mardi 17 mai 2011

La force du sacré et l'institution du sacerdoce lévitique



Nombres 3
1Voici la généalogie d’Aaron et de Moïse, au jour où le SEIGNEUR parla à Moïse au mont Sinaï.
2Voici les noms des fils d’Aaron : Nadab, le premier-né, Abihou, Eléazar et Itamar. 3Voilà les noms des fils d’Aaron, les prêtres ayant reçu l’onction, ceux qui furent investis pour exercer le sacerdoce. 4Nadab et Abihou moururent devant le SEIGNEUR quand ils présentèrent un feu profane devant le SEIGNEUR, dans le désert du Sinaï ; ils n’avaient pas de fils. Eléazar et Itamar exercèrent le sacerdoce sous la surveillance d’Aaron, leur père.
5Le SEIGNEUR dit à Moïse : 6Présente la tribu de Lévi ; tu la mettras à la disposition d’Aaron, le prêtre, pour qu’elle l’assiste. 7Ils assureront le service pour lui et pour toute la communauté devant la tente de la Rencontre : ils accompliront le service de la Demeure.8Ils seront responsables de tous les ustensiles de la tente de la Rencontre et assureront le service pour les Israélites : ils accompliront le service de la Demeure. 9Tu donneras les lévites à Aaron et à ses fils, à titre de « donnés » ; ils lui seront donnés d’entre les Israélites. 10Tu installeras Aaron et ses fils pour qu’ils exercent leur sacerdoce ; le profane qui approchera sera mis à mort.
11Le SEIGNEUR dit à Moïse : 12Moi, j’ai pris les lévites d’entre les Israélites à la place de tous les premiers-nés, de tout Israélite né le premier de sa mère : les lévites m’appartiennent.
13Car tout premier-né m’appartient ; le jour où j’ai frappé tous les premiers-nés en Egypte, je me suis consacré tous les premiers-nés en Israël ; ceux des hommes comme ceux des bêtes m’appartiennent. Je suis le SEIGNEUR (YHWH).
14Dans le désert du Sinaï, le SEIGNEUR dit à Moïse : 15Recense les fils de Lévi famille par famille, clan par clan ; tu recenseras tous les mâles depuis l’âge d’un mois et au-dessus. 16Moïse les recensa sur l’ordre du SEIGNEUR, comme cela lui avait été ordonné.
17Voici quels sont les noms des fils de Lévi : Guershôn, Qehath et Merari. 18Voici les noms des fils de Guershôn, clan par clan : Libni et Shiméi ; 19les fils de Qehath, clan par clan : Amram, Yitsehar, Hébron et Ouzziel ; 20les fils de Merari, clan par clan : Mahli et Moushi. Ce sont là les clans des lévites, famille par famille.
21De Guershôn, le clan de Libni et le clan de Shiméi ; ce sont là les clans des Guershonites. 22Ceux qui furent recensés parmi eux, en comptant tous les mâles depuis l’âge d’un mois et au-dessus, ceux qui furent recensés parmi eux étaient 7 500. 23Les clans des Guershonites campaient derrière la Demeure, à l’ouest. 24Prince de la famille des Guershonites : Eliasaph, fils de Laël. 25Pour ce qui concerne la tente de la Rencontre, les fils de Guershôn étaient responsables de la Demeure : de la tente, de la couverture, du rideau qui est à l’entrée de la tente de la Rencontre, 26des tentures de la cour et du rideau de l’entrée de la cour, tout autour de la Demeure et de l’autel, de tous ses cordages et de tout ce qui en dépend.
27De Qehath, le clan des Amramites, le clan des Yitseharites, le clan des Hébronites et le clan des Ouzziélites ; ce sont là les clans des Qehatites. 28En comptant tous les mâles depuis l’âge d’un mois et au-dessus, il y en eut 8 600 pour assurer le service du sanctuaire. 29Les clans des fils de Qehath campaient sur le côté sud de la Demeure. 30Prince de la famille des clans des Qehatites : Elitsaphân, fils d’Ouzziel. 31Ils étaient responsables du Coffre, de la table, du porte-lampes, des autels, des ustensiles du sanctuaire dont on se sert pour officier, du rideau et de tout ce qui en dépend. 32Prince suprême des lévites : Eléazar, fils d’Aaron, le prêtre ; il avait la surveillance de ceux qui assuraient le service du sanctuaire.
33De Merari, le clan de Mahli et le clan de Moushi ; ce sont là les clans de Merari. 34Ceux qui furent recensés parmi eux, en comptant tous les mâles depuis l’âge d’un mois et au-dessus, étaient 6 200. 35Prince de la famille des clans de Merari : Touriel, fils d’Abihaïl. Ils campaient sur le côté nord de la Demeure. 36Les fils de Merari s’étaient vu confier la responsabilité des planches de la Demeure, de ses barres, de ses colonnes et de ses socles, de tous ses ustensiles et de tout ce qui en dépend, 37des colonnes de la cour, tout autour, de leurs socles, de leurs piquets et de leurs cordages.
38Moïse, Aaron et ses fils campaient devant la Demeure, à l’est, devant la tente de la Rencontre, au levant ; ils assuraient le service du sanctuaire pour les Israélites ; le profane qui approcherait devait être mis à mort.
39Tous les lévites que Moïse et Aaron recensèrent sur l’ordre du SEIGNEUR, clan par clan, tous les mâles depuis l’âge d’un mois et au-dessus, étaient 22 000.

