samedi 30 mai 2020

"Toi, suis-moi"


Et demain dimanche, culte
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Jean 21, 20-25
20 Pierre, s’étant retourné, vit derrière lui le disciple que Jésus aimait, celui qui, au cours du repas, s’était penché vers sa poitrine et qui avait dit : « Seigneur, qui est celui qui va te livrer ? »
21 Quand il le vit, Pierre dit à Jésus : « Et lui, Seigneur, que lui arrivera-t-il ? »
22 Jésus lui répondit : « Si je veux qu’il demeure jusqu’à ce que je vienne, que t’importe ? Toi, suis-moi. »
23 C’est à partir de cette parole qu’on a répété parmi les frères que ce disciple ne mourrait pas. En réalité, Jésus ne lui avait pas dit qu’il ne mourrait pas, mais bien : « Si je veux qu’il demeure jusqu’à ce que je vienne, que t’importe ? »
24 C’est ce disciple qui témoigne de ces choses et qui les a écrites, et nous savons que son témoignage est conforme à la vérité.
25 Jésus a fait encore bien d’autres choses : si on les écrivait une à une, le monde entier ne pourrait, je pense, contenir les livres qu’on écrirait.

*



Finalement qui est ce « disciple que Jésus aimait », jamais nommé ? Traditionnellement, on y voit Jean, auquel on attribue l’Évangile. Il se serait donné ce modeste titre sans se nommer… par modestie…

Ce titre apparaît une autre fois, dans l’Évangile de Jean, attribué à Lazare, relevé d’entre les morts par Jésus en Jean 11. Certains y ont donc vu Lazare. On ne tranchera pas la question. Contentons-nous de remarquer qu’une rumeur circule « parmi les frères sur ce disciple » selon laquelle il « ne mourrait pas ». Certes c’est après que Jésus ait répondu à une question de Pierre sur son sort : « Si je veux qu’il demeure jusqu’à ce que je vienne, que t’importe ? » Mais pourquoi une telle question de Pierre ? N’oublions pas que ce dialogue se situe après la résurrection de Jésus…

La vie d’éternité est entrée dans le temps, au cœur de la vie des disciples. Jésus l’affirmait à Marthe, juste avant de relever son frère Lazare d’entre les morts : « Je suis la résurrection et la vie : qui croit en moi vivra, quand bien même il serait mort ; et quiconque vit et croit en moi ne mourra pas pour l’éternité » (Jn 11, 25-26).

Et voilà que cette vie d’éternité est entrée dans le temps des disciples, dans notre temps. Pierre interrogeant Jésus sur le devenir éternel de ce disciple que l’Évangile appelle « celui que Jésus aimait », et qui, n’étant pas nommé, peut être chacun d’entre nous — Pierre croit que cette vie d’éternité est venue. C’est sa réponse à la question que Jésus posait à Marthe après qu’il lui ait dit « Je suis la résurrection et la vie » : « Crois-tu cela ? » lui demandait-il (Jn 11, 26).

Question personnelle posée à chacune et chacun de nous dans un tête-à-tête intime : la réponse de Jésus à Pierre n’en laisse aucun doute : quand à lui, sur qui tu m’interroge, « que t’importe ? Toi, suis-moi. » Toi ! Le Ressuscité dit cela à chacune et chacun d’entre nous, en tête-à-tête, cœur à cœur : toi suis-moi !


RP, 30.05.2020
En direct sur RCF Poitou à 8H45

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Et demain dimanche, culte
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vendredi 29 mai 2020

"M'aimes-tu ?"



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Jean 21, 15-19
15 Après le repas, Jésus dit à Simon-Pierre : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu plus que ceux-ci ? » Il répondit : « Oui, Seigneur, tu sais que je t’aime », et Jésus lui dit alors : « Pais mes agneaux. »
16 Une seconde fois, Jésus lui dit : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ? » Il répondit : « Oui, Seigneur, tu sais que je t’aime. » Jésus dit : « Sois le berger de mes brebis. »
17 Une troisième fois, il dit : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ? » Pierre fut attristé de ce que Jésus lui avait dit une troisième fois : « M’aimes-tu ? », et il reprit : « Seigneur, toi qui connais toutes choses, tu sais bien que je t’aime. » Et Jésus lui dit : « Pais mes brebis.
18 En vérité, en vérité, je te le dis, quand tu étais jeune, tu nouais ta ceinture et tu allais où tu voulais ; lorsque tu seras devenu vieux, tu étendras les mains et c’est un autre qui nouera ta ceinture et qui te conduira là où tu ne voudrais pas. »
19 Jésus parla ainsi pour indiquer de quelle mort Pierre devait glorifier Dieu ; et après cette parole, il lui dit : « Suis-moi. »

*



Pierre, face à Jésus lui demandant pour la troisième fois s'il l'aime, est attristé. Il n'est pas vraiment sûr de la vérité de son amour ! « Tu sais toutes choses » (v. 17), dit-il à Jésus. Tu pénètres les secrets de mon cœur : je ne vais pas te mentir. Je ne suis pas sûr de mon amour, surtout lorsque tu mets devant moi ce qu'implique le fait de t'aimer — ce que je sais très bien : prendre soin de tes brebis. Si tu es mon Seigneur, si en te voyant, j'ai vu le Père, alors t'aimer implique nécessairement t'obéir et te servir… être, puisque c'est ce que tu me demandes, berger, pasteur de tes brebis. Alors, j'ai peur, peur de ne pas te servir ; j'ai peur de te dire ce que me demandes dans les termes avec lesquels tu me le demandes. 

Ici, il faut savoir qu'en grec dans notre texte, il y a deux mots différents pour dire aimer. Deux fois Jésus emploie le mot agapè (i.e. le verbe agapao). L’agapè, plus que l’amour comme don de soi, est ce qui le fonde, pas tant le don de soi que le fondement qui le permet : il est quelque chose en dessous — quelque chose qui est « invisible pour les yeux » mais qui donne son prix à l’amour, qui ouvre sur le don. Et Pierre ne répond jamais avec ce mot-là, agapè. Il en emploie un autre, philia (le verbe phileo), qui n'est pas moins fort, qui parle de relation, très forte en l'occurrence. Oui, tu sais que nous sommes liés d’amitié, que l'amour nous lie — telle est la réponse de Pierre. Pierre, honnête, ne donne pas la parole de ce qu’il ignore de lui-même.

Alors Jésus, lui posant une troisième fois la question, emploie cette fois le mot de Pierre. Sommes-nous en relation d’amitié, d'amour réciproque ? Et Pierre acquiesce une troisième fois, mais il est triste. Il n'a pas pu lui dire ce qu’il ignore. Il sait, Jésus sait aussi, qu'ils sont en relation amicale, au sens le plus fort : il y a un véritable amour entre eux. Mais Pierre n'a pas pu dire la parole qu'il voudrait pourtant dire.

Alors, reprenant les mots de Pierre, Jésus le rejoint — dans une réciprocité octroyée par Jésus pour la confiance de Pierre. L'amour que je t'ai porté a créé cette relation d'amour qui nous lie ; elle est là, elle existe, et elle créera en toi l'engagement dont tu sais qu'il est hors de portée. C'est ce qu'implique la suite de l'histoire, où Jésus annonce à Pierre qu'il étendra un jour les bras pour qu'un autre le mène où il ne voulait pas aller. Confiance.

Jésus a rejoint Pierre en le rejoignant dans ses mots, rejoignant la crainte et la tristesse de Pierre dans ce qui s’avère être une véritable progression de l'énonciation de l'amour de Jésus, source de la confiance qui pourra tout.


