samedi 29 juin 2013

Mais quelle mouche a piqué Fath ?



Etrange article de S. Fath. Le sociologue, qui pour être « évangélique » n’en est pas moins habituellement très… comment dire… « Télérama compatible » (selon l’expression par laquelle lui-même qualifie « les certitudes » des « hommes d’appareil » de l’EPUdF et de la FPF), donne ici l’impression très nette de… se lâcher !… Avec modération toutefois, convoquant d’entrée un élu protestant lyonnais qu’il couvre de compliments… Bons points décernés comme pour dire qu’il ne les octroie pas, oh non !, aux présidents de l’EPUdF et de la FPF…

L’article commence par l’annonce de la « fusion » (sic !) que serait l’ « EPUF ». Avec l’ombre d’un regret : que ce phénomène « minoritaire » (il y insiste à plusieurs reprises) ait été quand même « l'événement protestant du mois [de mai 2013], et l'un des faits majeurs de l'année au sein des Eglises issues de la Réforme » — bien que la chose ait été « "montée en épingle" par ses promoteurs » (l’expression "montée en épingle", pour recevoir des guillemets, n’en est pas moins de S. Fath, qui semble ne pas trop goûter le fait que les luthéro-réformés essaient de leur mieux de prendre la leçon des évangéliques en matière de communication)…

Après cette introduction pour le moins imprécise, et après les bons points décernés à l’élu lyonnais, S. Fath passe donc au cœur de son propos, la « la tentation, jamais démentie chez les protestants français réformés, de préempter l'identité protestante à leur profit ». Pour cela, il attaque vivement… l’AFP !, visant une dépêche pour le moins lamentable, en effet. Le rapport avec l’EPUdF ? On se dit que S. Fath aurait pu se renseigner : l’AFP n’est pas un organe de l’EPUdF, ni de la FPF (elle aussi interpellée) ! Si comme le remarque à juste titre S. Fath, l’AFP a produit une phrase déplorable sur les évangéliques, est-ce forcément à l’EPUdF ou à la FPF d’envoyer « un correctif à l'AFP » ? Pourquoi pas le CNEF, puisqu’il semble que ce soit certains de ses membres qui seraient visés par la dépêche caricaturale, le CNEF ou telle ou telle Eglise évangélique (celle de S. Fath par ex.) ?

Voilà qui me rappelle une récrimination de certains de mes collègues évangéliques souhaitant que l’ERF, désormais EPUdF, soit pour eux l’interface organisant leur participation auprès des catholiques lors de la semaine de l’unité — alors qu’ils sont censés être participants à plein, en tant qu’Eglise souveraine au même titre que l’EPUdF.

Le sociologue, après avoir reproché au président de l’EPUdF de n’avoir pas fait la promotion des évangéliques dans une interview journalistique consacrée à l’union luthéro-réformée, chapitre le prochain président de la FPF (sans prendre en compte que les retranscriptions écrites des deux interviews ne rendent peut-être pas au mieux l’esprit des conversations initiales), lequel tiendrait des propos « mal informés » ; — le sociologue aurait été bien inspiré de s’informer lui-même auprès de ceux qu’il attaque, avant d’écrire sa diatribe, bardée d’inexactitudes dès sa première phrase. Ayant participé à mon humble mesure (à un plan synodal régional) au travail du processus d’union, je peux témoigner de l’insistance avec laquelle on a répété qu’il ne s’agissait pas de « fusion » (terme que S. Fath reprend systématiquement), mais d’union — et qu’il fallait écrire EPUdF (avec un d) et éviter l’abréviation EPUF (que S. Fath reprend à l’envi ici, et dans tous ses articles) : à éviter au motif que ce serait très gênant dans nos relations avec les Eglises allemandes — vu que Epuf y évoquerait… le bordel / Puff ! S. Fath n’est pas obligé de connaître l’allemand, mais enfin, on se renseigne… À moins qu’il n’ait voulu suggérer que la… « bordélique » diversité protestante demeure malgré tout au sein de la nouvelle « fusion » à laquelle il semble pourtant reprocher de l’oblitérer.

