samedi 26 novembre 2011

Sacrés portraits



Que ce soit le Christ, tel ou tel prophète, ou a fortiori Dieu, le commandement biblique interdisant de les représenter fait précisément, et de celui qui s’en prend à des images et de celui qui s’en offusque, un idolâtre lui-même, que ces images soient caricaturales, souillantes ou tout ce qu’on voudra.



« Tu ne te feras point d’image, ni de représentation quelconque des choses qui sont en haut dans les cieux, en bas sur la terre, et dans les eaux plus bas que la terre. Tu ne te prosterneras pas devant ces choses-là et tu ne les serviras pas ; je suis le Seigneur ton Dieu » (Exode 20, 4-5).

Le Christ, Dieu, ou quelque personnage religieux que ce soit n’est en aucun cas atteint par la caricature : ce n’est là jamais qu’un bout de papier, un bout de bois, une figure virtuelle, ou que sais-je...

Ésaïe se moquant des idolâtres l’avait bien compris. Gageons qu’aujourd’hui, il risquerait toujours sa peau ! « Blasphème » ! pour avoir dit que l'objet de vénération de l’idolâtre est un morceau de bois. « Il brûle au feu la moitié de son morceau de bois, avec cette moitié il cuit de la viande, Il apprête un rôti, et se rassasie ; il se chauffe aussi, et dit : Ha ! Ha ! Je me chauffe, je vois la flamme ! Et avec le reste il fait un dieu, son idole, il se prosterne devant elle, il l’adore, il l’invoque, Et s’écrie : Sauve-moi ! Car tu es mon dieu ! Ils n’ont ni intelligence, ni entendement » (Ésaïe 44, 16-18).

Après, il y a une marge entre se ridiculiser par une manifestation inutile à propos d’images profanées et l’acte violent, la menace physique ou son exécution !… Passage où l’idolâtre devient meurtrier…

RP



jeudi 24 novembre 2011

Psaumes. Relectures et transpositions




I

Entre joie et silence


D’abord, il y a la sortie d’Égypte. Et un chant de triomphe à la gloire de Dieu…

Exode 15
1 Alors, avec les fils d'Israël, Moïse chanta ce cantique au SEIGNEUR. Ils dirent :
« Je veux chanter le SEIGNEUR,
il a fait un coup d'éclat.
Cheval et cavalier,
en mer il les jeta.
2 Ma force et mon chant, c'est le SEIGNEUR.
Il a été pour moi le salut.
C'est lui mon Dieu, je le louerai ;
le Dieu de mon père, je l'exalterai.
3 Le SEIGNEUR est un guerrier.
Le SEIGNEUR, c'est son nom.
4 Chars et forces du Pharaon,
à la mer il les lança.
La fleur de ses écuyers
sombra dans la mer des Joncs.
5 Les abîmes les recouvrent,
ils descendirent au gouffre comme une pierre.
6 Ta droite, SEIGNEUR,
éclatante de puissance,
ta droite, SEIGNEUR,
fracasse l'ennemi.

[…]


Un Psaume d’Exode — à l’inverse des Psaumes d’exil (cf. Ps 137).

Aucune institution des chantres au livre de l’Exode.


L’institution des chantres, parmi les lévites — relève du temps de la royauté :

1 Chroniques 6
31 Voici ceux que David établit pour la direction du chant dans la maison de l’Eternel, depuis que l’arche eut un lieu de repos:
32 ils remplirent les fonctions de chantres devant le tabernacle, devant la tente d’assignation, jusqu’à ce que Salomon eût bâti la maison de l’Eternel à Jérusalem, et ils faisaient leur service d’après la règle qui leur était prescrite.


1 Chroniques 15:16 Et David dit aux chefs des Lévites de disposer leurs frères les chantres avec des instruments de musique, des luths, des harpes et des cymbales, qu’ils devaient faire retentir de sons éclatants en signe de réjouissance.


