lundi 20 novembre 2017

Création bonne et acte de foi




« Dieu vit tout ce qu’il avait fait et voici, cela était très bon. » (Genèse 1, 31)

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Genèse 4 :
3 Caïn fit à l’Éternel une offrande des fruits de la terre ;
4 et Abel, de son côté, en fit une des premiers-nés de son troupeau et de leur graisse. L’Éternel porta un regard favorable sur Abel et sur son offrande ;
5 mais il ne porta pas un regard favorable sur Caïn et sur son offrande. Caïn fut très irrité, et son visage fut abattu.
6 Et l’Éternel dit à Caïn : Pourquoi es-tu irrité, et pourquoi ton visage est-il abattu ?
7 Certainement, si tu agis bien, tu relèveras ton visage, et si tu agis mal, le péché se couche à la porte, et ses désirs se portent vers toi : mais toi, domine sur lui.
8 Cependant, Caïn adressa la parole à son frère Abel ; mais, comme ils étaient dans les champs, Caïn se jeta sur son frère Abel, et le tua.


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René Girard : « L’œuvre de Clausewitz [1780-1831 – théoricien allemand de la guerre] est révélatrice de ce que j’appelle un conflit de type mimétique. La France et l’Allemagne veulent la même chose : dominer l’Europe. Après la mort de Charlemagne, ses deux petits-fils, Charles le Chauve et Louis Le Germanique, vont commencer la guerre de jumeaux qui va marquer l’histoire de l’Europe jusqu’à prendre une forme virulente après la victoire de Napoléon à Iéna en 1806 et le réarmement de la Prusse qui mènera aux trois guerres que nous connaissons. C’est pour cela que le geste de réconciliation entre de Gaulle et Adenauer, en 1963 à Reims, est si important. » Interview de René Girard, « L’apocalypse peut être douce » (dans Le Figaro, 8 nov. 2007), à propos de son livre Achever Clausewitz, Champs Flammarion, 2007.

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2 Pierre 3, 3-9 : 3 […] dans les derniers jours, il viendra des moqueurs avec leurs railleries, marchant selon leurs propres convoitises,
4 et disant : Où est la promesse de son avènement ? Car, depuis que les pères sont morts, tout demeure comme dès le commencement de la création.
5 Ils veulent ignorer, en effet, que des cieux existèrent autrefois par la parole de Dieu, de même qu’une terre tirée de l’eau et formée au moyen de l’eau,
6 et que par ces choses le monde d’alors périt, submergé par l’eau,
7 tandis que, par la même parole, les cieux et la terre d’à présent sont gardés et réservés pour le feu, pour le jour du jugement et de la ruine des hommes impies.


René Girard : « Clausewitz a commencé son grand livre, De la guerre, à la fin du règne de Napoléon et il y a travaillé jusqu’à sa mort. En trente ans, il n’a pas réussi à le terminer. Achever Clausewitz, c’est donc essayer de penser le livre dans sa totalité. […] j’ai été frappé par le terme de « montée aux extrêmes » qu’il utilise concernant les rapports guerriers. Cette formule dément l’humanisme des Lumières qui suggère que les rapports normaux entre les hommes sont un peu comme ceux des boules de billard : leur action est prévisible, purement rationnelle. Or Clausewitz, qui est pourtant un homme des Lumières, va mettre en évidence ce qui est implicite dans les rapports humains quand ils deviennent hostiles. Il nous dit des choses fondamentales sur cette loi de l’imitation qui nourrit l’emballement guerrier et peut mener au pire.
[Étant] entrés dans une ère où les moyens de destruction [sont] démesurés, [sommes-nous] assez raisonnables pour ne pas nous en servir [ ? Cf.] l’échec de la politique de l’Occident qui n’a pas réussi à empêcher la prolifération des armes atomiques, comme on le voit avec l’Iran. Ce que Clausewitz a dit au fond sur la « montée aux extrêmes », où le pire peut se produire à travers une violence non maîtrisable, se poursuit donc à mes yeux. C’est la loi même de l’histoire. »
René Girard, « L’apocalypse peut être douce », ibid.

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Parmi les autres conséquences du phénomène mimétique – lu en regard de « l’événement Déluge » comme extension cosmique du premier conflit mimétique (Caïn/Abel) – : exploitation illimitée, en concurrence mimétique, des ressources limitées de la planète, ou la montée en fictif financier qui débouche invariablement sur les crises financières toujours au bord de susciter des guerres menaçant notre survie, au regard des moyens techniques de destruction dont nous nous sommes dotés.

« De toute façon, lorsque la prochaine crise financière globale éclatera (et elle éclatera forcément si, d'ici là, les différents États de la planète ne se sont pas mis d'accord pour mettre définitivement hors d'état de nuire les 29 banques “systémiques” qui tiennent en otage l'économie du globe – et donc, par la même occasion, pour effacer inconditionnellement toutes les dettes qu'ils ont été contraints de contracter auprès de ces aventuriers sans foi ni loi), les effets de l'effondrement en chaîne seront tels – puisque, cette fois, les États surendettés n'auront plus les moyens de se précipiter à nouveau au chevet du système financier mondial – qu'il n'y aura plus guère d'autre possibilité raisonnable, pour l'humanité, de surmonter cette nouvelle catastrophe que de renoncer définitivement à l'utopie absurde d'une accumulation illimitée du capital dans un monde aux ressources naturelles par définition limitées. » Jean-Claude Michéa, dans Michéa-Julliard, La gauche et le peuple, Champs Flammarion, p. 172-173.

Ou Michéa ne fait-il pas preuve d’un trop grand optimisme, au vu de l’histoire passée ?

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La création n’apparaîtrait-elle pas alors plutôt comme un inouï… et redoutable acte de foi ? C’est peut-être ce que suggère le récit biblique de la création tel qu’il s’étend des ch. 1 à 6 de la Genèse, où le monde confié à l’humain est donné comme pouvant, par sa violence, s’autodétruire. Cela via une relecture de cette auto-destruction comme acte de Dieu (Gn 6, 6-7), c’est-à-dire atteignant le point où les choses échappent totalement à notre maîtrise, ouvrant dès lors, via le regret de Dieu d’avoir crée et créant, re-créant quand même, sur la création comme acte de foi valant quand même et malgré tout promesse et alliance (Gn 6, 16 & Gn 9, 9-17).


RP
Les choses de la fin

Église protestante unie de France / Poitiers
Catéchisme pour adultes 2017-2018
Chaque 3e mardi du mois à 14 h 30
& chaque jeudi qui suit le 3e mardi à 20 h 30
2) 21 & 23 novembre - Création bonne et acte de foi (PDF ici)


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