J’ajoute une information qui semble aussi avoir échappé à S. Fath : il ne corrige en effet aucun de ses commentateurs qui répètent l’erreur qui veut que la dénomination-même « EPUdF » soit « préemptioniste », entre autres par son « U » : sauf que le « U » de « Unie » répond notamment à une demande des… évangéliques, transmise par le président évangélique de la FPF d’alors : ce « Unie » permet de ne pas risquer de finir par résumer en usage courant le nom de la nouvelle Union en « Eglise Protestante », sachant qu’il y en a d’autres.

À un point de sa lecture, on ne peut s'empêcher de se demander si l’article de S. Fath n'a pas quelque chose d'une saute d’humeur en forme de lapsus révélateur : on est fondé à se demander si la fameuse « préemption réformée » ne relève pas en grande partie d’un fantasme né d’un complexe de minoritaires qui ne se sentent pas suffisamment « Télérama compatibles » (contrairement aux autres « hommes d’appareil », quant à des « certitudes maquillées en doutes », dont ils ne manquent pas d’user aussi à l’occasion comme les autres — une « Télérama compatibilité » souvent réelle, qui ne manque pas de m’agacer aussi).

Finalement, que ressort-il du coup de gueule de S. Fath — qui va jusqu’à friser le point Godwin en convoquant Marine Le Pen en regard de la dépêche déplorable de l’AFP mettant en cause les « populations immigrées » de mouvance pentecôtiste ? Propos de l’AFP effectivement condamnables. Mais à nouveau l’AFP n’est pas un organe de l’EPUdF — dans laquelle, à ma connaissance du moins, on n’a pas trouvé de pasteurs membres du FN, contrairement à ce qui a pu se voir côté évangélique.

Voilà un autre point où il y aurait à balayer chacun devant sa porte, outre le complexe de « préemption » des uns largement nourri par le complexe d’infériorité des autres.

Notons en outre que le processus d’union de l’EPUdF est bien plus prudent et humble que celui qui avait présidé à l’enthousiasme de la création de l’ERF en 1938, qui avait laissé plusieurs pans des Eglises de côté : nombre de méthodistes, une moitié des libristes, les « EREI » / UNEPREF. Avec l’EPUdF, aucune Eglise de l’ex-EELF ou de l’ex-ERF n’est restée de côté.

L’enthousiasme de 1938 n’est sans doute pas étranger à l’impression de certains, dont S. Fath, qu’il y aurait — « tentation jamais démentie chez les protestants français réformés » (sic) — une « étrange spécificité nationale qui fait sourire dans bien d'autres pays, où l'on sait fort bien que le protestantisme se conjugue au pluriel. » Les protestants luthéro-réformés français (S. Fath oublie systématiquement les luthériens : seuls les réformés, apparemment, seraient victimes de « l’impensé catholico-jacobin ») ne sont peut-être pas toujours si incultes que le suggère S. Fath : ils savent parfois eux aussi « fort bien », comme dans « bien d’autres pays », que « le protestantisme se conjugue au pluriel » ! À ce point, on a l’impression que S. Fath en est resté à un état-parenthèse de la sociologie réformée française post-1938, ce qui conduirait à lui suggérer une mise à jour de ses logiciels.