En revanche, l’exil est d’abord le temps du deuil : s’il y a des chants, ce sont des complaintes… Cf. Ps 137 :

1 Auprès des fleuves de Babylone,
Là nous étions assis et nous pleurions En nous souvenant de Sion.
2 Aux saules de la contrée
Nous avions suspendu nos harpes.
3 Là, nos vainqueurs nous demandaient des cantiques, Et nos bourreaux de la joie :
Chantez-nous quelques-uns des cantiques de Sion !
4 Comment chanterions-nous le cantique du SEIGNEUR
Sur un sol étranger ?
5 Si je t'oublie, Jérusalem, Que ma droite m'oublie !

[…]


Selon la tradition juive, le chant de triomphe de la sortie d’Egypte (Exode 15) est mal venu : Dieu le déplore : mes créatures viennent d’être englouties et vous chantez !

S’il y a musique, elle est portée à être aussi empreinte de nostalgie.

Aux temps modernes, cela se traduit du gospel au blues et inversement…


II

Royauté messianique et nostalgie


Si l’institution des chantres et le recueil des Psaumes relève de la royauté — les Psaumes de David —, on se trouve avec une royauté chargée d’une visée eschatologique — messianique.

Le roi est messie/oint et vise un roi à la fois juste et incontesté. Le Messie attendu. Où les Psaumes royaux sont aussi empreints de nostalgie.

Apparaît un autre sens des chants guerriers, des chants de triomphe, où du cœur de la faiblesse du roi jaillit la marque nostalgique d’un autre combat, d’autres victoires que celle qui engloutit les Égyptiens…



Lutte avec Dieu et combat contre le mal
« Ce n’est pas contre la chair et le sang
que nous avons à lutter » (Ep 6, 12)

Les Psaumes – Louanges
Livre de prières communes et de lutte avec Dieu

(2) 24 novembre 2011 - Relectures et transpositions

R.P., KT Adultes, Antibes 2011-2012



lundi 21 novembre 2011

Communion luthérienne et réformée



Extrait du rapport du synode Sud-Ouest 2011 de l'Eglise réformée de France...

L’un des événements-clés de l’histoire contemporaine ayant abouti, en 1973, au texte fondamental de la Concorde de Leuenberg sur lequel s’appuient largement les justifications théologiques et ecclésiologiques du processus d’union entre nos deux Églises actuelles :

"Face à la montée du nazisme, en 1933 et la mise en place, par le régime hitlérien des « chrétiens allemands », une Église nationale qui lui est inféodée...


... plusieurs pasteurs et laïcs protestants s’organisent en une « Église confessante ». Des séminaires clandestins ont lieu pour contrer l’enseignement théologique officiel, et, le 29 mai 1934, le synode adopte ce qui sera appelé la « confession de Barmen » pour servir de base doctrinale à l’Église confessante. Ses principales orientations se retrouveront en France en 1941 dans « les thèses de Pomeyrol ». C’est donc dans ces circonstances sociopolitiques tragiques que l’unité entre luthériens et réformés s’est imposée comme un impératif, reléguant au second plan les désaccords théologiques jugés non comme dépassés, mais secondaires, eu égard à la mission de l’Église de proclamer l’Évangile dans le monde. Ainsi, l’un des principes majeurs énoncés dans la Confession de Barmen est de reconnaître « la souveraineté de son seul Seigneur, l’Église une, et l’unité fondamentale de sa foi… nonobstant ses origines luthériennes, réformées ou unies ». L’idée majeure énoncée ici, et qui nous concerne encore directement quelques quatre-vingts ans plus tard, consiste à affirmer qu’il peut légitimement y avoir une communion entre les Églises malgré une expression de la foi différente, médiatisée par des confessions de foi différentes, principalement la Confession d’Augsbourg pour les luthériens et la Confession de La Rochelle pour les réformés.

Après la Seconde Guerre mondiale, ce principe ne sera pas mis en cause, même si d’autres questions, notamment le lien entre communion ecclésiale et communion eucharistique continueront, jusqu’à nos jours, de susciter le débat. C’est sur cette base de la communion ecclésiale que la Communion de Leuenberg peut postuler la pleine reconnaissance des ministères entre nos Églises aujourd’hui avec, en corollaire, la nécessité pour elles de traduire ces avancées théologiques sur le plan institutionnel."



mardi 8 novembre 2011

Du « non » de Jonas, un « oui » est-il possible ?




