mardi 12 mai 2020

"Je vous donne ma paix"



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Jean 14, 27-31a
27 Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. Ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne. Que votre cœur cesse de se troubler et de craindre.
28 Vous l’avez entendu, je vous ai dit : “Je m’en vais et je viens à vous.” Si vous m’aimiez, vous vous réjouiriez de ce que je vais au Père, car le Père est plus grand que moi.
29 Je vous ai parlé dès maintenant, avant l’événement, afin que, lorsqu’il arrivera, vous croyiez.
30 Désormais, je ne m’entretiendrai plus guère avec vous, car le prince de ce monde vient. Certes, il n’a en moi aucune prise ;
31 mais de la sorte le monde saura que j’aime mon Père et que j’agis conformément à ce que le Père m’a prescrit.

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Nous ne sommes pas à la mesure de la hauteur des paroles et des actes de Jésus ? Rien d'angoissant à cela. Chacun, chacune à sa mesure, précisément. C'est pourquoi, « que votre cœur cesse de se troubler et de craindre » – « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. » Ma parole portera son fruit, par mon Esprit, l'Esprit du Père, qui est l'amour qu'il vous porte par sa parole, ma parole qui habite en vous — et porte déjà son fruit.

La parole qu'il nous faut garder est à vivre par chacune et chacun comme il est, chacun à sa mesure, par le don de l'Esprit consolateur, chacun comme il est, à la mesure de l'humble possibilité d'empathie de chacun. Se mettre à la place d'autrui dans une humble mesure, ne pas en vouloir à celui, celle, que Jésus a aimé — « pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu'ils font » (Luc 23, 34).

C'est ce que le romancier Albert Cohen a appelé « tendresse de pitié » — comme une ouverture à la bonté. D'autant que la vie est brève et que comme toi, dit-il, ton prochain est voué à la mort. Et puis, « si tu sais que l'autre, écrit-il, ne peut être que ce qu'il est, comment lui en vouloir, comment ne pas lui pardonner ? […] Tu considéreras alors cet innocent avec une tendresse de pitié, et tu n'y auras nul mérite » (Albert Cohen, Carnets 1978, p. 174).

À l’heure où s’approche la croix, à l’heure où déjà celui qui « n’a en moi aucune prise », « le prince de ce monde vient » ; cette façon humble de suivre Jésus, déjà de loin, comme, au mieux, ceux des disciples présents à la croix, est la voie de ce qui a été appelé l'Imitatio Dei, l’imitation de Dieu, qui a compassion de toi, qui fait pleuvoir sur tous et briller son soleil sur tous, sans aucun mérite de notre part. Ainsi, « Si vous m’aimez, réjouissez-vous de ce que je vais au Père, car le Père est plus grand que moi ».

Alors la parole gardée commence à porter son fruit. Ce n'est pas un fardeau accablant que garder sa parole — « je vous donne ma paix » : c'est juste apprendre que dans la brièveté de la vie, faite de tant de misères, il n'y a pas de place ni de temps pour ne pas s'ouvrir à la bonté.


RP, 12.05.2020
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