L’enthousiasme de 1938 a pu faire espérer une nouvelle forme d’union, ecclésiale, là où le protestantisme français n’était pas plus ignorant de son évidente diversité (organisée en partie de façon fédérative), voire division (d’où la démarche de 1938 voulant y remédier). La pluralité, la diversité, se conjuguent avec l’unité, contrairement à la division — cf. la question de la Cène résolue dans le respect des diversités pour les luthériens et réformés. La question de l’autre sacrement, le baptême, divise encore quand un très grand nombre d’évangéliques nient la validité du baptême administré par les luthériens et les réformés, certains allant jusqu’à leur refuser le titre de « chrétiens ». À ce point la polémique soulevée par S. Fath pourrait être à double tranchant et la « préemption » pourrait se retourner, invitant chacun à modérer son ton et à prendre garde à sa poutre dans l’œil…

Où il eût été plus évangélique (au sens non-confessionnel/dénominationnel du terme — mon usage du mot dans les lignes qui précèdent aurait mérité des guillemets : les luthéro-réformés le revendiquent aussi) — où il eût été plus évangélique, au sens propre donc, de la part de S. Fath, de lire dans un esprit de bienveillance, sinon de pardon, les propos retranscrits d’interviews orales des pasteurs qu’il met en cause (quand on sait en outre combien les retranscriptions journalistiques écrites peuvent parfois trahir volens nolens les propos tenus dans une conversation informelle, en éroder les pointes d’humour, etc.). En retour je ne doute pas que, dans le même esprit évangélique, les concernés pardonneront à S. Fath son étrange coup de sang.

Attitude plus fraternelle que de renvoyer les luthéro-réformés à René Girard en enjoignant les évangéliques à s'autoproclamer martyrs sous figure de « tiers-exclu ».

Dernier point, à titre d’info : on notera que le site de la paroisse de Poitiers de l’EPUdF consacre deux (2 !) onglets aux « autres Eglises protestantes de la ville » (qu’elles soient FPF, CNEF, ou sans rattachement para-local), présentées en termes bienveillants. On serait ravi de voir apparaître la réciproque sur leurs sites, que celui de l’EPUdF met en liens…

R.P.


lundi 17 juin 2013

Résurrection & vie éternelle



« Je crois [...] la résurrection de la chair et la vie éternelle. »

« Nous attendons la résurrection des morts et la vie du siècle à venir. »


*

Résurrection — resurrectio (de resurgere) en latin, anastasis en grec — signifie littéralement « relèvement » (et donc, ici, relèvement d’entre les morts).

Si la notion relève, dans les Credo, de la foi, et de la foi en Christ ressuscité, elle correspond aussi, en soi, à un héritage philosophique, qui précède l’événement du dimanche de Pâques — c’est ce que souligne 1 Corinthiens 15 : « si les morts ne ressuscitent point, Christ non plus n'est pas ressuscité » (v. 17).

Un héritage reçu déjà auparavant par les pharisiens, et connu en Perse. C’est toute la question de la destinée humaine, et via l’homme qui conçoit cette notion, de la destinée de Création, qui est posée. L’intuition de l’éternité qui habite l’être humain passager (intuition « mise par Dieu dans le cœur de l’homme » — Ecc 3, 11) débouche sur des réflexions diverses, depuis celle de la mortalité en dépit de cette intuition (Ecc 9, 10), jusqu’à la conception de l’immortalité de l’âme (développée rationnellement par Platon). La notion de résurrection, qui ne reçoit, en général, pas l’aval des Grecs du premier siècle, admet que l’âme a pour fonction d’animer un corps, qui est pleinement constitutif de l’être humain : l’intuition de l’éternité concerne l’humain en son entier.

Les textes du Nouveau Testament mentionnant les apparitions du Ressuscité appuient cette approche là : le Christ ressuscité est doté de chair et d’os ! Ainsi là où le Symbole de Nicée-Constantinople parle de résurrection des morts, attend la résurrection des morts, le Symbole des Apôtres parle, lui, de résurrection de la chair, croit la résurrection de la chair — c’est-à-dire qu’il insiste sur l’idée que l’être humain est assumé en son entier dans l’éternité.

