lundi 15 février 2016

Judaïsme




La Torah : il s’agit des cinq premiers livres du Tanakh. Le mot Tanakh est composé des initiales de Torah (la Loi), Nebiim (les Prophètes), Khetoubim (les Écrits), les trois sections de la Bible hébraïque, dont la Torah est le cœur. Si les livres de l'Ancien Testament sont ceux du Tanakh (catholiques et orthodoxes recevant cependant des livres supplémentaires, venus de la Bible grecque des Septante), il est utile de distinguer la Bible hébraïque de l'Ancien Testament : qui dit Ancien Testament suppose un Nouveau, ce que le Tanakh ne fait pas. La Septante rangeait les livres dans un ordre qui n'est pas celui du Tanakh. comme ne l'est pas l'ordre des livres de l'Ancien Testament. Rangement qui n'est pas indifférent puisqu'il vise un débouché sur le Nouveau Testament (la TOB a toutefois repris l'ordre de la Bible hébraïque), quand la Torah est au contraire le cœur du Tanakh.

Le Midrash (de l'hébreu darash, "examen", "exploration") : il s'agit d'écrits juifs commentant et expliquant la Bible hébraïque. Ce sont des interprétations, par différents rabbins, des mitsvoth (c’est-à-dire préceptes, commandements) et du récit biblique. Ils relèvent de la loi orale, donnée comme remontant au Sinaï, à côté de la loi écrite. Le début de sa mise par écrit par des scribes remonte au IIe siècle av. J.C. Le Midrash est divisé en deux parties : la Halakha, qui expose la loi et déduit de la Torah écrite la loi traditionnelle ; et la Haggadah, composée de divers récits, sermons et commentaires sur les textes narratifs de la Bible hébraïque. Ces écrits sont extrêmement divers, de styles variés, depuis des paraboles et des sermons, jusqu'aux codifications de la loi.

Le Talmud (de la racine lmd, qui signifie "étude") : il s'agit d'une compilation du Midrash, des midrashim au pluriel. Mise par écrit de la loi orale, le Talmud est un texte incontournable du judaïsme rabbinique. Rédigé en hébreu et araméen, il est le fondement de la Halakha ; il y en a deux versions : le Talmud de Jérusalem et celui de Babylone, qui prenait encore forme tandis que celui de Jérusalem était complété. Sa rédaction commence au IIe siècle av. J.C. et s'achève aux environs de l'an 500 ap. J.C. La période talmudique se divise elle-même en deux époques : celle des commentaires les plus anciens, la Michnah (d'un mot qui signifie "répétition", ou "enseignement"), puis celle de la Gemarah (d'un mot signifiant "compléter") qui consiste en analyses, discussions et débats sur la Mishnah.

RP, article dans Le Protestant de l'Ouest n° 397, septembre 2015, p. 30

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Judaïsme et Christianisme

Calvin et l’Alliance : « […] L'alliance faicte avec les Pères anciens [à savoir Abraham, Isaac et Jacob], en sa substance et vérité est si semblable à la nostre, qu'on la peut dire estre une même avec icelle. Seulement elle diffère en l'ordre d’estre dispensée. » (Institution Chrétienne II, x, 2.)
« Par conséquent, que cette opinion enragée et pernicieuse soit loin de nous : à savoir que Dieu n'a rien proposé aux Juifs […]. S. Pierre remontrait aux Juifs de son temps qu'ils étaient héritiers de la grâce évangélique, parce qu'ils étaient successeurs des Prophètes, étant compris en l'alliance que Dieu avait faite anciennement avec Israël (Actes 3, 25). » (Institution Chrétienne II, x, 23.)