RP, 29.05.2020
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jeudi 28 mai 2020

"Pour qu’ils soient un comme nous sommes un"



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Jean 17, 20-26
20 « Je ne prie pas seulement pour eux, je prie aussi pour ceux qui, grâce à leur parole, croiront en moi :
21 que tous soient un comme toi, Père, tu es en moi et que je suis en toi, qu’ils soient en nous eux aussi, afin que le monde croie que tu m’as envoyé.
22 Et moi, je leur ai donné la gloire que tu m’as donnée, pour qu’ils soient un comme nous sommes un,
23 moi en eux comme toi en moi, pour qu’ils parviennent à l’unité parfaite et qu’ainsi le monde puisse connaître que c’est toi qui m’as envoyé et que tu les as aimés comme tu m’as aimé.
24 Père, je veux que là où je suis, ceux que tu m’as donnés soient eux aussi avec moi, et qu’ils contemplent la gloire que tu m’as donnée, car tu m’as aimé dès avant la fondation du monde.
25 Père juste, tandis que le monde ne t’a pas connu, je t’ai connu, et ceux-ci ont reconnu que tu m’as envoyé.
26 Je leur ai fait connaître ton nom et je le leur ferai connaître encore, afin que l’amour dont tu m’as aimé soit en eux, et moi en eux. »

*



Ainsi le Christ a prié non seulement pour les Apôtres mais aussi pour ceux qui croiront par leur parole — c’est-à-dire nous ! Qu’ils soient un comme lui et le Père sont un ! Question que l’on peut se poser — on le fait parfois : Jésus n’a-t-il donc pas été exaucé ? Ce même Évangile de Jean a pris soin de répondre par avance à cette question. Jésus ressuscitant Lazare disait (Jn 11, 41-42) : « je te remercie de ce que tu m’as exaucé. Certes tu m’exauces toujours ».

Alors la vraie question est : quel exaucement ? Quel exaucement de celui qui va à la croix ? En Jean 12, 23 sq., Jésus annonçait : « L’heure est venue où le Fils de l’homme doit être glorifié. » Puis (v. 32), « moi, quand j’aurai été élevé de la terre, j’attirerai tous les hommes à moi. En parlant ainsi, il indiquait de quelle mort il devait mourir. »

En vue de la gloire, sur la croix, qui se profile, Jésus prie : « Père, je veux que là où je suis, ceux que tu m’as donnés soient eux aussi avec moi, et qu’ils contemplent la gloire que tu m’as donnée, car tu m’as aimé dès avant la fondation du monde » (Jn 17, 24).

Or cela est déjà donné : « moi, je leur ai donné la gloire que tu m’as donnée, pour qu’ils soient un comme nous sommes un. » Sa prière est bien exaucée.

Là est l’unité déjà donnée : « près de toi dans ta bouche et dans ton cœur », disait le Deutéronome (ch. 30, v. 14) — dans la plus radicale humilité, au cœur de notre faiblesse assumée à la croix comme élévation à la gloire ; le reste, « qu’ils parviennent à l’unité parfaite » (v. 23), est le chemin de notre « pas encore » vers le « déjà donné ». Ce qui est déjà donné dans l'unité du Père et du Fils peut prendre forme dans notre pas encore.

Le « déjà » n’est pas fictif : déjà justes en Christ, encore pécheurs en nous-mêmes — c’était déjà le cas dans l’Église primitive ! — ; déjà un en lui, par l’Esprit saint, dans l’unité du Père et du Fils, pas encore quant à la visibilité ; le monde qui nous est confié est encore divisé par d’immenses abîmes, d’immenses injustices. Notre unité est toutefois réelle au cœur de notre diversité. Sa mesure, en vue de sa visibilité pour que le monde croie, est celle de notre foi, de notre confiance en celui qui nous l’a déjà donnée pour la déployer jusqu’à son accomplissement.


RP, 28.05.2020
En direct sur RCF Poitou à 8H45
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mercredi 27 mai 2020

"Je dis ces paroles dans le monde pour qu’ils aient ma joie"



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Jean 17, 11b-19
11 […] Père saint, garde-les en ton nom que tu m’as donné, pour qu’ils soient un comme nous sommes un.
12 Lorsque j’étais avec eux, je les gardais en ton nom que tu m’as donné ; je les ai protégés et aucun d’eux ne s’est perdu, sinon le fils de perdition, en sorte que l’Écriture soit accomplie.
13 Maintenant je vais à toi et je dis ces paroles dans le monde pour qu’ils aient en eux ma joie dans sa plénitude.
14 Je leur ai donné ta parole, et le monde les a haïs, parce qu’ils ne sont pas du monde, comme je ne suis pas du monde.
15 Je ne te demande pas de les ôter du monde, mais de les garder du Mauvais.
16 Ils ne sont pas du monde comme je ne suis pas du monde.
17 Consacre-les par la vérité : ta parole est vérité.
18 Comme tu m’as envoyé dans le monde, je les envoie dans le monde.
19 Et pour eux je me consacre moi-même, afin qu’ils soient eux aussi consacrés par la vérité.

*



Dans cette prière de consécration de ses disciples par Jésus, nous voyions, aux versets qui précèdent, Jésus, à la veille de mourir, annoncer prier pour eux spécifiquement, et non pas pour le monde où il les laisse en proie à toutes les menaces. À présent cela se précise : « Je leur ai donné ta parole, et le monde les a haïs, parce qu’ils ne sont pas du monde, comme je ne suis pas du monde. »

Le monde. Il en est beaucoup question dans l’Évangile de Jean en ces derniers moments avant la croix. Plusieurs angles de compréhension de ce monde hostile.

De nos jours encore le mot interroge. Le romancier Milan Kundera écrit : « Quand je dis monde, je pense à cette partie de l'univers qui répond à nos appels (ne serait-ce que par un écho à peine perceptible) et dont nous-mêmes entendons l’appel » (dans L’immortalité). Plus loin il poursuit que précisément, il ne répond pas toujours : « le monde, ce monde perdu qui refusait de l'entendre », dit-il (ibid .) du personnage d’une jeune fille en détresse.

On n’est pas très loin de ce dont Jésus avertit ses disciples. Un monde sourd, qui non seulement les ignore, comme il a ignoré leur maître, mais plus, en butte à la parole de vérité qu’il portait, en est venu le haïr.

Ce monde hostile, qui exclut, méprise, jusqu’à persécuter, tel est le monde où les disciples sont laissés. Sentiment d’être hors du monde auquel sont de tout temps sensibles les minorités, toutes celles et ceux qui sont laissés à la marge du monde qui compte, fût-ce le monde religieux ou ecclésiastique. Quel protestant français, pour donner cet exemple auquel je suis naturellement sensible, n’a pas connu, comme une rémanence du temps de l’exclusion pure et simple sous l’Ancien Régime, ce sentiment d’être ignoré, compté pour quantité négligeable, fût-ce dans le concert des religions, quand on veut bien lui concéder si ce n’est une voix, ne serait-ce que le titre de chrétien ?

Sourd, c’est peut-être la caractéristique du monde dans lequel Jésus console ceux qu’il y envoie, ayant été lui aussi considéré comme quantité négligeable.

L’écrivain Emil Cioran (dans son Cahier de Talamanca), fils incroyant de prêtre orthodoxe, exilé de sa Roumanie natale, note : « Si nous pouvions ressentir une volupté secrète chaque fois qu’on ne fait aucun cas de nous, nous aurions la clef du bonheur. »

La prière de consécration de ses disciples par Jésus, au moment où il va les laisser en ce monde en passe de le crucifier leur ouvre la joie qui est la sienne, celle de se savoir dans la main du Père — v. 13 : « je dis ces paroles dans le monde pour qu’ils aient en eux ma joie dans sa plénitude ».


RP, 27.05.2020
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mardi 26 mai 2020

"Eux restent dans le monde, tandis que moi je vais à toi"



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Jean 17, 1-11a
1 Après avoir ainsi parlé, Jésus leva les yeux au ciel et dit : "Père, l’heure est venue, glorifie ton Fils, afin que ton Fils te glorifie
2 et que, selon le pouvoir sur toute chair que tu lui as donné, il donne la vie éternelle à tous ceux que tu lui as donnés.
3 Or la vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi, le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus Christ.
4 Je t’ai glorifié sur la terre, j’ai achevé l’œuvre que tu m’as donnée à faire.
5 Et maintenant, Père, glorifie-moi auprès de toi de cette gloire que j’avais auprès de toi avant que le monde fût.
6 "J’ai manifesté ton nom aux hommes que tu as tirés du monde pour me les donner. Ils étaient à toi, tu me les as donnés et ils ont observé ta parole.
7 Ils savent maintenant que tout ce que tu m’as donné vient de toi,
8 que les paroles que je leur ai données sont celles que tu m’as données. Ils les ont reçues, ils ont véritablement connu que je suis sorti de toi, et ils ont cru que tu m’as envoyé.
9 Je prie pour eux ; je ne prie pas pour le monde, mais pour ceux que tu m’as donnés : ils sont à toi,
10 et tout ce qui est à moi est à toi, comme tout ce qui est à toi est à moi, et j’ai été glorifié en eux.
11 Désormais je ne suis plus dans le monde ; eux restent dans le monde, tandis que moi je vais à toi.