*

Dans l’Évangile selon Jean : « "Avance ton doigt ici et regarde mes mains ; avance ta main et enfonce-la dans mon côté, cesse d’être incrédule et deviens un homme de foi." Thomas lui répondit : "Mon Seigneur et mon Dieu." » (Jean 20, 27-28)

Dans le même ordre d’idées, dans l’Évangile selon Luc, Jésus s’adresse aux disciples de la sorte (Luc 24, 39) : « Regardez mes mains et mes pieds : c’est bien moi. Touchez-moi, regardez ; un esprit n’a ni chair, ni os, comme vous voyez que j’en ai. » Étrange invite que cette invite de Jésus… Scandale pour la raison que cette résurrection de la chair que Jésus signe ici dans son corps ressuscité : « un esprit n’a ni chair ni os ». Scandale pour la raison. D’où la tentation de « spiritualiser » tout cela… et de professer la résurrection, mais pas vraiment « de la chair » !

C’est contre cela qu’en Jean, Jésus invite Thomas à toucher ses plaies. Et il y invite aussi les douze et avec eux, par leur intermédiaire, tous ceux qui viendront ensuite, nous : heureux ceux qui n’ont pas vu comme Thomas, et qui ont cru, pourtant. Ici, on passe de la réflexion philosophique à la foi — « résurrection de la chair ». Car, quel est l’enjeu ? L’enjeu est rien moins que le sens — éternel ! — de notre vie, de notre vie « terrestre ».

Notre vie ne se réalise, ne se concrétise, que dans notre histoire, dans nos rencontres, dans la trivialité du quotidien, bref, dans la chair ! Et c’est cela qui est racheté, radicalement et éternellement racheté au dimanche de Pâques. Le rachat dont il est question n’est pas l’accès à un statut d’esprit évanescent. C’est bien tout ce qui constitue notre être, notre histoire, l’expérience de nos rencontres et donc de nos sens, de notre chair, qui est racheté. Notre histoire qui a fait de nous, qui fait de nous, qui fera de nous, ce que nous sommes, cette réalité de nos vies uniques devant Dieu. C’est l’extraordinaire nouvelle qui nous est donnée par le Ressuscité : lui aussi, Fils éternel de Dieu, advient à l’éternité qui est la sienne par le chemin de son histoire dans la chair : ses plaies elles-mêmes, qui ont marqué sa chair, sont constitutives de son être !

… Signe que tous nos instants, ceux de Thomas, des Apôtres, les nôtres, chacun de nos moments uniques dans l’éternité, est porteur de notre propre vocation à l’éternité !… à la « vie éternelle » (Symbole de Apôtres — vitam aeternam), ou « vie des siècles » (Nicée-Constantinople — vitam ventúri saeculi / ζωὴν τοῦ μέλλοντος αἰῶνος).

On retrouve ici la notion de « siècles », ou « mondes » que l’on a vue en parlant de la création du monde — selon la configuration antique du monde — que l’on retrouve dans le grec de la louange finale du Notre Père : « aux siècles des siècles » « aïonia ») : c’est le même mot que « siècle / monde (à venir) » employé dans le Symbole de Nicée-Constantinople. C’est aussi le mot qui traduit le terme hébreu « ‘olam » qui l’on trouve dans Ecclésiaste 3, 11, et que l’on rend souvent par « éternité » — ainsi dans « la vie éternelle ».

Un vocabulaire qui, compte tenu de la vision du monde qu’il suppose (« monde étagé » en plusieurs niveaux, ou « cieux ») parle d’une vie, la nôtre, dotée d’une richesse spirituelle, vie éternelle que l’Évangile de Jean appelle parfois simplement « La Vie ». Confesser la vie éternelle suppose donc affirmer que la vie dont il est question dans les textes bibliques ne se limite pas à sa dimension biologique, ni même culturelle, mais que ces dimensions-là trouvent leur sens et leur plénitude dans une dimension qui les dépasse, comme un autre niveau d’être, « siècle », « monde », « ciel » qui dès maintenant, et sans limitation de temps, pas même par la mort, investi notre être entier :

« Je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi vivra, quand même il serait mort ; et quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais » (Jean 11, 25-26).