*

Pourquoi tous ces détails, cette organisation stricte de la mise en place du sacerdoce, de ses dignitaires attitrés, de ses rites ?

On est face au divin, au « numineux » pour le dire comme les historiens des religions, face au sacré, à quelque chose de terrible, tremendus en latin, qui fait trembler ! « Nul ne peut voir Dieu et vivre ».

La fonction de la religion est alors là, dans tout le détail de la description du rite et de ses officiants : autant de règles d’approche, pas par n’importe qui, désignant le sacré pour le rencontrer sans le profaner. Des règles à observer minutieusement – ici par les Lévites uniquement - sous peine de voir le sacré déborder dans le recouvrement de son déferlement et de son danger.

Lévitique 10 :
1 Les fils d’Aaron, Nadab et Abihu, prirent chacun un brasier, y mirent du feu, et posèrent du parfum dessus ; ils apportèrent devant l’Eternel du feu étranger, ce qu’il ne leur avait point ordonné.
2 Alors le feu sortit de devant l’Eternel, et les consuma : ils moururent devant l’Eternel.


2 samuel 6 :
1 David rassembla encore toute l’élite d’Israël, au nombre de trente mille hommes.
2 Et David, avec tout le peuple qui était auprès de lui, se mit en marche depuis Baalé-Juda, pour faire monter de là l’arche de Dieu, devant laquelle est invoqué le nom de l’Eternel des armées qui réside entre les chérubins au-dessus de l’arche.
3 Ils mirent sur un char neuf l’arche de Dieu, et l’emportèrent de la maison d’Abinadab sur la colline ; Uzza et Achjo, fils d’Abinadab, conduisaient le char neuf.
4 Ils l’emportèrent donc de la maison d’Abinadab sur la colline ; Uzza marchait à côté de l’arche de Dieu, et Achjo allait devant l’arche.
5 David et toute la maison d’Israël jouaient devant l’Eternel de toutes sortes d’instruments de bois de cyprès, des harpes, des luths, des tambourins, des sistres et des cymbales.
6 Lorsqu’ils furent arrivés à l’aire de Nacon, Uzza étendit la main vers l’arche de Dieu et la saisit, parce que les bœufs la faisaient pencher.
7 La colère de l’Eternel s’enflamma contre Uzza, et Dieu le frappa sur place à cause de sa faute. Uzza mourut là, près de l’arche de Dieu.


Signe que la terreur est présente, à moins que…

Mis en ordre dans la religion, le sacré perd ipso facto quelque chose quelque chose de sa puissance. S’il est institutionnalisé, domestiqué donc, il est moins imprévisible, moins terrible, déjà en marche vers sa profanation et son remplacement. Et on ne profane collectivement que ce qui n’est déjà plus sacré, ou qui est le sacré d’autrui — que ce soit moquerie sur une religion, ses symboles ou ses clercs, ou une institution d’État ou autre personnage royal.

Tel est le paradoxe du rite qui dessine le sacré, l’espace sacré, le temps sacré, le personnage sacré. Mais en lui faisant perdre son trop grand danger, la religion est déjà, comme telle, en route vers sa propre profanation. S’il n’y a plus lieu de trembler, s’il n’y a là, à terme, plus rien de « tremendus », de terrifiant, il n’y a là bientôt plus rien de particulièrement sacré… Au risque de voir la violence rejaillir par un autre biais, décuplée…

C’est la violence qui est à la racine de nos êtres qui est dévoilée dans la violence du sacré, et dans son lien avec le sacrifice. Cette violence qui se déploie par le mimétisme selon la théorie de René Girard, l’imitation du désir des uns par les autres, violence qui débouche sur la guerre de tous contre tous, et qui est évacuée par le sacrifice, la désignation d’un « bouc émissaire », puis l’organisation d’un rituel autour de ce « bouc émissaire », jusqu’au sacrifice animal en lieu et place du sacrifice humain.

La sacrifice humain interdit par la Bible (cf. l’épisode du sacrifice d’Abraham) ouvre sur l’institution des lévites, consacrés en lieu de place des premiers nés (v.11 & 12) qu’il est illégitime de sacrifier ! Les lévites sont alors consacrés au rituel sacrificiel d’évacuation de la violence au cœur de nos êtres, au cœur du sacré, contact terrible avec l’ultime.

Au fond, nul ne peut voir Dieu et vivre… « Personne n’a jamais vu Dieu ; le Fils unique, qui est dans le sein du Père, est celui qui l’a fait connaître. » (Jn 1, 18).

La mort du Christ devient dans cette perspective notre mort par laquelle on rencontre Dieu dans sa résurrection, notre résurrection… Vous être morts avec lui, et ressuscités avec lui, écrit Paul à plusieurs reprises.


R.P., 17.05.11, CP Antibes


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