*



Les mots que nous venons d’entendre sont les premiers mots de la prière de consécration de ses disciples par Jésus. Cette prière liturgique est, à bien y regarder, la seule prière que les disciples voient prononcer par Jésus. La vie de prière habituelle de Jésus, elle, n’est pas connue des disciples. Quand il prie il se retire seul dans des lieux isolés, selon ce qu’il leur enseigne de faire eux-mêmes — « quand tu pries, entre dans ta chambre, ferme la porte… » (Matthieu 6, 6).

Il observe lui-même cela au point que les disciples lui demandent de leur apprendre comment prier, en Luc, ch. 11, v. 1. C’est en réponse à cela que Jésus leur enseigne alors le Notre Père, en cinq demandes chez Luc, qui correspondent aux cinq livres des Psaumes, eux-mêmes reprise priante des cinq livres de la Torah.

Et effectivement, les traces de prières de Jésus dans le Nouveau Testament sont des Psaumes, jusque sur la croix où il prie avec le Psaume 22, « mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »

Les disciples n’ont pas assisté à l’intimité des tête-à-tête de Jésus et de son Père. Sa seule prière qui nous soit donnée est ce ch. 17 de Jean, prière liturgique spécifique, de consécration des disciples, comme Jésus le souligne en précisant qu’il prie pour eux et pas pour le monde (v. 9). Eux, il les envoie dans le monde, les sachant, au moment où lui va partir, dans la main du Père. Il les envoie à leur tour, et, cela apparaîtra dans la suite de la prière, nous après eux.

Jésus se retire, il va à la croix, l’œuvre qui lui a été confiée par le Père est achevée. Il entre dans la gloire. Il passe à présent le relai, par cette prière de consécration de ceux qui, observant sa parole ont cru en lui, qui à leur tour sont envoyés dans le monde : « désormais je ne suis plus dans le monde ; eux restent dans le monde, tandis que moi je vais à toi. »


RP, 26.05.2020
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lundi 25 mai 2020

"Prenez courage, j’ai vaincu le monde"



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Jean 16, 29-33
29 Ses disciples lui dirent : « Voici que maintenant tu parles ouvertement et que tu abandonnes tout langage énigmatique ;
30 maintenant nous savons que toi, tu sais toutes choses et que tu n’as nul besoin que quelqu’un t’interroge. C’est bien pourquoi nous croyons que tu es sorti de Dieu. »
31 Jésus leur répondit : « Croyez-vous, à présent ?
32 Voici que l’heure vient, et maintenant elle est là, où vous serez dispersés, chacun allant de son côté, et vous me laisserez seul. Mais je ne suis pas seul, le Père est avec moi.
33 Je vous ai dit cela pour qu’en moi vous ayez la paix. En ce monde vous êtes dans la détresse, mais prenez courage, j’ai vaincu le monde ! »

*



Une relecture du monde en regard de l’échec de la croix, c’est ce que Jésus offre et révèle. Un échec inouï, la croix ! Une relecture de la croix comme élévation et glorification, don de l’Esprit de vérité. Un échec transfiguré qui transfigure tous nos échecs et exauce toutes nos prières, les élevant à leur vérité. Jésus vient d’annoncer aux disciples l’exaucement ultime de toute prière qui est le don de l’Esprit saint. Découvrir derrière toutes nos demandes notre vrai désir, le désir de Dieu, désir de sa présence, de son Esprit.

Tel est le langage de vérité, sans énigmes, direct, sans images, que les disciples découvrent. « Maintenant nous savons que toi, tu sais toutes choses […]. Nous croyons que tu es sorti de Dieu. » Voir tous nos échecs transfigurés à la croix en dévoilement de la victoire qui s’y révèle, sur le monde, sur nos défaites, sur nos échecs et nos faiblesses. Là, Jésus a tout vaincu : « en ce monde vous êtes dans la détresse, mais prenez courage, j’ai vaincu le monde ! »

Il a vaincu jusqu’à l’échec moral qui guette les disciples. Cet échec qu’il leur annonce : « voici que l’heure vient, et maintenant elle est là, où vous serez dispersés, chacun allant de son côté, et vous me laisserez seul », défaite morale des disciples… Mais déjà transformée par le crucifié : « je ne suis pas seul, le Père est avec moi. Je vous ai dit cela pour qu’en moi vous ayez la paix. »

Dans la perception de cette transfiguration de nos vies s’ouvre la réponse à la question que Jésus vient de poser à ses disciples : « Croyez-vous, à présent ? » La réponse à cette question, la réponse de la foi, est celle qui perçoit désormais la transfiguration de toute chose, y compris de nos échecs moraux, dans la victoire qui s’annonce, celle de la transfiguration du formidable échec aux yeux du monde qu’est la croix, devenue victoire éternelle : « En ce monde vous êtes dans la détresse, mais prenez courage, j’ai vaincu le monde ! »


RP, 25.05.2020
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dimanche 24 mai 2020

"Cette gloire que j’avais auprès de toi avant que le monde fût"


Culte et prédication in extenso
ici, D'un autre côté :
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Jean 17, 1-11 (et Actes 1, 12-14 ; 1 Pierre 4, 13-16)
1 Après avoir ainsi parlé, Jésus leva les yeux au ciel et dit : "Père, l’heure est venue, glorifie ton Fils, afin que ton Fils te glorifie
2 et que, selon le pouvoir sur toute chair que tu lui as donné, il donne la vie éternelle à tous ceux que tu lui as donnés.
3 Or la vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi, le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus Christ.
4 Je t’ai glorifié sur la terre, j’ai achevé l’œuvre que tu m’as donnée à faire.
5 Et maintenant, Père, glorifie-moi auprès de toi de cette gloire que j’avais auprès de toi avant que le monde fût.
6 "J’ai manifesté ton nom aux hommes que tu as tirés du monde pour me les donner. Ils étaient à toi, tu me les as donnés et ils ont observé ta parole.
7 Ils savent maintenant que tout ce que tu m’as donné vient de toi,
8 que les paroles que je leur ai données sont celles que tu m’as données. Ils les ont reçues, ils ont véritablement connu que je suis sorti de toi, et ils ont cru que tu m’as envoyé.
9 Je prie pour eux ; je ne prie pas pour le monde, mais pour ceux que tu m’as donnés : ils sont à toi,
10 et tout ce qui est à moi est à toi, comme tout ce qui est à toi est à moi, et j’ai été glorifié en eux.
11 Désormais je ne suis plus dans le monde ; eux restent dans le monde, tandis que moi je vais à toi. Père saint, garde-les en ton nom que tu m’as donné, pour qu’ils soient un comme nous sommes un.

*



« Père, l’heure est venue, glorifie ton Fils, afin que ton Fils te glorifie » : dans cette glorification du Christ annoncée par l’Évangile de Jean, le départ du Christ qui est sa mort, coïncide à son Ascension. Apparaissent deux plans : au premier plan la croix et la mort, à l’arrière plan, comme par transparence, l’Ascension.

Dans l’Ascension comme dans la crucifixion, le Christ est « enlevé » (Ac 1, 2). « Vous ne me verrez plus », disait Jésus de sa mort, puis « encore un peu de temps et vous me verrez », disait-il de sa résurrection (Jn 16, 16). « Vous ne me verrez plus » : « une nuée le déroba à leurs yeux » (Ac 1, 9) ; « puis vous me verrez encore » : bientôt la venue en gloire.

L'Ascension, comme la mort, est tout d'abord la marque d'une absence — il ne faut pas imaginer cette élévation comme un déplacement physique vers le haut qui conduirait le Christ à une droite de Dieu « géographique » : Dieu est dans un au-delà infini : une élévation comme déplacement physique durerait indéfiniment ! Et d'autre part, Dieu est universellement présent : la droite de Dieu est partout ! Et de plus le Christ ressuscité emplit lui-même corporellement toutes choses. L'Ascension est un départ, déjà signifié par la Croix.

Dans le départ du Christ, c'est une réalité essentielle de la vie de Dieu avec le monde qui est exprimée : son retrait, son absence ; après ce premier retour qu'est sa résurrection, retrait signifié à nouveau dans l'Ascension. Le Christ entre dans son règne et, voilé dans une nuée, se retire dans cette gloire qu'il avait auprès du Père avant que le monde fût (Jn 17, 5). Car si Dieu est présent partout, et si le Christ ressuscité est lui-même corporellement présent, il est aussi à présent, comme le Père, absent, caché.


