donnant du même coup la force qui est dans la liberté qu'il octroie.

Car être libéré de la culpabilité suppose recevoir aussi la parole qui fait se lever, et la force de se lever.

Le Christ est apparu au baptême de Jean pour se solidariser avec les exilés de Babylone — enfants d’Abraham à qui Dieu suscite des enfants depuis des pierres, selon ce même Jean le Baptiste (Mt 3, 9).


RP
Les choses de la fin

Église protestante unie de France / Poitiers
Catéchisme pour adultes 2017-2018
Chaque 3e mardi du mois à 14 h 30
& chaque jeudi qui suit le 3e mardi à 20 h 30
6) 20 & 23 mars — Quel retour d’exil ?


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