Le livre de Jonas est proposé à nos méditations de ce mois de novembre. Jonas ressemble au premier fils de la parabole des deux fils (Matt 21:28-32). Comme lui, il dit « non », puis, non sans traîner les pieds, finit par obéir…

Ce « non » qui précède l’acceptation quand même et malgré tout, fait écho au livre de l’Ecclésiaste : « Moi, je déclare les morts plus heureux d’être déjà morts que les vivants d’être encore vivants, mais mieux encore que les uns et les autres celui qui n’a pas encore existé et qui n’a pas vu l’œuvre mauvaise qui se fait sous le soleil. » (Ecc 4, 2-3)

Selon une tradition juive, lorsque, avant sa venue à l’être, Dieu envoie une âme dans le monde, celle-ci trépigne, résiste, supplie, bref, fait tout pour éviter de s’incarner. Un non semblable à celui de Jonas ou du fils aîné.

En regard de la sagesse de l’Ecclésiaste, donc, le second fils de la parabole, celui qui dit « oui » d’emblée, serait ou un naïf, ou un inconscient, ou un distrait – quelqu’un qui n’a pas pris la mesure des choses. Pardonnons-lui, car il ne sait pas ce qu’il dit ! – et du coup, son « oui » apparemment enthousiaste, est d’emblée voué à tourner court.

Jonas, au fond plus… sérieux, y est allé finalement, et, fût-ce à son désarroi !, Ninive a été sauvée...

Si l’on en croit la tradition nous enseignant la réticence de l’âme à venir en ce monde, nous avons tous dit « non » : Jonas est au fond notre représentant. Tous avons dit « non » ? Il y en a toutefois bien un qui a dit « oui » en connaissance de cause : celui qui nous a rejoints dans notre humanité. C’est ici que tout est renversé, ici que tout devient possible.

Nous voici donc tous avec notre « non » appelés à un acte de confiance à la suite de celui-là seul qui a dit « oui » en connaissance de cause.

Pour nous aussi, quoiqu’il en ressorte, il est alors temps, au-delà de nos refus, d’accepter de répondre à l’appel qui nous est confié.

RP



Jonas 2
1Alors le SEIGNEUR dépêcha un grand poisson pour engloutir Jonas. Et Jonas demeura dans les entrailles du poisson, trois jours et trois nuits.2Des entrailles du poisson, il pria le SEIGNEUR, son Dieu.
3Il dit :
Dans l'angoisse qui m'étreint, j'implore le SEIGNEUR :
il me répond ;
du ventre de la Mort, j'appelle au secours :
tu entends ma voix.
4Tu m'as jeté dans le gouffre au cœur des mers
où le courant m'encercle ;
toutes tes vagues et tes lames
déferlent sur moi.
5Si bien que je me dis : Je suis chassé de devant tes yeux.
Mais pourtant je continue à regarder vers ton temple saint.
6Les eaux m'arrivent à la gorge
tandis que les flots de l'abîme m'encerclent ;
les algues sont entrelacées autour de ma tête.
7Je suis descendu jusqu'à la matrice des montagnes ;
à jamais les verrous du pays — de la Mort — sont tirés sur moi.
Mais de la Fosse tu m'as fait remonter vivant,
ô SEIGNEUR, mon Dieu !
8Alors que je suis à bout de souffle,
je me souviens et je dis : « SEIGNEUR ».
Et ma prière parvient jusqu'à toi,
jusqu'à ton temple saint.
9Les fanatiques des vaines idoles,
qu'ils renoncent à leur dévotion !
10Pour moi, au chant d'actions de grâce,
je veux t'offrir des sacrifices,
et accomplir les vœux que je fais.
Au SEIGNEUR appartient le salut !
11Alors le SEIGNEUR commanda au poisson, et aussitôt le poisson vomit Jonas sur la terre ferme.