Cela nous enseigne en parallèle ce qu'il nous appartient de faire en ces temps d'absence : devenir ce que nous sommes en Dieu qui s'est retiré pour que nous puissions être. Cela suppose que nous nous retirions à notre tour de tout ce que nous avons pris l'habitude de croire de nous-mêmes, cela suppose que nous nous retirions de l'image qu'a forgée de nous notre histoire, à travers nos parents, nos maîtres, nos amis ou ennemis ; que nous nous retirions de la volonté de leur plaire, de les séduire ; que nous nous retirions aussi de notre volonté de nous différencier d'eux. L’Esprit de Dieu est celui qui insuffle en nous la liberté qui rend possible de ne plus rechercher ce que nos habitudes nous ont rendu désirable, de ne plus aimer ni haïr en réaction.

Le Christ lui-même s'est retiré pour nous laisser notre place, pour que l'Esprit vienne nous animer, cela à l'image de Dieu se retirant dans son repos pour laisser le monde être. À combien plus forte raison, devons-nous voir se retirer tous nos modèles et nos anti-modèles, tous nos désirs de plaire, ou nos volontés de nous démarquer.

C'est là seulement que se complète notre création à l'image de Dieu. Pour nous, entrée dans une prière de retrait en Dieu — de sorte que l'Esprit de Dieu lui-même soit le souffle qui nous fasse accéder à la liberté de devenir enfants de Dieu.


RP, 24.05.2020
En direct sur RCF Poitou à 8H45 / dimanche 9h15

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Culte et prédication in extenso
ici, D'un autre côté :


samedi 23 mai 2020

"Demandez et vous recevrez"


Et demain dimanche, culte
ici, D'un autre côté :

et sur RCF à 9h15,
la parole du dimanche, ici
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Jean 16, 20-23a
23 En vérité, en vérité, je vous le dis, si vous demandez quelque chose à mon Père en mon nom, il vous le donnera.
24 Jusqu’ici vous n’avez rien demandé en mon nom : demandez et vous recevrez, pour que votre joie soit parfaite.
25 « Je vous ai dit tout cela de façon énigmatique, mais l’heure vient où je ne vous parlerai plus de cette manière, mais où je vous annoncerai ouvertement ce qui concerne le Père.
26 Ce jour-là, vous demanderez en mon nom et cependant je ne vous dis pas que je prierai le Père pour vous,
27 car le Père lui-même vous aime parce que vous m’avez aimé et que vous avez cru que je suis sorti de Dieu.
28 Je suis sorti du Père et je suis venu dans le monde ; tandis qu’à présent je quitte le monde et je vais au Père. »

*



« Jusqu’ici vous n’avez rien demandé en mon nom ». Est-ce à dire seulement que jusqu’ici les disciples n’ont jamais utilisé ce qui est devenu une formule finale indispensable à la prière chrétienne, précédant le traditionnel « amen » ? Ou ce que dit Jésus ici a-t-il un sens plus profond ? Qu’est ce que demander en son nom ? Au point d’être inéluctablement exaucé — « demandez et vous recevrez ». Demander quoi, au fond ?

« Je vous ai dit tout cela de façon énigmatique, mais l’heure vient où je ne vous parlerai plus de cette manière, mais où je vous annoncerai ouvertement ce qui concerne le Père » (v. 25) ; « de façon énigmatique », ou littéralement « de façon figurée », c’est-à-dire en images.

Ce texte est à mettre en parallèle avec Luc 11 (v. 9-13), où l’on voit au bout du compte qu’au-delà des images, il est question de demander l’Esprit saint : « demandez et vous recevrez ; cherchez et vous trouverez ; frappez et l’on vous ouvrira […]. Si l’un d’entre vous est père, donnera-t-il un serpent à son fils alors que celui-ci lui demande un poisson ? Ou bien lui donnera-t-il un scorpion s’il demande un œuf ? […] À combien plus forte raison le Père qui est au ciel donnera-t-il l’Esprit saint à ceux qui le lui demandent ! »

L’Esprit saint. Demander au nom de celui qui, dans notre texte, va à la croix, n’est pas demander telle ou telle chose comme, pour reprendre les images utilisées par Jésus en Luc, un poisson ou un œuf. Jésus a d’avance accepté le chemin qui le conduit à la croix, mais, on le sait, il aurait préféré un autre exaucement de son souhait d’éviter une mort atroce : « Père, si tu voulais éloigner de moi cette coupe ! Toutefois, que ma volonté ne se fasse pas, mais la tienne » (Luc 22, 42).

En Jean, dans notre texte, il vient de le dire à ses disciples : leur affliction au moment de la mort de leur maître est chargée de la consolation de l’Esprit saint, chargée d’une joie secrète (v. 20).

Jésus leur parle à présent ouvertement, et non plus de façon figurée : toute demande adressée au Père en son nom est demande de l’Esprit saint ; pas une formule permettant de tout obtenir, mais demande de la découverte de notre vraie désir — désir de Dieu : Ps 37, v. 4, « fais de l’Éternel tes délices, et il te donnera ce que ton cœur désire » ; c’est à dire l’Éternel lui-même, tes délices, selon le vrai désir de ton cœur : son Esprit, toujours chargé de la joie qui en naît, prière toujours exaucée, de façon mystérieuse, « car le Père lui-même vous aime » — « tandis qu’à présent je quitte le monde et je vais au Père ».


RP, 23.05.2020
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Et demain dimanche, culte
ici, D'un autre côté :

et sur RCF à 9h15,
la parole du dimanche, ici

vendredi 22 mai 2020

"Votre affliction tournera en joie"



PDF ici

Jean 16, 20-23a
20 En vérité, en vérité, je vous le dis, vous allez gémir et vous lamenter tandis que le monde se réjouira ; vous serez affligés mais votre affliction tournera en joie.
21 Lorsque la femme enfante, elle est dans l’affliction puisque son heure est venue ; mais lorsqu’elle a donné le jour à l’enfant, elle ne se souvient plus de son accablement, elle est toute à la joie d’avoir mis un homme au monde.
22 C’est ainsi que vous êtes maintenant dans l’affliction ; mais je vous verrai à nouveau, votre cœur alors se réjouira, et cette joie, nul ne vous la ravira.
23 Ainsi, en ce jour-là, vous ne m’interrogerez plus sur rien.

*



Au moment où l’ancien ordonnancement du monde se réjouit de penser que la croix va le débarrasser de celui qui alors le dévoile comme désordre, ses disciples pleurent, recueillant la promesse qui va leur dévoiler, et nous dévoiler, la parole des Béatitudes : « heureux ceux pleurent, ils seront consolés ».

L’Esprit de vérité est en passe de sceller dans la vie des disciples, et en nous, la promesse inouïe : au cœur même de l’affliction, va germer la joie. La résurrection va faire apparaître que Jésus mourant récapitule et élève à la vérité toute l’affliction du monde — l’Épître aux Éphésiens (ch. 1, v. 10) parlera du projet de Dieu de « récapituler toutes choses dans le Christ, ce qui est dans les cieux et ce qui est sur la terre ».

Aujourd’hui, au jour où la croix s’approche, Jésus annonce son sens à ses disciples, sens chargé de la joie qui perce sans qu’ils ne le sachent, comparant leur affliction à celle d’une femme qui enfante. C’est l’illustration que reprendra Paul, écrivant aux Romains (ch. 8, v. 18-22) : « J’estime que les souffrances du temps présent sont sans proportion avec la gloire qui doit être révélée en nous. Car la création attend avec impatience la révélation des fils de Dieu : […] car elle aussi sera libérée […] pour avoir part à la liberté et à la gloire des enfants de Dieu. Nous le savons en effet : la création tout entière gémit maintenant encore dans les douleurs de l’enfantement. »

Ce qui a été révélé au jour de l’élévation de Jésus à la gloire, sur la croix, c’est que là s’ouvre ce que ses mots ont dit à ses disciples, leur parlant de la douleur et de la joie de l’enfantement en signe de ce que toute l’affliction passée, présente et future, est donnée à relire selon l’Esprit de vérité, l’Esprit saint, qui révèle en Jésus, et en Jésus crucifié, qu’au-delà de l’affliction qui s’avance, et par l’affliction qui s’avance, est l’enfantement du monde nouveau et éternel, les nouveaux cieux et la nouvelle terre annoncés par le prophète Ésaïe, manifestés au dimanche de Pâques, et où la création entière est appelée à entrer.


