jeudi 30 avril 2020

Mémoire d’éternité — "ma chair pour la vie du monde"


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Jean 6, 44-51
44 Nul ne peut venir à moi si le Père qui m’a envoyé ne l’attire, et moi je le ressusciterai au dernier jour.
45 Dans les Prophètes il est écrit : Tous seront instruits par Dieu. Quiconque a entendu ce qui vient du Père et reçoit son enseignement vient à moi.
46 C’est que nul n’a vu le Père, si ce n’est celui qui vient de Dieu. Lui, il a vu le Père.
47 En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit a la vie éternelle.
48 Je suis le pain de vie.
49 Au désert, vos pères ont mangé la manne, et ils sont morts.
50 Tel est le pain qui descend du ciel, que celui qui en mangera ne mourra pas.
51 « Je suis le pain vivant qui descend du ciel. Celui qui mangera de ce pain vivra pour l’éternité. Et le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour que le monde ait la vie. »

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« Dans les Prophètes il est écrit : Tous seront instruits par Dieu. Quiconque a entendu ce qui vient du Père et reçoit son enseignement vient à moi », dit Jésus (v. 45). Lorsqu’il est donné à notre foi de percevoir le signe d’Alliance, d’y percevoir que là se noue un souvenir partagé, même oublié, mais dont Dieu est le garant — Dieu se souvient — lorsqu’on a reçu ce don dans la foi, on l’a reçu pour la vie d’éternité, « celui qui mange ce pain vivra dans le siècle d’éternité », dès aujourd’hui.

En effet ce que je reçois dans le signe de l’Alliance dont Dieu se souvient peut être vécu pour quiconque, même ayant oublié, même absent au jour du signe !

Le souvenir de Dieu, qui se souvient, qui, se souvenant, faisait libérer du joug de la servitude le peuple de l’Alliance lors de l’Exode (même si le peuple avait oublié) — peut valoir pour quiconque espère une libération et invoque le Dieu qui vient avec nous au désert : Dieu se souvient, se souvient pour nous, se souvient en nous. « C’est que nul n’a vu le Père, si ce n’est celui qui vient de Dieu. Lui, il a vu le Père. »

Croyant au Dieu de l’Alliance, ma foi à l’Alliance scellée un jour d’antan, vaut aujourd’hui force d’éternité parce que Dieu lui-même se souvient.

Et cette rencontre de mon humanité ; cette rencontre du souvenir de ce qu’un jour Dieu a rencontré la foi d’une Madeleine au tombeau vide ; la rencontre de ce souvenir et du souvenir de Dieu — c’est cela que la venue de Jésus dans notre humanité dit en plénitude. Dieu se souvient — d’un souvenir activé pour nos sens, notre chair, qu’il a partagés en Jésus.

C’est le message de l’Évangile de la multiplication des pains, reprise de la manne au désert : en Jésus, Dieu nous rejoint jusque dans nos déserts, les déserts de nos exils, au cœur de nos chairs.

Ce n’est pas du pain ingéré dont il s’agit — comme la vérité de la mémoire du Dieu de résurrection n’est pas au tombeau vide pour Marie Madeleine, pas plus qu’elle n’est pas dans le morceau de la madeleine de Marcel Proust trempé dans le thé (je le cite : « Je bois une seconde gorgée, où je ne trouve rien de plus que dans la première, une troisième qui m’apporte un peu moins que la seconde. Il est temps que je m’arrête, la vertu du breuvage semble diminuer. Il est clair que la vérité que je cherche n’est pas en lui, mais en moi. Il l’y a éveillée, mais ne la connaît pas ») —, ce n’est pas de pain ingéré (pas plus des pains multipliés hier, de la manne d’avant-hier ou d’un morceau de madeleine de l’enfance) qu’il s’agit mais de la vérité d’éternité dont le signe pour nos sens (comme un goût d’enfance) réactive la mémoire, mémoire d’éternité aujourd’hui, comme mémoire de Dieu et mémoire de la chair, mémoire dans la chair, « ma chair, dit Jésus, donnée pour la vie du monde. »


RP, 30.04.2020
En direct sur RCF Poitou à 8H45

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