« Vous êtes morts, et votre vie est cachée avec Christ en Dieu » (Colossiens 3, 3).


R.P.
Une lecture protestante des Credo.

Église réformée de Poitiers.
Catéchisme pour adultes.
2012-2013.
Chaque 3e mardi du mois à 20 h 30.
8) 18 juin 2013 — Résurrection & vie éternelle


lundi 10 juin 2013

La Cène - jusqu'aux extrémités de la terre




La célébration de la Cène au-delà de son institution et des rencontres du Ressuscité, apparaît au début du livre des Actes des Apôtres comme élément constitutif de la vie cultuelle de l’Église primitive, qui se développe autour de l’enseignement des apôtres, la communion fraternelle, la fraction du pain, et les prières :

Actes 2, 42-46
42 Ils persévéraient dans l’enseignement des apôtres, dans la communion fraternelle, dans la fraction du pain, et dans les prières.
43 La crainte s’emparait de chacun, et il se faisait beaucoup de prodiges et de miracles par les apôtres.
44 Tous ceux qui croyaient étaient dans le même lieu, et ils avaient tout en commun.
45 Ils vendaient leurs propriétés et leurs biens, et ils en partageaient le produit entre tous, selon les besoins de chacun.
46 Ils étaient chaque jour tous ensemble assidus au temple, ils rompaient le pain dans les maisons, et prenaient leur nourriture avec joie et simplicité de cœur.

Elle apparaît comme constitutive d’un idéal de vie communautaire suffisamment exigeant pour être pris en défaut face aux réalités de la vie concrète — cœur du dilemme entre la continuation de ce monde et l’espérance du Royaume…

Ce dilemme, cette distance entre l’exigence qu’induit le repas partagé et la réalité avec ses lourdeurs, traduisant la distance entre la foi et ce que l’on voit, ou ce que l’on craint quant au lendemain, apparaît déjà quelques chapitres plus loin, dans le même livre des Actes, ch. 6, où « les veuves des hellénistes » sont négligées dans ce partage ! — origine de l’institution des « diacres » visant à remédier à ce problème.

*

C’est ce même retour des réalités sociales concrètes que l’on retrouve chez les Corinthiens, et qui leur vaut les sévères remarques de Paul :

1 Co 11, 18-34
18 j’apprends que, lorsque vous vous réunissez en assemblée, il y a parmi vous des divisions, — et je le crois en partie,
19 car il faut qu’il y ait aussi des sectes parmi vous, afin que ceux qui sont approuvés soient reconnus comme tels au milieu de vous. —
20 Lors donc que vous vous réunissez, ce n’est pas pour manger le repas du Seigneur ;
21 car, quand on se met à table, chacun commence par prendre son propre repas, et l’un a faim, tandis que l’autre est ivre.
22 N’avez-vous pas des maisons pour y manger et boire ? Ou méprisez-vous l’Eglise de Dieu, et faites-vous honte à ceux qui n’ont rien ? Que vous dirai-je ? Vous louerai-je ? En cela je ne vous loue point.
23 Car j’ai reçu du Seigneur ce que je vous ai enseigné ; c’est que le Seigneur Jésus, dans la nuit où il fut livré, prit du pain,
24 et, après avoir rendu grâces, le rompit, et dit : Ceci est mon corps, qui est rompu pour vous ; faites ceci en mémoire de moi.
25 De même, après avoir soupé, il prit la coupe, et dit : Cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang ; faites ceci en mémoire de moi toutes les fois que vous en boirez.
26 Car toutes les fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous annoncez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne.
27 C’est pourquoi celui qui mangera le pain ou boira la coupe du Seigneur indignement, sera coupable envers le corps et le sang du Seigneur.
28 Que chacun donc s’éprouve soi-même, et qu’ainsi il mange du pain et boive de la coupe ;
29 car celui qui mange et boit sans discerner le corps du Seigneur, mange et boit un jugement contre lui-même.
30 C’est pour cela qu’il y a parmi vous beaucoup d’infirmes et de malades, et qu’un grand nombre sont morts.
31 Si nous nous jugions nous-mêmes, nous ne serions pas jugés.
32 Mais quand nous sommes jugés, nous sommes châtiés par le Seigneur, afin que nous ne soyons pas condamnés avec le monde.
33 Ainsi, mes frères, lorsque vous vous réunissez pour le repas, attendez-vous les uns les autres.
34 Si quelqu’un a faim, qu’il mange chez lui, afin que vous ne vous réunissiez pas pour attirer un jugement sur vous. Je réglerai les autres choses quand je serai arrivé.