RP, 22.05.2020
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jeudi 21 mai 2020

"Ascension et envoi des disciples"


À suivre aujourd'hui jeudi 21 mai à 10h30,
ici, Culte régional de l'Ascension :
PDF ici

Matthieu 28, 16-20
16 Les onze disciples allèrent en Galilée, sur la montagne que Jésus avait désignée.
17 Quand ils le virent, ils se prosternèrent, mais quelques-uns eurent des doutes.
18 Jésus s'approcha d'eux et leur adressa ces paroles : « Tout pouvoir m'a été donné au ciel et sur la terre.
19 Allez, faites de toutes les nations des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit,
20 leur enseignant à garder tout ce que je vous ai prescrit. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du temps. »

*



Le Nom. « Au Nom du Père et du Fils et du Saint Esprit ». Le Nom. Voilà qui, en deçà de la formule donnée aux disciples envoyés baptiser et enseigner tout ce que Jésus leur a prescrit, mobilisait forcément leur mémoire de lecteurs de la Bible.

Les onze disciples, comme les autres juifs, ne prononcent pas le Nom de Dieu, mais disent Hashem, ce qui signifie Le Nom. Car Dieu échappe à toute nomination ; il est au-delà de toutes les représentations que nous pouvons nous en faire. Les prescriptions que Jésus les enjoint d’enseigner rattachent les Onze à leur enracinement juif, dans la Bible hébraïque. Car il n’y a pas de doute que pour le même Évangile de Matthieu qui rapporte cela, Jésus leur a prescrit l’observance de la Torah — « pas un seul trait de lettre n’en passera » insistait-il.

Un moment pour les Onze, qui à la fois les lie à Israël en qui s’enracine la foi de Jésus et la leur, et qui en séparera leur avenir ; leur avenir qui, en fonction du pouvoir universel que Jésus, leur Seigneur ressuscité, annonce ici comme le sien, les enverra vers les nations auxquelles les préceptes observés par, eux, les Onze, ne seront pourtant pas imposés ! — cela aussi en fidélité à cet envoi aux nations avec ce qu'elles sont : en naîtra le christianisme qui recevra l’enseignement prescrit par Jésus d’une façon qui leur soit adaptée, qui a fait le christianisme pluriel venu jusqu’à nous ; où éclora ce nom alors nouveau : chrétiens…

Pour les onze disciples, et ceux qui les suivront, c’est de ce Nom qu’ils reçoivent leur nom, comme don du Fils, par l’Esprit saint, comme leur maître reçoit le sien du Père. Ils ne sont maîtres ni du Nom de Dieu bien sûr, ni même de leur propre Nom.

Nous ne sommes pas maîtres de nos noms, reçus d’un autre, ce qui est rappelé au baptême ; ni de ce que nos noms signifient devant Dieu, ni de ce qu’il nous confie en nous appelant par nos noms lorsqu’il nous envoie dans le monde.

Christianisme en passe de naître, pour le meilleur ou le pire… pouvons-nous nous dire parfois au bout de vingt siècles de cette histoire, emboîtant le pas à une interrogation qui est peut-être déjà celle des Onze. « Quand ils virent Jésus, les disciples se prosternèrent, mais quelques-uns eurent des doutes », dit le texte, parlant d’abord de leur doute persistant quant à la réalité de la résurrection de leur maître : mais… le pressentiment du pire possible quant à la suite du temps ne serait-il pas aussi dans ce doute ?

Alors, une promesse leur est donnée, nous est donnée : « Je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du temps ».


RP, 21.05.2020
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À suivre aujourd'hui jeudi 21 mai à 10h30,
ici, Culte régional de l'Ascension :


mercredi 20 mai 2020

"Il vous fera accéder à la vérité tout entière"


À suivre demain jeudi 21 mai à 10h30,
ici, Culte régional de l'Ascension :
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Jean 16, 12-15
12 J’ai encore bien des choses à vous dire mais vous ne pouvez les porter maintenant ;
13 lorsque viendra l’Esprit de vérité, il vous fera accéder à la vérité tout entière. Car il ne parlera pas de son propre chef, mais il dira ce qu’il entendra et il vous communiquera tout ce qui doit venir.
14 Il me glorifiera car il recevra de ce qui est à moi, et il vous le communiquera.
15 Tout ce que possède mon Père est à moi ; c’est pourquoi j’ai dit qu’il vous communiquera ce qu’il reçoit de moi.

*



Au jour où Jésus adresse à ses disciples ces paroles, « il vous fera accéder à la vérité tout entière », la croix s’approche, chose incompréhensible à toutes nos sagesses. Celui qui est annoncé comme le Bien-aimé de Dieu, le maître du Royaume, peut-il mourir de la sorte ?

Voilà qui est incompréhensible et qui pourtant est le don de la vérité, qui se dévoilera comme telle au matin du dimanche de Pâques, sans qu’alors tout le sens n’en ait été saisi par les disciples. C’est l'Esprit saint, l’Esprit du Père qui vit en Jésus qui leur dévoilera la signification de la croix du Ressuscité : qui le glorifiera ! Le glorifiera ! De quoi est-il question sous ce terme dans l’évangile de Jean ? De la croix ! Il l’annonçait peu avant :  « Elle est venue, l’heure où le Fils de l’homme doit être glorifié », Jean 12, 23 ; puis aux v. 32 et 33 : «  quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes » — « Par ces paroles, précise le texte, il indiquait de quelle mort il allait mourir. »

Que la crucifixion de leur maître, perçue comme terrible humiliation, soit son élévation à la gloire, les disciples, au jour où Jésus parle, ne peuvent pas le saisir. Et même l’événement du dimanche de Pâques n’est que la première ouverture vers un dévoilement dans lequel l’Esprit saint va conduire les disciples, et avec eux, nous tous. Ce qui doit venir, à commencer par la croix, au jour où Jésus parle, va être dévoilé comme entière vérité, inaccessible comme telle à nos intelligences.

La vérité de Dieu se donne dans l’humilité du Fils, une révélation qui vaut pour toute la vie humaine de Jésus, de Pâques à la Croix et à Noël, ce premier moment d’humilité du Fils de Dieu rendu infiniment proche de nous par une vérité dont nous sommes très loin mais qui porte pour nous toute consolation et à laquelle seul l’Esprit consolateur peut nous conduire.

Une vérité pleinement révélée aux Apôtres dans le Nouveau Testament, et par eux, à nous, mais qui devra être reçue et vécue par chacun dans la suite des temps et jusqu’à nous. Cela commence par le don de l’Esprit qui conduit les plus sages dans l’humilité de la vérité.

Hors cela, hors le don de l’Esprit saint, la Croix qui alors s’approche est incompréhensible, tout comme la venue en chair de la Parole éternelle — choses cachées aux sages et aux intelligents, mais révélées à l’humilité, ce don des plus petits, le don de l’Esprit saint. C’est ici que se fait connaître le Père que nul n’a jamais vu : selon que « tout ce que possède mon Père est à moi ; c’est pourquoi j’ai dit que l’Esprit vous communiquera ce qu’il reçoit de moi. »


RP, 20.05.2020
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À suivre demain jeudi 21 mai à 10h30,
ici, Culte régional de l'Ascension :


mardi 19 mai 2020

"Si je ne m'en vais pas, l’Esprit saint ne viendra pas"


À suivre jeudi 21 mai à 10h30,
ici, Culte régional de l'Ascension :
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Jean 16, 5-11
5 Mais maintenant je vais à celui qui m’a envoyé, et aucun d’entre vous ne me pose la question : “Où vas-tu ?”
6 Mais parce que je vous ai dit cela, l’affliction a rempli votre cœur.
7 Cependant je vous ai dit la vérité : c’est votre avantage que je m’en aille ; en effet, si je ne pars pas, le Paraclet ne viendra pas à vous ; si, au contraire, je pars, je vous l’enverrai.
8 Et lui, par sa venue, il confondra le monde en matière de péché, de justice et de jugement ;
9 en matière de péché : ils ne croient pas en moi ;
10 en matière de justice : je vais au Père et vous ne me verrez plus ;
11 en matière de jugement : le prince de ce monde a été jugé.

*



Le départ de Jésus est plein de la promesse de la venue de l'Esprit : « si je ne m'en vais pas, l’Esprit saint ne viendra pas » (Jn 16, 7). Car le don de l'Esprit est le don de la présence de celui qui ne se laisse plus voir.