Étapes d’une rupture :
— Années 30 : Crucifixion de Jésus pour "raison d’État". L’occupant romain (servi par le pouvoir hérodien collaborateur) élimine la menace d’une résistance potentielle : motif officiel de l’exécution : "INRI" — "roi des Judéens" (ironie romaine). Pas de rupture avec le judaïsme.
— Années 50 : Multiplication des croyants d’origine non-juive dans l’Église ; décision les concernant en faveur de la (traditionnelle) Loi de Noé ("7 commandements" — cf. Actes 15, 19-21) ; on s’orientera bientôt vers une marginalisation de la pratique des 613 préceptes de la Loi de Moïse.
— Années 70 : À la destruction du Temple de Jérusalem, les chrétiens croyant que le Royaume est présent de façon cachée en Jésus ressuscité, réorganisent le culte autour des événements de la vie du Christ, perçus comme réalisation des paroles de la Bible hébraïque.
— Années 90 : Les juifs n’ayant pas constaté d’apparition du Royaume, réorganisent le culte autour des 613 préceptes, et entérinent le fait que les chrétiens s’étant organisés autour d’un centre différent, ont constitué une communauté devenue autre que la communauté juive.


Quelques thèmes, noms et textes

Rachi (1040-1105), l’exégèse et le Talmud

Maïmonide (1135-1204), la théologie et la philosophie

de la Kabbale au Hassidisme : — la kabbale : Moïse de Leon (Zohar, XIIIe s.) ; Isaac Louria (XVIe s.). — Le rabbin Loew de Prague et la légende du Golem. — Sabbataï Zvi (1626-1676) et le messianisme.
Baal Shem Tov (Israël Ben Éliézer — 1698-1780) et le hassidisme

Theodor Herzl (1860-1904) et le sionisme
Yeshayahou Leibowitz (réflexions sur l’État d’Israël)

Primo Lévi (et d’autres... — l’expérience de la Shoah)
Hans Jonas (1903-1993) et Le Concept de Dieu après Auschwitz


RP
Traditions religieuses et spiritualités

Église protestante unie de France / Poitiers
Catéchisme pour adultes 2014-2015
Chaque 3e mardi du mois à 14 h 30
& chaque jeudi qui suit le 3e mardi à 20 h 30
5) 16 & 18 février – Judaïsme(s) (PDF) / Voir aussi (plus détaillé) ICI


mardi 9 février 2016

Le culte et le trivial




Parler de culte, donc de ‘religieux’, est parler d’un rapport à l’ultime — pour l’Ecclésiaste rapport à Dieu en termes de ‘crainte’, ce qui évoque l’incontournable qui se découvre sous l’angle de la mémoire, dans le cadre du ‘souvenir’.

Ici la ‘crainte’ de Dieu apparaît comme relation libératrice.
Notre mémoire ment : par omission, par partialité, par accentuation et exagération, etc. Il n’est qu’à comparer les versions fournies par plusieurs témoins honnêtes du même événement !
Il apparaît alors qu’être sincère, c’est croire ses propres mensonges !
Or, sous l’angle de la subjectivité et du malheur du temps, allant jusqu’au constat de l’inconvénient d’être né, nos souvenirs charrient un amas de blessures.
Sous cet angle, quant à notre rapport à nous-mêmes, notre mémoire est redoutable : selon les tournures d’esprit, elle oscille entre charger autrui et touiller notre propre sentiment de culpabilité… Tout cela campée sur le mensonge de nos souvenirs !

Où la crainte de Dieu, seul détenteur de la vérité de la mémoire et donc de l’ouverture sur le souvenir vrai — qui demeure en lui, et donc, au fond, inaccessible —, devient ouverture sur une libération d’une portée considérable, confinant à l’infini…

C’est là une fonction du ‘religieux’, au-delà de ses fonctions dévoyées, que l’Ecclésiaste résume en termes de sacrifice des insensés (Ecc 4, 17) et autres marchandages en termes de vœux non tenus (Ecc 5, 4) tant on n’est pas en mesure d’en saisir la portée au moment où l’on est tenté de les prononcer. Dieu seul pourra en libérer.

« L’infidèle est quelqu'un qui ne se souvient pas ou se souvient mal. On pourrait aller plus loin et considérer la mémoire comme la condition même de la vie morale. » (Emil Cioran, Portrait d'un philosophe : Gabriel Marcel, Cahiers de l'Herne / Cioran, Champs Flammarion, p. 314)

L’Ecclésiaste 12, 1 : « Souviens-toi de ton Créateur pendant les jours de ta jeunesse », souvenir libérateur, qui est au cœur du religieux. Cf. Exode 20, parole fondatrice de la religion biblique, qui vaut pour aujourd’hui : « je suis le Seigneur ton Dieu, qui t’ai libéré de l’esclavage ».