*

Le problème connaît un autre aspect : comment être en communion dans une communauté composée de membres connaissant des rites alimentaires différents ? — ceux qui mangent casher et ceux dont ce n’est pas la tradition !

Quand on sait que la communauté se constitue dans la foi au Dieu de Jésus, dont la Torah, la loi, fonde la casherout qui vise à garantir le refus de l’idolâtrie et de toutes ses conséquences religieuses et morales (allant parfois jusqu’aux sacrifices humains ou à la prostitution « sacrée » !)…

1 Co 10, 14-33
14 Mes bien-aimés, fuyez l’idolâtrie.
15 Je parle comme à des hommes intelligents ; jugez vous-mêmes de ce que je dis.
16 La coupe de bénédiction que nous bénissons, n’est-elle pas la communion au sang de Christ ? Le pain que nous rompons, n’est-il pas la communion au corps de Christ ?
17 Puisqu’il y a un seul pain, nous qui sommes plusieurs, nous formons un seul corps ; car nous participons tous à un même pain.
18 Voyez les Israélites selon la chair: ceux qui mangent les victimes ne sont-ils pas en communion avec l’autel ?
19 Que dis-je donc ? Que la viande sacrifiée aux idoles est quelque chose, ou qu’une idole est quelque chose ? Nullement.
20 Je dis que ce qu’on sacrifie, on le sacrifie à des démons, et non à Dieu ; or, je ne veux pas que vous soyez en communion avec les démons.
21 Vous ne pouvez boire la coupe du Seigneur, et la coupe des démons ; vous ne pouvez participer à la table du Seigneur, et à la table des démons.
22 Voulons-nous provoquer la jalousie du Seigneur ? Sommes-nous plus forts que lui ?
23 Tout est permis, mais tout n’est pas utile ; tout est permis, mais tout n’édifie pas.
24 Que personne ne cherche son propre intérêt, mais que chacun cherche celui d’autrui.
25 Mangez de tout ce qui se vend au marché, sans vous enquérir de rien par motif de conscience ;
26 car la terre est au Seigneur, et tout ce qu’elle renferme.
27 Si un non-croyant vous invite et que vous vouliez y aller, mangez de tout ce qu’on vous présentera, sans vous enquérir de rien par motif de conscience.
28 Mais si quelqu’un vous dit: Ceci a été offert en sacrifice ! n’en mangez pas, à cause de celui qui a donné l’avertissement, et à cause de la conscience.
29 Je parle ici, non de votre conscience, mais de celle de l’autre. Pourquoi, en effet, ma liberté serait-elle jugée par une conscience étrangère ?
30 Si je mange avec actions de grâces, pourquoi serais-je blâmé au sujet d’une chose dont je rends grâces ?
31 Soit donc que vous mangiez, soit que vous buviez, soit que vous fassiez quelque autre chose, faites tout pour la gloire de Dieu.
32 Ne soyez en scandale ni aux Grecs, ni aux Juifs, ni à l’Eglise de Dieu,
33 de la même manière que moi aussi je m’efforce en toutes choses de complaire à tous, cherchant, non mon avantage, mais celui du plus grand nombre, afin qu’ils soient sauvés.