L’Esprit saint est celui qui nous communique cette impalpable, imperceptible présence au-delà de l'absence, et nous met dans la communion de l'insaisissable. C'est pourquoi sa venue est liée au départ de Jésus. Nous laissant la place, il nous permet alors de devenir ce à quoi Dieu nous destine, ce pourquoi il nous a créés.

Cela nous enseigne en parallèle ce qu'il nous appartient de faire désormais : devenir par l'Esprit, par son souffle mystérieux, ce que nous sommes de façon cachée ; ce à quoi nous sommes destinés, en marche vers le Royaume ; accomplissement de la Création, comme Création nouvelle en passe d’être inaugurée par la résurrection du Christ, accédant et nous faisant accéder à cette vérité, pour l’instant cachée, de nos êtres.

Il est en effet celui qui a accompli les œuvres de son Père et notre Père, il est celui en qui ne se trouve aucun mal, et il a été condamné pour cela, ce qui en soi est une injustice ! Condamné pour avoir été radicalement sans péché, parfaitement juste.

Pour l’heure, nul ne l’a perçu, mais c’est de cela que l’Esprit saint va convaincre le monde. Parce qu’il n’a pas cru en lui — rappelons-nous : « croyez au moins à cause de mes œuvres », disait Jésus (Jn 14, 11), c’est-à-dire a cause de mon accomplissement de l’enseignement du Père, de mes œuvres de justice.

Rejeter le juste est s’avérer être soi-même pécheur et injuste. Tel est le fait du monde, jugé par sa propre injustice. C’est ce que va bientôt dévoiler la croix, par laquelle Jésus va partir, dévoilement dont la compréhension sera le don de l’Esprit saint, qui sera la consolation des disciples et la source de leur participation à la vie divine.


RP, 19.05.2020
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À suivre jeudi 21 mai à 10h30,
ici, Culte régional de l'Ascension :


lundi 18 mai 2020

"Il rendra lui-même témoignage de moi"



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Jean 15, 26 – 16, 4a
26 « Lorsque viendra le Paraclet que je vous enverrai d’auprès du Père, l’Esprit de vérité qui procède du Père, il rendra lui-même témoignage de moi ;
27 et à votre tour, vous me rendrez témoignage, parce que vous êtes avec moi depuis le commencement.

1 « Je vous ai dit tout cela afin que vous ne succombiez pas à l’épreuve.
2 On vous exclura des assemblées. Bien plus, l’heure vient où celui qui vous fera périr croira présenter un sacrifice à Dieu.
3 Ils agiront ainsi pour n’avoir connu ni le Père ni moi.
4 Mais je vous ai dit cela afin que, leur heure venue, vous vous rappeliez que je vous l’avais dit.

*



« Je vous enverrai d’auprès du Père l’Esprit de vérité qui procède du Père ». Jésus s’adresse ici à ses Apôtres. C’est une parole qui cependant, concerne aussi ceux qui suivront, recevant la parole des Apôtres — parmi lesquels nous sommes, car, dit Jésus, « l’Esprit de vérité qui procède du Père rendra lui-même témoignage de moi ».

« Il rendra lui-même témoignage de moi », y compris de choses incompréhensibles, à commencer par la Croix et à continuer par Noël et par toute la vie du Christ, que l’Esprit saint fait découvrir comme sagesse plus sage que le monde.

Une vérité inaccessible comme telle aux plus hautes intelligences tant l’humilité de Dieu est au-delà de toute attente, comme il était incompréhensible que Jésus mourût — et qu’il sera toujours difficile de comprendre que l’on puisse être rejeté, voire persécuté, pour n’être que témoin d’un amour plus fort que le monde, mais qui dérange au point que les persécuteurs sont persuadés de bien faire, de sauver un désordre établi réputé venir de Dieu même !

Au jour où Jésus prononce ces paroles annonçant l’Esprit de vérité à ses disciples, il est à la veille de sa mort, qu’ils ne pourront pas comprendre avant que l’Esprit ne les y guide, ne leur fasse découvrir que Dieu se donne où on ne l’attend pas : dans ce qui étant le plus humble, est plus haut que le monde.

À présent, la vérité, dont nous sommes loin, s’est approchée, rendue toute proche de nous, venue parmi nous et en nous par l’Esprit de vérité, pour nous ouvrir à toute consolation, au moment même où nous sommes en butte à l’incompréhension : notre faiblesse, celle de notre intelligence qui ne peut saisir tous les paramètres de ce qui fonde nos êtres, celle de nos maigres vertus, est la faiblesse dans laquelle s’accomplit la puissance de Dieu. Car sa puissance s’accomplit dans la faiblesse, pour que nous le recherchions dans ce qui est humble, cette sagesse cachée dans l’humilité de notre prochain, dévoilé à nous en Jésus humble et mourant, lui parole éternelle glorifiée de la sorte, de sorte que tout genou fléchisse devant le Crucifié !


RP, 18.05.2020
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dimanche 17 mai 2020

"Il demeure auprès de vous et il est en vous"


Culte et prédication in extenso
ici, D'un autre côté :
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Jean 14, 15-21 (et Ac 8, 5-8.14-17 ; 1 P 3, 15-18)
15 « Si vous m’aimez, vous vous appliquerez à observer mes commandements ;
16 moi, je prierai le Père : il vous donnera un autre Paraclet qui restera avec vous pour toujours.
17 C’est lui l’Esprit de vérité, celui que le monde est incapable d’accueillir parce qu’il ne le voit pas et qu’il ne le connaît pas. Vous, vous le connaissez, car il demeure auprès de vous et il est en vous.
18 Je ne vous laisserai pas orphelins, je viens à vous.
19 Encore un peu, et le monde ne me verra plus ; vous, vous me verrez vivant et vous vivrez vous aussi.
20 En ce jour-là, vous connaîtrez que je suis en mon Père et que vous êtes en moi et moi en vous.
21 Celui qui a mes commandements et qui les observe, celui-là m’aime : or celui qui m’aime sera aimé de mon Père et, à mon tour, moi je l’aimerai et je me manifesterai à lui. »

*



Relation étrange que celle de l'Esprit et des disciples. Jésus le leur annonce : vous connaîtrez l'Esprit… parce que vous le connaissez déjà. Vous vivrez de l'Esprit parce que vous en vivez déjà ! C'est là rien d'autre que ce que ce que disent les v. 16-17 : « le Père vous donnera… l'Esprit de vérité… [cela parce que contrairement au monde,]… vous le connaissez, parce qu'il demeure près de vous et qu'il sera [ou : parce qu'il est] en vous »

L'Esprit vous est donné, à vous en qui il demeure. Étrange ? Donné à ceux avec qui il demeure déjà, contrairement au « monde », c’est à dire à « l’apparence » — que connote le mot employé, « cosmos », qui a donné « cosmétique » —, le monde apparent donc, qui lui ne peut pas le recevoir, parce qu'il ne le connaît pas.

Est au bénéfice de l'Esprit — celui, celle, qui garde la parole de Jésus et qui, donc, est aimé du Père. Le Père et le Fils habitent en lui, elle — c'est cela le don de l'Esprit. Qui ne l’aime pas, c'est là ce qu'il appelle « le monde », ne garde pas ses paroles, étranger donc à l'Esprit. Le rapport donc est étroit entre l'Esprit de Jésus, qui est le lien au Père et au Fils, — et concrètement l'obéissance à sa parole, à ses commandements (v. 21).


C'est là la racine, en quelque sorte, de la vie de l'Esprit, un souffle humble et discret. Ce souffle de l'Esprit est répandu abondamment, comme la semence de la parabole du semeur, image de l'effusion de la Parole et de l'Esprit. Et comme le large ensemencement du semeur ne préjuge en rien de la récolte, la semence de la Parole et de l'Esprit ne préjuge pas de la germination et de l'éclosion de son fruit.

C'est de celui que nous prions, Dieu, que dépend la suite des choses, comme les Samaritains recevant l’Esprit saint, dans le texte des Actes des Apôtres, ch. 8, que nous venons d’entendre. Que vienne le jour de la promesse de Jésus : « vous recevrez l'Esprit de vérité parce que vous le connaissez, qu'il demeure en vous ». Et voici comment nous savons que nous l'avons connu, que par cet Esprit nous avons connu le Christ : c'est en gardant ses commandements — certes dans l’humilité de notre cheminement. Car dans l'Esprit qui ouvre aux nations l'accès à l'alliance, la Torah demeure le vis-à-vis par lequel la responsabilité qui ressort de notre liberté d'enfants de Dieu s'exerce dans l'humilité, à l’imitation de Jésus, comme l’enseigne la 2e épître de Pierre au ch. 3 que nous avons entendu.