Alors l’humain perçoit la source de sa plénitude : « crains Dieu et observe ses commandements, c’est là tout l’humain » (Ecc 12, 13).

Ecclésiaste 4 & 5
4, 17 Surveille tes pas quand tu vas à la Maison de Dieu, approche-toi pour écouter plutôt que pour offrir le sacrifice des insensés ; car ils ne savent pas qu'ils font le mal.

5, 1 Que ta bouche ne se précipite pas et que ton cœur ne se hâte pas de proférer une parole devant Dieu. Car Dieu est dans le ciel, et toi sur la terre. Donc, que tes paroles soient peu nombreuses !
2 Car de l'abondance des occupations vient le rêve et de l'abondance des paroles, les propos ineptes.
3 Si tu fais un vœu à Dieu, ne tarde pas à l'accomplir. Car il n'y a pas de faveur pour les insensés ; le vœu que tu as fait, accomplis-le.
4 Mieux vaut pour toi ne pas faire de vœu que faire un vœu et ne pas l'accomplir.
5 Ne laisse pas ta bouche te rendre coupable tout entier, et ne va pas dire au messager de Dieu : « C'est une méprise. » Pourquoi Dieu devrait-il s'irriter de tes propos et ruiner l'œuvre de tes mains ?
6 Quand il y a abondance de rêves, de vanités, et beaucoup de paroles, alors, crains Dieu.

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Le fait que tout soit don de Dieu invite à « la crainte », qui est, en son versant négatif, l'admission de la possibilité que ce qui est don ne soit pas, ou n'ait pas été octroyé — et en son versant positif, la reconnaissance, tout simplement, la reconnaissance de ce que matérialité comme condition du bonheur, jusqu'à la disposition pour le recevoir, ne viennent, ultimement, pas de nous.

Et là, cela compris, le bonheur est déjà là, comme reconnaissance et fruit de la reconnaissance !

Il s'agit de l'étonnement reconnaissant, jusqu'à l'émerveillement de l'événement unique de la venue de l'être sous le soleil, de la venue d'une pensée sous le soleil, fût-elle un éclair dans une nuit infinie — et sachant en outre qu'elle est aussi tissée de douleur. Le moment unique de la percée de l'être sous le soleil, moment de vanité, n'en est pas moins l'occasion de tout bonheur, source de toute reconnaissance à Dieu qui l'a fait advenir comme don.

Reconnaissance !

C'est là le culte de Dieu tel qu'il est requis !


Ecclésiaste 5 :
18 Voici ce que j’ai vu : c’est pour l’homme une chose bonne et belle de manger et de boire, et de jouir du bien-être au milieu de tout le travail qu’il fait sous le soleil, pendant le nombre des jours de vie que Dieu lui a donnés ; car c’est là sa part.
19 Mais, si Dieu a donné à un homme des richesses et des biens, s’il l’a rendu maître d’en manger, d’en prendre sa part, et de se réjouir au milieu de son travail, c’est là un don de Dieu.
20 Car il ne se souviendra pas beaucoup des jours de sa vie, parce que Dieu répand la joie dans son cœur.

Voilà qui rejoint, et précède Nietzsche :

«… Si notre âme a, comme une corde, une seule fois tressailli et résonné de bonheur […,] l'éternité tout entière était, dans cet instant unique de notre acquiescement, saluée, rachetée, justifiée et affirmée.» (Nietzsche, La Volonté de puissance, § 1032.)

Avec chez l'Ecclésiaste, cette conscience permanente de la condition qui permet en tout temps la perception de ce rachat : la conscience du don de Dieu.


RP
L'Ecclésiaste

Église protestante unie de France / Poitiers
Étude biblique 2015-2016
Chaque 2e mardi du mois à 14 h 30
& chaque jeudi qui suit le 2e mardi à 20 h 30
5. 9 & 11 février (ch. 4 v. 17 à ch. 6) - Le culte et le trivial - (PDF ici)