*

On voit que l’on est dans le cadre d’une communion — et du partage du pain qui la signifie — qui a vocation universelle, mais qui n’en porte pas moins ses exigences internes restrictives.

La nécessité d’une discipline qui apparaît, les exigences sociales qui en font partie, tout cela ne doit pas pour autant restreindre l’espérance d’un Royaume universel qui est manifestée dans le partage du pain !

Actes 27, 23-36
23 Un ange du Dieu à qui j’appartiens et que je sers m’est apparu cette nuit,
24 et m’a dit : Paul, ne crains point ; il faut que tu comparaisses devant César, et voici, Dieu t’a donné tous ceux qui naviguent avec toi.
25 C’est pourquoi, ô hommes, rassurez-vous, car j’ai cette confiance en Dieu qu’il en sera comme il m’a été dit.
26 Mais nous devons échouer sur une île.
27 La quatorzième nuit, tandis que nous étions ballottés sur l’Adriatique, les matelots, vers le milieu de la nuit, soupçonnèrent qu’on approchait de quelque terre.
28 Ayant jeté la sonde, ils trouvèrent vingt brasses ; un peu plus loin, ils la jetèrent de nouveau, et trouvèrent quinze brasses.
29 Dans la crainte de heurter contre des écueils, ils jetèrent quatre ancres de la poupe, et attendirent le jour avec impatience.
30 Mais, comme les matelots cherchaient à s’échapper du navire, et mettaient la chaloupe à la mer sous prétexte de jeter les ancres de la proue,
31 Paul dit au centenier et aux soldats : Si ces hommes ne restent pas dans le navire, vous ne pouvez être sauvés.
32 Alors les soldats coupèrent les cordes de la chaloupe, et la laissèrent tomber.
33 Avant que le jour parût, Paul exhorta tout le monde à prendre de la nourriture, disant : C’est aujourd’hui le quatorzième jour que vous êtes dans l’attente et que vous persistez à vous abstenir de manger.
34 Je vous invite donc à prendre de la nourriture, car cela est nécessaire pour votre salut, et il ne se perdra pas un cheveu de la tête d’aucun de vous.
35 Ayant ainsi parlé, il prit du pain, et, après avoir rendu grâces à Dieu devant tous, il le rompit, et se mit à manger.
36 Et tous, reprenant courage, mangèrent aussi.

*

Paul, on le voit, est aussi, selon ce chapitre des Actes des Apôtres, très au fait de la dimension d’ouverture universelle qui est dans « la fraction du pain »…

C’est tout le dilemme qui traduit le « déjà là » du Royaume, et le « pas encore advenu » du même Royaume que l’on est bien forcé de constater.

C’est aussi le dilemme entre « communion eucharistique et communion ecclésiale » : « discerner le corps du Christ », écrit Paul, ce qui connote évidemment l’union de la communauté appelée à s’étendre sur toute la face de la terre.

Les débats sur le mode de la présence du Christ à l’occasion de ce partage et les vocables qui accompagnent sa compréhension quant à sa relation avec le pain partagé — transsubstantiation, consubstantiation, symbolisme, etc. — ne peuvent valoir économie de ce que signifie la communion, la participation à un même corps, en termes de partage réel, avec ses implications sociales, en termes de fraternité, etc., sous peine de faire fi d’une tension — entre le « déjà » et le « pas encore » — qui est cœur de la vie de l’Église.


RP
Le pain dans la Bible.

Église réformée de Poitiers.
Étude biblique 2012-2013.
Chaque 2e mardi du mois à 14 h 30.
& chaque jeudi qui suit le 2e mardi à 20 h 30.
9) 11 & 13 juin 13 — Cène – 1 Co 11, 18-34 & 10, 14-33 /
Actes 2, 42-46 & 27, 23-36 (aux extrémités de la terre)