Il est l'Esprit de vérité ; « celui qui dit : je l'ai connu et qui ne garde pas ses commandements est un menteur », dit la 1ère Épître de Jean (1 Jn 2, 4). Voilà qui nous contraint tous à l'humilité : qui de nous prétendra le connaître ? Notre connaissance, à la mesure de notre amour, n'est jamais que partielle, embryonnaire. Notre participation à l'Esprit de Dieu, n'est jamais que prémisse, que participation à une promesse.

C'est ainsi que, comme à des enfants, à chacun de nous s'adresse la promesse du Christ : « vous recevrez l'Esprit ». Comme les enfants, nous ne connaissons que partiel­lement, et c'est, seule, cette connaissance partielle, qui fonde notre espérance d'une plénitude toujours à venir, notre espérance de voir jaillir de nos cœurs les fleuves d'eau vive du Royaume éternel : « qui croit en moi, annonce Jésus, des fleuves d'eau vive jailliront de son sein » (Jn 7, 38). « Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi et qu'il boive » (Jn 7, 37).


RP, 17.05.2020
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Culte et prédication in extenso
ici, D'un autre côté :


samedi 16 mai 2020

"Pas de ce monde"


Et demain dimanche, culte
ici, D'un autre côté :

et sur RCF à 9h15,
la parole du dimanche, ici
PDF ici

Jean 15, 18-21
18 « Si le monde vous hait, sachez qu’il m’a haï le premier.
19 Si vous étiez du monde, le monde aimerait ce qui lui appartiendrait ; mais vous n’êtes pas du monde : c’est moi qui vous ai mis à part du monde et voilà pourquoi le monde vous hait.
20 Souvenez-vous de la parole que je vous ai dite : “Le serviteur n’est pas plus grand que son maître” ; s’ils m’ont persécuté, ils vous persécuteront vous aussi ; s’ils ont observé ma parole, ils observeront aussi la vôtre.
21 Tout cela, ils vous le feront à cause de mon nom, parce qu’ils ne connaissent pas celui qui m’a envoyé.

*



« Si vous étiez du monde, le monde aimerait ce qui lui appartiendrait ». Ayant entendu de Jésus cet enseignement, vous êtes censés savoir, dit Jésus, que « vous n'êtes pas de ce monde »… comme je n’en suis pas et en serai donc expulsé !

Comme la souffrance subie est signe d’étrangeté au monde, sachez, au moment où « comme ils m’ont persécuté, ils vous persécuteront vous aussi », que ceux qui font souffrir, qui méprisent, le font parce qu'ils se croient du monde, qu’ils croient y être à leur place ! Quel est en effet le motif commun pour persécuter, ou mépriser quelqu'un ? Tout simplement penser qu'il n'est pas à sa place avec nous, pas à sa place en un lieu que l’on appelle chez nous — chez nous, c'est-à-dire, finalement, où, sinon en ce monde ? Expulsé… c’est ce qui arrivé à Jésus, expulsé d’un monde, expulsé par un monde qui a jugé que Jésus n’y avait finalement pas sa place, expulsé jusqu’à la croix…

Et là, c'est Jésus qui console tout rejeté en lui rappelant : « tu n'es pas de ce monde, comme moi je ne suis pas du monde. Si tu étais du monde, le monde aimerait ce qui est à lui ». Mais voilà, en attendant l'entrée concrète, vécue, dans cette consolation que procure Jésus, subsiste la douleur. Car avant d'en arriver là, à cette consolation, il est tout un cheminement, — c'est le cheminement de la prière… cheminement de précarité, selon que l’étymologie de notre mot français pour prière est le mot latin pour précaire, precarius.

Jésus tient à le rappeler à ses disciples : « Souvenez-vous de la parole que je vous ai dite : “Le serviteur n’est pas plus grand que son maître” ; s’ils m’ont persécuté, ils vous persécuteront vous aussi » — et cela « à cause de mon nom, parce qu’ils ne connaissent pas celui qui m’a envoyé », le Père, qui dévoile en Jésus crucifié que pour être en ce monde, on n’est pourtant pas de ce monde. Nous sommes en un temps provisoire, c’est l’enseignement qui est au cœur de la parole que nous sommes appelés à garder, et qui elle, est de l’éternité.


RP, 16.05.2020
En direct sur RCF Poitou à 8H45

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vendredi 15 mai 2020

"Comme je vous ai aimés"



PDF ici

Jean 15, 12-17
12 Voici mon commandement : que vous vous aimiez les uns les autres comme je vous ai aimés.
13 Personne n'a de plus grand amour que celui qui se défait de sa vie pour ses amis.
14 Vous, vous êtes mes amis si vous faites ce que, moi, je vous commande.
15 Je ne vous appelle plus esclaves, parce que l'esclave ne sait pas ce que fait son maître. Je vous ai appelés amis, parce que je vous ai fait connaître tout ce que j'ai entendu de mon Père.
16 Ce n'est pas vous qui m'avez choisi, c'est moi qui vous ai choisis et institués pour que, vous, vous alliez, que vous portiez du fruit et que votre fruit demeure ; afin que le Père vous donne tout ce que vous lui demanderez en mon nom.
17 Ce que je vous commande, c'est que vous vous aimiez les uns les autres.

*



« Mon commandement : que vous vous aimiez les uns les autres comme je vous ai aimés », dit Jésus — « Comme le Père m'a aimé, moi aussi je vous ai aimés ». L’amour de Jésus pour les siens est celui de Dieu à son égard. Il est comme la sève, don de Dieu, qui coule du cep dans les sarments et leur fait porter du fruit, puisque ces paroles développement ce que Jésus vient de dire sur la vigne.

Là s'explique la profondeur de l'annonce : « je vous appelle amis, parce que tout ce que j'ai entendu auprès de mon Père, je vous l'ai fait connaître. » Jésus s'est donné, a tout donné, allant au bout de l'amour et du don… — rappelez-vous :  « tout ce que vous demanderez vous sera accordé. » Tout ! Il va jusqu’au bout de la réponse d'amour.

Nous sommes alors conduits au cœur du mystère de la création et s'explique ipso facto ce qu'il faut entendre par ce commandement paradoxal, lié à ce qu'aimer semble pourtant ne pas se commander : « ce que je vous commande, c'est de vous aimer les uns les autres. » Eh bien le don de Jésus fait entrer dans le mystère du don de Dieu produisant la création dans une souffrance mystérieuse, dévoilant son mystère comme celui de se donner. Et nous sommes invités à entrer dans ce mystère, pour une radicale conversion intérieure, retour intérieur, méditation de la beauté de l'acte créateur comme don — « quand tu pries entre dans la chambre de ton intimité » — pour y découvrir la sève de tout bon fruit. Aimer est la seule chose dont on ne puisse pas la faire en faisant semblant.

On peut accomplir tous les commandements et rites sans que notre cœur soit impliqué. Pour aimer, ce n'est pas possible : cela implique forcément tout l'être. D'où ce commandement d'imiter Dieu — « comme je vous ai aimés, c'est-à-dire comme le Père m'a aimé » — qui revient à un appel à plonger au cœur du mystère de Dieu, qui est le cœur de notre être : alors la vérité de l'amour en découlera comme la sève coule du cep dans les sarments.


RP, 15.05.2020
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jeudi 14 mai 2020

"Comme le Père m'a aimé, moi aussi, je vous ai aimés"



PDF ici

Jean 15, 9-17
9 Comme le Père m'a aimé, moi aussi, je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour.
10 Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme moi j'ai gardé les commandements de mon Père et je demeure dans son amour.
11 Je vous ai parlé ainsi pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit complète.
12 Voici mon commandement : que vous vous aimiez les uns les autres comme je vous ai aimés.
13 Personne n'a de plus grand amour que celui qui se défait de sa vie pour ses amis.
14 Vous, vous êtes mes amis si vous faites ce que, moi, je vous commande.
15 Je ne vous appelle plus esclaves, parce que l'esclave ne sait pas ce que fait son maître. Je vous ai appelés amis, parce que je vous ai fait connaître tout ce que j'ai entendu de mon Père.
16 Ce n'est pas vous qui m'avez choisi, c'est moi qui vous ai choisis et institués pour que, vous, vous alliez, que vous portiez du fruit et que votre fruit demeure ; afin que le Père vous donne tout ce que vous lui demanderez en mon nom.
17 Ce que je vous commande, c'est que vous vous aimiez les uns les autres.

*



Jésus développe ici le propos qu’il vient de donner sur la vigne et les sarments pour dire la relation des disciples avec lui comme étant d’un ordre similaire à celui de la sève passant de la vigne aux sarments…

Où la vigne devient le signe, carrefour de la rencontre entre Dieu et son peuple, signe de son amour, en Jésus dont ceux qu’il appelle ses amis sont appelés à vivre — et à le partager. Dieu recueille la joie en son peuple, Israël, bientôt élargi aux nations, comme le peuple trouve la joie en son Dieu, une joie comme celle que procure le fruit de la vigne qui coule en abondance.

« Que je chante pour mon ami le chant du bien-aimé et de sa vigne, dit le livre d’Ésaïe (ch. 5, v. 1) : Mon bien-aimé avait une vigne sur un coteau plantureux ». Un poète arabe, 'Omar Ibn al-Faridh, dira la force symbolique de cette vigne en ces termes : « Nous avons bu à la mémoire du Bien-Aimé un vin qui nous a enivrés avant la création de la vigne » ('Omar Ibn al-Faridh, Khamriya) — en écho au Cantique des Cantiques.

Dans notre texte, la rencontre de la joie se donne en celui, Jésus, qui se présente dès lors comme l’époux du Cantique des Cantiques, en cette noce dont le peuple est la fiancée ; et comme le Cep, la vigne qui réjouit Dieu, et par laquelle Dieu réjouit les siens.

De lui s’écoule le vin nouveau promis, ce vin, l’amour de Dieu, vin nouveau plus ancien que le monde et qui nous est donné comme signe de son sang qui irrigue l’univers, et nous fait vivre — comme la sève coule du Cep dans les sarments, de sorte que nous portions nous-mêmes ce fruit qui réjouit Dieu dans l’Éternité. Pour une joie complète.

Pour cela, « demeurez dans mon amour » comme « je demeure dans l’amour du Père ». Concrètement, en « gardant mes commandements, comme moi j'ai gardé les commandements de mon Père » — par le don de l’Esprit saint, comme don d’une sève, vie du Père qui de moi coule en vous…


RP, 14.05.2020
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mercredi 13 mai 2020

"Je suis la vraie vigne"



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Jean 15, 1-8
1 Je suis la vraie vigne et mon Père est le vigneron.
2 Tout sarment qui, en moi, ne porte pas de fruit, il l’enlève, et tout sarment qui porte du fruit, il l’émonde, afin qu’il en porte davantage encore.
3 Déjà vous êtes émondés par la parole que je vous ai dite.
4 Demeurez en moi comme je demeure en vous ! De même que le sarment, s’il ne demeure sur la vigne, ne peut de lui-même porter du fruit, ainsi vous non plus si vous ne demeurez en moi.
5 Je suis la vigne, vous êtes les sarments : celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là portera du fruit en abondance car, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire.
6 Si quelqu’un ne demeure pas en moi, il est jeté dehors comme le sarment, il se dessèche, puis on les ramasse, on les jette au feu et ils brûlent.
7 Si vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, vous demanderez ce que vous voudrez, et cela vous arrivera.
8 Ce qui glorifie mon Père, c’est que vous portiez du fruit en abondance et que vous soyez pour moi des disciples.

*



Vigne et vigneron. C’est une image classique par laquelle les prophètes désignaient la relation de Dieu avec son peuple, qui était alors centrée sur le Temple de Jérusalem. On y montait régulièrement en pèlerinage. Au moment où l’Évangile situe cette conversation de Jésus et de ses disciples, on est en plein dans une de ces périodes de pèlerinage. Pèlerinage important, le plus important, celui de Pessah, la Pâque, par laquelle on commémore la libération de l’esclavage — de tous les esclavages, de tous nos esclavages.

Quant aux vignes, cela tombe donc à peu près en la période qui précède la Pâque. C’est-à-dire celle de la fin de la taille. La taille sur la fin, on brûle les sarments que l’on a coupés et qui ont séché, les premières pousses apparaissent. C’est là le décor qui entoure notre texte. Entre la vigne et Temple, le rapport est souligné en ce que sur les portes du Temple d’alors, le Temple d’Hérode, est sculpté un cep, justement, qui symbolise bien ce qu’il en est classiquement : Israël est la vigne, Dieu est le vigneron, leurs rapports se nouent au Temple. Ainsi quand Jésus leur dit : « Moi je suis la vraie vigne », les disciples ont tout lieu de comprendre qu’il s’agit d’une chose importante, en tout cas troublante, dont il parle.

Sachant que déjà en soi, avant même leur signification symbolique autour du Temple ou du corps de Jésus, le fruit de la vigne, le vin, et la vigne qui le porte sont dans la Bible signes de bénédiction. Cultiver sa vigne, en boire le vin, tel est, pour une bonne part, le bonheur, selon la Bible. Ainsi le dit l’Ecclésiaste : « Va, mange avec joie ton pain et bois de bon cœur ton vin, car déjà Dieu a agréé tes œuvres » (Ecc 9, 7).

Déjà ce qui porte du bon fruit est émondé, taillé. Le fruit sera bon, c'est sûr, parce que la sève du bon cep coule dans les sarments déjà émondés. Se profile le Temple éternel, bientôt donné dans le signe du Christ ressuscité.


RP, 13.05.2020
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mardi 12 mai 2020

"Je vous donne ma paix"



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Jean 14, 27-31a
27 Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. Ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne. Que votre cœur cesse de se troubler et de craindre.
28 Vous l’avez entendu, je vous ai dit : “Je m’en vais et je viens à vous.” Si vous m’aimiez, vous vous réjouiriez de ce que je vais au Père, car le Père est plus grand que moi.
29 Je vous ai parlé dès maintenant, avant l’événement, afin que, lorsqu’il arrivera, vous croyiez.
30 Désormais, je ne m’entretiendrai plus guère avec vous, car le prince de ce monde vient. Certes, il n’a en moi aucune prise ;
31 mais de la sorte le monde saura que j’aime mon Père et que j’agis conformément à ce que le Père m’a prescrit.

*



Nous ne sommes pas à la mesure de la hauteur des paroles et des actes de Jésus ? Rien d'angoissant à cela. Chacun, chacune à sa mesure, précisément. C'est pourquoi, « que votre cœur cesse de se troubler et de craindre » – « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. » Ma parole portera son fruit, par mon Esprit, l'Esprit du Père, qui est l'amour qu'il vous porte par sa parole, ma parole qui habite en vous — et porte déjà son fruit.

La parole qu'il nous faut garder est à vivre par chacune et chacun comme il est, chacun à sa mesure, par le don de l'Esprit consolateur, chacun comme il est, à la mesure de l'humble possibilité d'empathie de chacun. Se mettre à la place d'autrui dans une humble mesure, ne pas en vouloir à celui, celle, que Jésus a aimé — « pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu'ils font » (Luc 23, 34).

C'est ce que le romancier Albert Cohen a appelé « tendresse de pitié » — comme une ouverture à la bonté. D'autant que la vie est brève et que comme toi, dit-il, ton prochain est voué à la mort. Et puis, « si tu sais que l'autre, écrit-il, ne peut être que ce qu'il est, comment lui en vouloir, comment ne pas lui pardonner ? […] Tu considéreras alors cet innocent avec une tendresse de pitié, et tu n'y auras nul mérite » (Albert Cohen, Carnets 1978, p. 174).

À l’heure où s’approche la croix, à l’heure où déjà celui qui « n’a en moi aucune prise », « le prince de ce monde vient » ; cette façon humble de suivre Jésus, déjà de loin, comme, au mieux, ceux des disciples présents à la croix, est la voie de ce qui a été appelé l'Imitatio Dei, l’imitation de Dieu, qui a compassion de toi, qui fait pleuvoir sur tous et briller son soleil sur tous, sans aucun mérite de notre part. Ainsi, « Si vous m’aimez, réjouissez-vous de ce que je vais au Père, car le Père est plus grand que moi ».

Alors la parole gardée commence à porter son fruit. Ce n'est pas un fardeau accablant que garder sa parole — « je vous donne ma paix » : c'est juste apprendre que dans la brièveté de la vie, faite de tant de misères, il n'y a pas de place ni de temps pour ne pas s'ouvrir à la bonté.


RP, 12.05.2020
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